Anne Carayon : « Les « colos » sont des lieux éducatifs »

Publié le 17 juillet 2012 à 0h00 - par

Les enfants partent de moins en moins en vacances et en séjours collectifs. La secrétaire générale de la Jeunesse en plein air, Anne Carayon évoque les mesures qui pourraient développer les départs en séjours de vacances.

Weka : Pour inciter davantage de familles à envoyer leurs enfants en séjours, quelles mesures seraient prioritaires aujourd’hui ?

Anne Carayon : « Il faut d’abord qu’il y ait une reconnaissance du fait que les séjours collectifs de mineurs sont d’intérêt général : ce sont des vacances complémentaires par rapport aux vacances en famille. Les « colos » sont vues comme des lieux éducatifs par les parents qui y envoient leurs enfants, mais cela n’est pas reconnu par les pouvoirs publics. En tant qu’organisateurs de séjours collectifs, nous devons défendre ce que ces séjours apportent aux enfants : l’accès à l’autonomie, la rencontre avec l’autre, l’apprentissage de la différence, la confrontation à ses propres difficultés.

Et nous devons réaffirmer notre différence avec le secteur marchand : notre engagement dans le projet de faire partir tous les enfants, dans la mixité sociale. Quand les sociétés privées sont arrivées sur notre terrain, nous avons tenté de les imiter dans le domaine de la communication. Il faut revenir à ce qui fait notre caractéristique. »

Weka : Une campagne nationale d’information sur l’intérêt des vacances collectives pour les enfants et les jeunes est donc toujours nécessaire ?

Anne Carayon : « Oui, car il y aussi un problème d’accès à l’information : les parents qui veulent faire partir leur enfant ne savent pas toujours à qui s’adresser. Et ceux qui n’ont jamais été eux-mêmes en colonies de vacances ne savent pas ce qui s’y passe, ni ce qu’on y vit. Autrefois, l’école jouait un rôle incitatif important. Grâce à la formation des enseignants qui prenait en compte l’expérience d’animateur (cette expérience pouvait donner lieu à des points supplémentaires), l’animation était un passage obligé pour les professeurs. Les jeunes enseignants actuels connaissent peu les colonies et ne peuvent informer les parents. Une campagne permettrait d’affirmer l’importance de ces séjours et de stimuler la diffusion de l’information. »

Weka : Des aides financières pour le départ des enfants en vacances existent déjà pour les familles. De quelle manière peut-on les améliorer ?

Anne Carayon : « 88 % des familles qui envoient leur enfant en séjour collectif n’auraient pu les faire partir sans ces aides financières. C’est la preuve qu’elles sont nécessaires. L’une des priorités est donc de faire un état des lieux des aides existantes : celles des caisses d’allocations familiales, celles des collectivités locales, celles des comités d’entreprise. Toutes sont différentes d’un lieu à l’autre. Il faut les recenser et voir comment elles s’articulent. À celles-ci, il faut très certainement ajouter une aide. Avec la plate-forme d’associations, nous avons proposé qu’elle soit de 200 euros par séjour d’une semaine pour un enfant. »

Weka : Vous demandez également des tarifs réduits de la part des transporteurs. Pourquoi ?

Anne Carayon : « Le transport représente un coût très important des séjours. Pour le train, la SNCF accorde des réductions « Trains jeunesse » pour des billets réservés treize mois à l’avance, ce qui est généralement impossible pour l’organisateur. Du coup, celui-ci paye le plein tarif. Certains organisateurs proposent aujourd’hui d’amener l’enfant sur le lieu du séjour, mais toutes les familles ne peuvent assumer ce transport. Et puis, prendre le train ou le car en groupe est une éducation à l’autonomie. La mise en place de tarifs préférentiels est un levier important pour rendre les séjours plus accessibles. »

Weka : Quelles sont les autres mesures à mettre en œuvre, selon vous ?

Anne Carayon : « Une aide à la rénovation des bâtiments où se déroulent les séjours est nécessaire. Elle permettrait la mise aux normes des bâtiments accueillants du public pour l’accès aux personnes handicapées, obligatoire en 2015. Aujourd’hui, personne ne finance ces rénovations. Une autre mesure importante est la création d’un véritable statut pour les animateurs volontaires ».

Propos recueillis par Naly Gérard

La Jeunesse au plein air (JPA) mobilisée de longue date pour le départ en vacances de tous les enfants, a été à l’initiative de la plate-forme d’associations « Droit aux vacances des enfants » en 2006.

Deux ans plus tard, le projet de loi « Aide au départ en vacances » était déposé à l’Assemblée nationale, par le député de la Loire Régis Juanico. Cette proposition de loi n’a pas été examinée jusqu’à présent.

 

 

 

Article extrait de la Lettre Enfance et loisirs, n° 39, Éditions Weka, juin-juillet 2012

 

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