Enfants et écrans : encourager une meilleure protection

Publié le 21 décembre 2012 à 0h00 - par

Le rapport 2012 du Défenseur des droits consacré aux droits de l’enfant formule 10 propositions pour aider les enfants à « grandir dans le monde numérique ».

Enfants et écrans : encourager une meilleure protection

Pour tout comprendre

Alors que nombre d’enfants s’apprêtent à découvrir au pied du sapin de Noël de nouveaux jeux électroniques, des tablettes numériques et autres ordinateurs et téléphones portables, le rapport 2012 du Défenseur des droits consacré aux droits de l’enfant est dédié, fort à propos, au thème : « Enfants et écrans : grandir dans le monde numérique ». Ces médias, « qui s’avèrent aussi vecteurs de connaissances et d’éducation pour tous, ne sont pourtant pas sans risques pour les enfants », explique la Défenseure des enfants, Marie Derain. Leurs effets, positifs ou négatifs, comme leurs conséquences sociales, sanitaires et psychiques, suscitent toujours de nombreuses questions.

« Ce rapport ne prétend pas aborder tous les enjeux de l’irruption du numérique dans la vie quotidienne », reprend la Défenseure des enfants. Il a pour objectif d’examiner les évolutions en cours, sous l’éclairage des droits des enfants définis par la Convention internationale des droits de l’enfant. En effet, à l’image du puissant impact d’internet sur la vie des enfants, plusieurs de leurs droits sont concernés.

« Les efforts de protection demeurent à encourager fortement, souligne Marie Derain. Tous les acteurs (pouvoirs publics, secteur privé, enfants, parents et tous ceux qui sont amenés à jouer un rôle auprès des enfants) doivent prendre leur part de responsabilité, afin d’installer « un Internet plus sûr pour les enfants ». » Pour les aider dans cette mission, le Défenseur des droits avance 10 propositions.

Proposition 1

Instaurer une co-régulation des politiques du numérique en direction des enfants et des adolescents, grâce à une plate-forme de réflexion, de propositions et d’interventions rassemblant l’ensemble des acteurs publics et privés du numérique. La diversité des structures, des modes de diffusion, des bases juridiques et des pratiques rend difficile l’élaboration d’une politique cohérente de protection de l’enfance face aux écrans. Rassemblant les acteurs publics et privés du numérique, tout en respectant la diversité des champs d’intervention et des sensibilités, cette instance aurait pour mission :

  • La coordination entre les acteurs publics, privés, nationaux et internationaux ;
  • La coordination des dispositions juridiques et réglementaires, et des pratiques ;
  • La déontologie ;
  • Les études et la prospective ;
  • L’information et la diffusion des connaissances auprès des professionnels comme du grand public.

Proposition 2

Rendre visible, sur tous les sites, les modalités de signalement des contenus illicites et des contenus ou comportements inappropriés. Les modalités de signalement devraient, obligatoirement, respecter un format et un positionnement définis (la loi les a déjà rendus obligatoires pour les jeux d’argent en ligne).
Mieux informer les jeunes sur leurs responsabilités dans l’utilisation d’internet. Assurer une meilleure information des internautes par les éditeurs de sites, en insérant des messages plus clairs et plus visibles.

Proposition 3

Intégrer le droit au déréférencement au règlement européen actuellement en préparation.
Faire reconnaître aux mineurs le droit à une protection renforcée de leur vie privée : droit à l’oubli, droit au déréférencement.
En janvier 2012, la Commission européenne a rendu publique une proposition de règlement européen réformant le cadre de la protection des données personnelles, qui propose plusieurs avancées dans la protection des enfants. En effet, le droit actuel de la protection des données est limité en ce qui concerne les enfants.

Proposition 4

Inciter, au niveau international, les acteurs privés du numérique à l’autorégulation pour renforcer la protection des enfants. Plusieurs initiatives d’autorégulation initiées par différents acteurs du numérique (jeux vidéo, réseaux sociaux, industriels) ont déjà vu le jour et prospéré au plan international. Elles ont montré leur pertinence.
Dans ce cadre d’action internationale, soutenir l’organisation d’un groupe de ressources et d’appui (expertise, conseil, finances, protection) aux instances publiques ou privées de pays souhaitant mettre en place une hotline, mais n’en ayant pas les moyens, à l’instar du réseau Inhope, association internationale des hotlines internet.

Proposition 5

Développer une politique de recherche pluridisciplinaire et indépendante concernant les usages, les effets et les conséquences de la généralisation du numérique pour les enfants. De telles connaissances conditionnent la définition des actions à court ou long terme à mener, les priorités à établir, les recommandations à diffuser en matière de développement cognitif et social de l’enfant, de santé, de pédagogie…

Proposition 6

Assurer une formation effective aux TICE des principaux acteurs intervenant auprès des enfants (professeurs, éducateurs, animateurs…), abordant aussi bien la sensibilisation aux risques, les informations sur les systèmes de protection, que l’accès à la culture et à la connaissance. Trop d’initiatives coûteuses voulant mettre en œuvre les ressources numériques à l’école, dans le monde de la culture, de la santé, des loisirs, achoppent faute d’une formation adaptée réellement dispensée aux intervenants, contribuant ainsi à une image de confusion et à la mauvaise utilisation de ces ressources pourtant considérables.

Proposition 7

Former davantage et systématiquement les policiers et gendarmes à la spécificité des procédures (recueil de plaintes, recherche de preuves) liées à la cyberdélinquance dans laquelle des mineurs peuvent être impliqués en tant qu’auteurs ou victimes.

Proposition 8

Modifier la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, afin d’y intégrer l’obligation, dans toutes les publicités, d’indiquer que ces jeux sont interdits aux moins de 18 ans.

Proposition 9

Élaborer un texte législatif pour donner une portée contraignante aux recommandations existantes afin de protéger les enfants des publicités insérées dans les jeux vidéo. De telles publicités connaissent un développement important, mais les recommandations formulées par plusieurs instances professionnelles ne s’imposent pas à tous.

Proposition 10

Étendre à la chaîne Arte les dispositions mises en place et promues par le CSA en matière de protection des enfants et des adolescents vis-à-vis « des programmes des services de communication audiovisuelle susceptibles de nuire à leur épanouissement physique, mental et moral » (application de la signalétique en vigueur au CSA, protection des mineurs participant aux émissions télévisées, protection des tout petits, protection contre la pression publicitaire).

Le dispositif actuellement utilisé par Arte ne permet pas d’assurer une protection équivalente, comme l’a constaté le CSA dès 2004. Groupement d’intérêt économique (GEIE), Arte n’est pas contrôlée par le CSA, mais soumise à la surveillance et au contrôle de ses seuls sociétaires « à l’exclusion de toute intervention d’autorité publique, y compris d’autorités indépendantes chargées de la régulation de l’audiovisuel dans le pays du siège » (article 1er du Traité interétatique).