Les détenus au travail ont des droits limités, mais ils doivent être respectés

Publié le 2 juin 2016 à 16h08 - par

Un droit dérogatoire au droit commun.

Prison

Le Code de procédure pénale réglemente le travail des détenus

Comme le prévoit l’article du Code de procédure pénale (art. 17-3), « les relations de travail des personnes incarcérées ne font pas l’objet d’un contrat de travail ». En d’autres termes, le travail des détenus échappe au code du travail, et notamment au minimum de rémunération garantie. Il s’agit, comme l’expliquait Mme Bretonneau devant le Conseil d’État « d’assurer un équilibre… entre le respect des droits des détenus à obtenir une rémunération pour leur travail… et les spécificités de l’organisation et de la main-d’œuvre carcérales, qui n’inciteraient pas nécessairement les entreprises à faire des prisons leur vivier de recrutement privilégié si les règles du Code du travail trouvaient pleinement à s’y appliquer ».

Mais c’est un contrat qui règle les relations entre les entreprises et l’administration pénitentiaire, dans le cadre des « concessions de travail » à l’intérieur des établissements. Les règles qui en découlent sont contrôlées par le juge administratif, alors même qu’elles mettraient en cause deux personnes privées, le détenu et l’entreprise (TC, 14 octobre 2013, M. Vincent c/ ministère de la Justice, n° 3918).

C’est un litige relatif à la rémunération que le Conseil d’État a dû trancher, dans l’affaire jugée le 7 mars 2016, n° 380540. Le requérant rémunéré au tarif horaire brut de 3,90 euros contestait la modulation à la baisse de sa rémunération sur le fondement de sa productivité.

Pas de modulation à la baisse sans information préalable

Le requérant avait été mis à disposition d’une société, il avait conclu un « support d’engagement au travail » avec le directeur de ce centre pénitentiaire, prévoyant une rémunération de 3,90 euros de l’heure. Le Conseil d’État rappelle que les modalités de rémunération des personnes détenues employées par les entreprises sous le régime de la concession de main-d’œuvre pénale résultent du Code de procédure pénale, et qu’elles présentent un caractère réglementaire. Il en résulte que « pour être opposables aux personnes détenues, ces modalités de rémunération doivent être portées à leur connaissance, en même temps que les taux horaires de rémunération, par un affichage suffisant accessible à l’ensemble des détenus… Il doit également être fait référence à ces modalités de rémunération, ainsi qu’aux conditions particulières de leur exécution applicables à chaque personne détenue exerçant une activité professionnelle, dans le support de l’engagement au travail ou dans l’acte d ’engagement signé avec le directeur de l’établissement pénitentiaire ».

En l’espèce, le jugement n’avait pas vérifié que ces modalités avaient bien été portées à sa connaissance de manière suffisante. Son jugement a donc été annulé. Cela signifie que les détenus doivent être suffisamment renseignés des modalités de leur rémunération.

Laurent Marcovici


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