Le régime juridique des contrats conclus entre personnes publiques n’est guère dérogatoire

Publié le 18 juillet 2014 à 0h00 - par

Les contrats entre personnes publiques sont en principe des contrats administratifs.

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Un principe ancien

C’est le Tribunal des conflits (TC) qui, le 21 mars 1983, par un arrêt Union des assurances de Paris, n° 02256, a décidé qu’un « contrat conclu entre deux personnes publiques revêt en principe un caractère administratif, impliquant la compétence des juridictions administratives pour connaître des litiges portant sur les manquements aux obligations en découlant ». Mais, comme toute règle comporte une exception, le TC, précise que la solution est inverse lorsque « eu égard à son objet, il ne fait naître entre les parties que des rapports de droit privé ».

L’exception a trouvé une application dans une hypothèse d’une convention de location passée entre un office public d’habitation à loyer modéré et le bureau d’aide sociale d’une commune donnant à bail un ensemble de bâtiments moyennant une redevance fixée en fonction de la législation sur les H.L.M., le bureau d’aide sociale ayant « la responsabilité entière et exclusive de tous les services (…) fonctionnant dans les lieux loués » (CE, 11 mai 1990, n° 60247, Bureau d’aide sociale de Blénod-les-Pont-à-Mousson c/ O.P.H.L.M. de Meurthe et Moselle). Et également pour les contrats pour la fourniture de véhicules automobiles usuels (CE, 3 novembre 2003, n° 238008, Union des groupements d’achats publics). Bien entendu, si le contrat a pour objet l’exécution même du service public, le contrat est administratif (TC, 7 octobre 1991, n° 02651, Centre régional des œuvres universitaires et scolaires de l’académie de Nancy-Metz).

Un régime juridique non dérogatoire

Un contrat administratif, conclu entre personnes publiques, relève d’un régime de droit public, y compris lorsqu’il autorise un régime exorbitant qui, dans cette hypothèse, s’exercera à l’égard d’une autre personne publique, et non pas d’une personne privée.

Les personnes publiques disposent à l’égard de leurs cocontractants de prérogatives qui sont justifiées parce que l’administration est la garante de l’intérêt général. Mais lorsque les deux contractants sont des personnes publiques, ne sont-elles pas toutes deux en charge de l’intérêt général, et peuvent-elles utiliser lesdites prérogatives ?

Le Conseil d’État répond de manière affirmative à cette question. Il vient en effet de juger que « la circonstance qu’un contrat soit conclu entre deux personnes publiques ne fait pas obstacle au pouvoir de chacune de ces personnes publiques de résilier unilatéralement le contrat pour un motif d’intérêt général » (CE, 4 juin 2014, n° 368895, Commune d’Aubigny-les-Pothées).

Il est permis de penser que cette solution serait également applicable à d’autres pouvoirs exorbitants comme, par exemple, au pouvoir de modification unilatérale des contrats.

Laurent Marcovici


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