Une présidentielle sous état d’urgence, inédit sous la Ve République

Publié le 11 janvier 2017 à 17h00 - par

L’élection présidentielle se tiendra en plein état d’urgence, une situation inédite sous la Ve République, en raison d’un risque terroriste toujours très élevé après la vague d’attentats commis en France depuis deux ans.

Une présidentielle sous état d'urgence, inédit sous la Ve République

« Nous commettrions une grave erreur si nous baissions la garde », avait averti le ministre de l’Intérieur, Bruno Le Roux lors du vote en décembre de la cinquième prolongation de l’état d’urgence.

C’est largement à cause des échéances électorales qu’a été prolongé ce régime d’exception, décrété au soir des attentats du 13 novembre 2015, les pires jamais commis en France avec 130 morts. Cette fois, il durera jusqu’au 15 juillet, soit après la présidentielle (23 avril et 7 mai) et les législatives (11 et 18 juin). À cette date, la France aura connu sa plus longue période d’état d’urgence ininterrompue.

L’« intense période électorale » en 2017 « accroît encore les risques de passage à l’acte des terroristes », avait mis en garde M. Le Roux.

Or, la menace jihadiste est déjà sans précédent, après une série d’attaques qui ont fait 238 morts depuis janvier 2015. En outre, selon le gouvernement, 17 projets d’attentats ont été déjoués sur le sol national en 2016.

En deux ans, la société française a été plongée dans une situation inédite, voguant d’unité nationale en polémiques sur les failles de la sécurité, en particulier après l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice (86 morts).

Entretemps, un arsenal antiterroriste a été mis en place : quatre lois, 9 000 recrutements dans les forces de l’ordre, selon le gouvernement.

En vue des élections, de « nouvelles instructions » seront données, a promis M. Le Roux en recevant les préfets le 13 décembre à Beauvau, où il a remplacé Bernard Cazeneuve, nommé Premier ministre.

Il s’agira « d’adapter les moyens » en mettant l’accent sur les meetings puis sur les bureaux de vote comme cela été fait pour la primaire de la droite et bientôt celle initiée par le PS (22-29 janvier), indiquent des sources au ministère de l’Intérieur.

Risque de cyberattaques

Avec le renforcement du plan Vigipirate et la mise en place de l’opération Sentinelle depuis 2015, environ 100 000 policiers, gendarmes, militaires et réservistes sont officiellement déployés en France. Il y a un « vivier » que l' »on peut et doit adapter », explique-t-on.

S’ajoute la future protection rapprochée des candidats qui « sera renforcée » comme elle l’est déjà, depuis les attentats, pour des « dizaines de personnalités ».

« La sécurité n’est pas qu’une affaire d’effectifs », estime cependant Patrice Ribeiro, de Synergie (second syndicat d’officiers de police), pour qui les forces de l’ordre sont « à flux tendus ».

L’attentat de Berlin a relancé interrogations et inquiétudes, après la mort de 12 personnes tuées le 19 décembre par un camion-bélier lancé sur la foule d’un marché de Noël.

L’auteur présumé de la tuerie, le Tunisien Anis Amri, a traversé dans sa cavale une partie de l’Europe (Pays-Bas, France, Italie) en empruntant cars et trains, avant d’être tué par la police italienne à Milan le 23 décembre.

Si nous sommes désormais davantage « réactifs à l’intérieur » de nos frontières, « l’effort doit porter sur l’Europe », alerte le criminologue Alain Bauer. « On entre et on sort comme on veut, c’est étonnant ! »

Enfin, un autre type de menace plane sur le scrutin, ou au moins sur la future campagne : les cyberattaques.

Une menace qui paraît tout sauf théorique depuis qu’un rapport du renseignement américain publié le 6 janvier a accusé la Russie d’être à l’origine de piratages informatiques contre le camp démocrate durant la présidentielle aux États-Unis.

Bruno Le Roux soulignait d’ailleurs dimanche le risque de « messages » et d’« attaques » qui, pendant la campagne, « peuvent essayer d’influencer le scrutin » et d’en altérer la « sincérité ».

La France n’est pas à l’abri d’attaques comme celles subies aux États-Unis, a insisté le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian : « Il ne faut pas être naïf. »

par Rémy BELLON

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