Une durée excessive du contrat ne rend pas le rejet d’une offre illégal

Publié le 24 juin 2014 à 0h00 - par

Le moyen est, selon le Conseil d’État, inopérant.

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Qu’est-ce qu’un moyen inopérant ?

Les justiciables peuvent, dans certaines conditions, saisir le juge administratif pour qu’il annule une décision de l’administration. À cette fin, il est indispensable d’invoquer des moyens de droits. Si l’un des moyens est fondé, il entraîne, en principe, l’annulation de la décision. Ainsi, par exemple, si une décision doit être motivée en vertu de la loi, et qu’elle ne l’est pas en l’occurrence, le juge annulera la décision si le moyen tiré du défaut de motivation est invoqué.

Cependant, parfois, un moyen même fondé n’entraînera pas l’annulation de la décision. Pour reprendre l’exemple précédent, si une décision n’est pas motivée, le moyen tiré du défaut de motivation est fondé. Mais si la décision fait partie des décisions qui n’ont pas à être motivées, le juge indiquera que le moyen inopérant, même fondé, est sans effet sur la légalité de la décision.

Par l’arrêt du 4 juin 2014, société Opilo, société Eurl Paris Plage, n° 368254,368427, le Conseil d’État vient de juger que le moyen tiré de ce que la durée du contrat excéderait la durée légalement admissible, est inopérant en ce qui concerne la décision de rejet d’une offre : « le moyen tiré de l’illégalité de la délégation de service public à raison de sa durée excessive, s’il était opérant à l’encontre de la délibération attribuant la délégation aux sociétés (…), était, en revanche, inopérant à l’encontre de la décision contestée par laquelle le maire (…) avait rejeté les offres de la société ».

Un raisonnement imparable ?

La cour administrative d’appel avait jugé, à l’inverse, que la durée excessive du contrat rendait illégal le rejet de l’offre. Elle n’a pas indiqué pour quelles raisons, mais l’on peut penser qu’elle a considéré que l’irrégularité de l’attribution du contrat rendait illégal l’ensemble des opérations afférentes à la procédure, y compris donc les décisions de rejet des offres non retenues.

Le Conseil d’État n’explicite pas davantage son raisonnement. En l’absence de disponibilité, pour l’instant des conclusions du rapporteur public, on ne peut qu’émettre des hypothèses. Peut-être le Conseil d’État a-t-il considéré que dès lors que le contrat était irrégulier, aucune attribution du contrat ne pouvait être régulière. Dans ces conditions, il serait logique de rejeter tous les moyens relatifs au rejet des offres puisque l’administration ne pouvait prendre que cette décision de rejet. Mais la juridiction ne s’est pas fondée sur le fait que l’administration se trouvait en situation de compétence liée. Elle n’a pas jugé que tous les moyens devaient être écartés, mais seulement celui retenu par la cour.

Il faut donc comprendre que, selon le Conseil d’État, l’éventuelle irrégularité des clauses du contrat qui a été signé ne peut pas rejaillir sur la décision de rejet de l’offre, parce que l’administration peut légalement rejeter une offre mais sans y être tenue, alors même que le contrat serait irrégulier.

Laurent Marcovici


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