Réforme intercommunale : en cas de fusion, attention à « l’intérêt communautaire »

Publié le 5 juillet 2013 à 0h00 - par

La définition de l’intérêt communautaire est stratégique pour les communes fusionnées dans une nouvelle communauté. Il détermine les compétences de l’EPCI et de ses membres.

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Comment déterminer les compétences confiées à l’intercommunalité et celles conservées par les communes ?

C’est l’une des questions abordées par David  Le Bras, délégué général de l’Association des directeurs généraux des communautés de France (ADGCF), et Philippe Bluteau, avocat spécialisé dans le droit des collectivités locales, au cours d’une réunion, organisée par Weka, sur les conséquences de la réforme intercommunale sur la gestion des services publics locaux, le 25 juin à Paris.

La loi sur la réforme intercommunale de 2010* énumère les compétences obligatoires des communautés d’agglomération, et leur laisse la liberté de transférer ensuite les autres compétences selon leur souhait, afin de correspondre à la diversité des projets locaux. Mais, en cas de fusion, toutes les compétences doivent être mises en commun avant de décider celles qui sont conservées par la nouvelle structure, et celles qui sont restituées aux communes.

Le conseil communautaire dispose d’un délai de trois mois, à compter de l’entrée en vigueur de l’arrêté de fusion, pour décider si les anciennes compétences, optionnelles et facultatives, exercées par les communes qui ont fusionné, font l’objet d’une restitution aux communes.

Ce délai est porté à deux ans lorsque la restitution porte sur des compétences qui ne sont ni obligatoires, ni optionnelles, et peuvent être restituées partiellement aux communes. Lorsque l’exercice des compétences du nouvel établissement public, issu de la fusion, est subordonné à la reconnaissance de l’intérêt communautaire de ces compétences, celui-ci est défini, au plus tard, dans les deux ans de l’arrêté de fusion.

En attendant cette définition, l’intérêt communautaire de chacune des communautés fusionnées est maintenu, dans les anciens périmètres correspondant à chacun de ces établissements.

Les conséquences de la réforme intercommunale sur la gestion des services publics locaux, Weka

Risque de voir réapparaître des syndicats intercommunaux

Or, l’hétérogénéité des situations, qui apparaît au moment de restituer les compétences aux communes, ne facilite pas le choix pour les élus. En effet, conserver toutes les compétences implique de réorganiser le service et de recruter.

Par exemple, la compétence zone d’activité économique (ZAE) ne peut pas intéresser une communauté de communes, constituée de cinq villages de 200 habitants et qui n’a que trois entreprises… Des villages qui n’ont jamais assuré, seuls, une compétence, seront donc tentés de recréer des syndicats intercommunaux ad hoc… D’où le risque de voir se constituer d’importantes intercommunalités, accompagnées d’une multitude de petits syndicats intercommunaux, ce qui serait contraire à l’objectif de la réforme : limiter le nombre d’entités.

La définition de l’intérêt communautaire est stratégique

En dehors des blocs de compétences obligatoires, la répartition des compétences dépend de la définition de « l’intérêt communautaire ». Soit, les communautés exercent réellement leurs compétences, soit la compétence est partagée entre communes et intercommunalité, soit elle est laissée aux communes. Les intervenants ont cité l’exemple d’une métropole où, bien que la compétence économique soit obligatoire, chaque commune conserve, en fait, son service économique, et ce bien que les politiques de la ville-centre et des communes-membres ne soient pas forcément les mêmes.

Les villages ruraux n’aiment pas mutualiser les charges des grands équipements

Toutes les compétences partagées des projets d’intérêt communautaire (zone d’activité économique, Zac, politique de la ville, logement…) doivent obligatoirement figurer dans les statuts de l’intercommunalité. C’est ce qui dessine la ligne de partage entre les compétences de l’EPCI et celles des communes.

L’intérêt communautaire, pour les communautés d’agglomération et les communautés urbaines, est discuté en conseil communautaire et voté à la majorité des deux tiers. Dans les communautés de communes, ce sont les communes-membres qui le définissent, à la majorité qualifiée : soit la moitié des communes, représentant les deux tiers de la population, soit les deux tiers des communes, représentant la moitié de la population.

Le gouvernement aimerait que ce soit désormais le conseil communautaire qui se prononce pour les communautés de communes également. Selon maître Bluteau, il y aurait alors un risque de voir les communes définir un intérêt communautaire très large, de façon à ce que tous les équipements importants (médiathèques, piscines…), plus onéreux, soient confiés à l’intercommunalité.

En effet, la répartition automatique des sièges n’octroierait pas forcément un tiers des sièges à la ville-centre, notamment dans les EPCI qui intègrent un très grand nombre de communes. « Cela donnerait ainsi la main aux villages ruraux, qui ne veulent pas mutualiser les charges de centralité », a précisé maître Bluteau. Ce qui serait aujourd’hui impossible, car la ville-centre dispose d’un droit de veto.

Martine Courgnaud – Del Ry

 

* Loi n° 2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale dite « loi Pélissard Sueur »

Le volet intercommunal de la réforme territoriale, Note juridique de l’AdCF

Jusqu’à cette délibération, le nouvel établissement public exerce, dans les anciens périmètres correspondant à chacun des établissements publics de coopération intercommunale ayant fusionné, les compétences transférées à titre optionnel ou supplémentaire par les communes à chacun de ces établissements publics.

 

 

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