Aides des collectivités et droit communautaire : intégrer les spécificités du secteur de la culture

Publié le 4 mai 2012 à 0h00 - par

La complexité des règles européennes applicables aux services culturels inquiète les élus. Le Sénat les invite à se mobiliser auprès de Bruxelles.

Début 2012, la commission de la culture du Sénat a chargé un groupe de travail d’étudier l’influence du droit communautaire sur le financement des services culturels par les collectivités locales. En effet, celles-ci ont beaucoup de mal à s’y retrouver parmi les règles juridiques nationales et communautaires. Et cette insécurité juridique conduit souvent les élus à prendre de mauvaises décisions. Craignant de se trouver face à un contentieux, ils adoptent une attitude extrêmement prudente, en recourant, par exemple, aux procédures formalisées comme l’appel d’offres, dont la lourdeur est inadaptée aux projets culturels.

Aides d’État, compensation de services d’intérêt économique général (SIEG)… : le droit européen applicable aux aides des collectivités en matière culturelle est, en effet, particulièrement complexe. L’Union européenne considère les professionnels de la culture au même titre que d’autres acteurs économiques, apparentés aux entreprises.

Toutes les aides qu’ils reçoivent, y compris la mise à disposition de locaux ou de personnel, sont donc soumises aux règles sur les aides d’État ; celles-ci sont prohibées lorsqu’elles conduisent à fausser la concurrence entre États membres. Or, les intervenants culturels, en particulier les associations, sont généralement inaptes à comprendre et à respecter ces règles communautaires, qui leur imposent une gestion administrative lourde et une trop grande rigueur comptable.

Des règles contradictoires

En outre, le droit communautaire édicte des règles différentes, et parfois contradictoires, de celles du droit français. Le droit européen permet de confier une mission culturelle à un opérateur sans organiser d’appel à la concurrence. Il autorise aussi le financement d’un service public par le biais d’une subvention, à condition de respecter trois critères :

  • le mandatement,
  • la juste compensation,
  • et les obligations de service public.

Toutefois, une collectivité n’est pas toujours capable de déterminer dans quelle mesure l’aide qu’elle verse compense des missions de service public susceptibles d’être subventionnées. L’Union européenne impose un mandat de la personne publique dans le cadre des SIEG. Quant au droit français, il restreint le recours aux subventions. Lorsqu’un projet est engagé à l’initiative de la collectivité, il ne peut être financé que par un marché public ou une délégation de service public. Une association ne peut donc obtenir de subvention que dans le cas où c’est elle qui est à l’origine du projet, et non la collectivité.

Le groupe de travail du Sénat appelle les élus à se mobiliser pour développer l’influence de la France auprès de Bruxelles, afin de mieux défendre ses spécificités. Par ailleurs, les obstacles aux relations entre pouvoirs publics et associations devraient être clarifiés, en révisant la circulaire du 18 janvier 2010. Le Sénat estime qu’il conviendrait également de rassurer les élus et les professionnels du spectacle : identification des risques juridiques réels, aide au pilotage de la stratégie de financement des politiques culturelles, formation des agents des directions régionales de l’action culturelle (DRAC)…

Marie Gasnier


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