Le droit de la commande public sous l’œil du juge pénal

Publié le 20 novembre 2013 à 0h00 - par

Le risque pénal doit être pris en compte.

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Une forte incitation à respecter le Code des marchés publics

La juridiction administrative est le juge naturel des contrats administratifs et, bien évidemment, des procédures de la commande publique. Toutefois, il est clair que la menace de sanctions pénales est une incitation forte, pour les décideurs, à se conformer au droit. C’est une des raisons de la pénalisation de la commande publique. Nombre d’élus redoutent d’ailleurs une confrontation avec la justice pénale, et certains comportements portent, de ce fait, la marque d’une prudence excessive. Il en existe vraisemblablement une autre. En effet, le juge administratif dispose de pouvoirs d’investigation bien inférieurs au juge pénal. Pour établir les faits, il est parfois expédient, pour des requérants très déterminés, d’invoquer auprès de ce juge la prise illégale d’intérêt ou le délit de favoritisme.

Ce sont en effet essentiellement ces deux incriminations qui sanctionnent les comportements en matière de commande publique.

La prise illégale d’intérêt est définie à l’article 432-12 du Code pénal, comme le fait « par une personne dépositaire de l’autorité publique … de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement ». Concrètement, il s’agit ici pour un décideur, de bénéficier d’un avantage personnel à la passation d’un contrat.

Le délit de favoritisme, prévu à l’article 432-14 du Code pénal, sanctionne le fait « de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ».

Le juge pénal donne des signaux clairs aux décideurs publics, qui peuvent se conduire de manière prudente

Le contrôle du juge pénal est très large puisqu’il sanctionne non seulement le respect des procédures formalisées, mais également les « principes généraux de la commande publique » (Cass. Crim, 5 décembre 2012, n° 12-80.032). Il peut aussi prendre en compte les constats d’illégalité déjà jugés par le juge administratif. Observons que le juge pénal sanctionne les auteurs des délits, mais aussi ceux qui en bénéficient, au titre du recel des infractions commises.

Il ressort assez  clairement de la jurisprudence récente que les décideurs publics, s’ils sont suffisamment prudents, devraient pouvoir éviter de subir des punitions à caractère pénal. C’est ainsi, que pour condamner un élu, la cour de cassation, mentionne que la procédure à utiliser était incertaine, mais surtout que l’élu s’est abstenu de saisir de cette question l’avocat de la collectivité publique (Cour de cassation, ch. Criminelle, 7 novembre 2012, 11-82.961). C’est bien ce dernier élément qui apparaît comme déterminant dans cette affaire. Un décideur prudent consultera donc ses conseils juridiques, service interne ou avocat.

Laurent Marcovici


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