Réforme territoriale et démocratie locale

Publié le 17 février 2012 à 0h00 - par

La démocratie locale est au centre de la réforme des collectivités territoriales, comme l’atteste le titre premier de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales : « Rénovation de l’exercice de la démocratie locale ».

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Les instruments juridiques mis en avant par le législateur sont la création des conseillers territoriaux et l’élection des membres des conseils communautaires des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Leur désignation se fera à partir de 2014 dans le cadre de l’élection municipale au suffrage universel direct pour toutes les communes dont le conseil municipal est élu au scrutin de liste. L’utilisation de ce mode de scrutin sera étendue, il concernera les communes de plus de 500 habitants au lieu de 3 500 aujourd’hui.

Si cette ambition de rénovation démocratique ne souffre pas de critiques, les circonstances de sa mise en œuvre s’annoncent périlleuses.

En effet la démocratie ne se décrète pas, elle nécessite une adhésion sociale qui a besoin d’un environnement favorable pour naître et se développer. Il ne suffit pas de décider de faire intervenir les électeurs pour créer une dynamique démocratique. Il s’avère indispensable de provoquer un investissement durable d’une majorité du groupe social concerné dans des projets communs.
 

Des doutes légitimes sur l’aspect démocratique

Or les inconvénients de la réforme des collectivités territoriales en cours sont suffisamment importants pour que surgissent des doutes sérieux sur leur effet bénéfique envers la démocratie locale. Parmi ces obstacles ressortent notamment :

– le recours à l’élection des délégués communautaires implique une politisation de leur désignation qui ne favorise pas la représentation des aspirations de la population ;
– le changement du paysage institutionnel perturbe le rattachement des citoyens à leurs repères traditionnels ;
– les communes sont souvent membres de plusieurs EPCI, ce qui rend la répartition des compétences confuse ;
– la mise en place des schémas de coopération intercommunale rencontre des difficultés et prend du retard.

Ces obstacles ne doivent pas nous amener à perdre de vue l’essentiel de la réforme : son efficacité est conditionnée par un renouveau démocratique. Si elle ne débouche que sur un réaménagement technocratique, elle ne remédiera pas à la coupure entre les élus et la population. Par conséquent, malgré les inconvénients de l’environnement juridique, il apparaît judicieux de solliciter les textes et de les compléter par des initiatives originales.
 

Favoriser l’esprit d’initiative

Il serait souhaitable de privilégier toutes les actions qui faciliteront la mise en place d’une meilleure relation entre les institutions et les populations locales. À titre d’exemple, les initiatives des élus locaux pourront s’articuler sur les points suivants :

– les affiliations politiques seront à utiliser avec discernement car elles risquent, non seulement d’interférer avec le traitement des problèmes locaux, mais encore de perturber l’investissement de la population dans les solutions proposées ;
– la communication doit devenir une préoccupation permanente des collectivités territoriales afin de revêtir un aspect pédagogique expliquant les objectifs à atteindre en dépit d’instruments juridiques perfectibles ;
– les initiatives associatives locales devraient être valorisées et servir de pépinière d’idées pour résoudre les problèmes locaux et définir les objectifs à moyen et long terme.

La rationalisation du fonctionnement des collectivités territoriales passe par un engagement conjoint des élus et de la population à défendre un intérêt général local. Cela ne se fera pas sans communication et sans compromis. C’est à ce prix que l’on pourra sauver la démocratie locale et éviter des affrontements stériles qui ne débouchent que sur le succès temporaire d’un camp aux dépends des autres.

Il devient plus que jamais nécessaire de changer de perspective afin de maîtriser les éléments juridiques complexes de la réforme des collectivités territoriales.

Roland Ricci
Professeur agrégé de droit public à l’Université Paris 13
Avocat au Barreau de Toulon

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