Marché à forfait : quelle indemnisation des difficultés rencontrées ?

Publié le 22 octobre 2013 à 0h00 - par

Une indemnisation dont les règles se durcissent.

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Marché à forfait : une indemnisation traditionnelle difficile

Les marchés publics ne se déroulent pas toujours de la manière prévue. En cas de difficultés, en principe, les entreprises doivent remplir leurs missions sans pouvoir réclamer de sommes supplémentaires aux prix fixés par les clauses de leurs contrats.

Traditionnellement, la possibilité d’indemnisation des aléas du déroulement des contrats n’est possible que sous certaines conditions, qui ont été fixées par l’arrêt du CE, du 19 février 1975, n° 80470, Ministre d’État chargé de la Défense nationale c/ Société Entreprises Campenon-Bernard et autres. Tout d’abord, les difficultés doivent avoir un caractère « exceptionnel et imprévisible ». Mais, au surplus, ces difficultés n’ouvrent droit à une indemnité au profit des entrepreneurs que dans la mesure où ceux-ci justifient soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat, soit qu’elles sont imputables à un fait de l’administration (cf. encore CE, 19 février 1992, n° 47265, S.A. Dragages et Travaux Publics et autres). La condition tenant au bouleversement de l’économie du contrat n’est donc pas exigée lorsque les faits en cause sont le fait de l’administration.

La cour administrative d’appel de Douai, par un arrêt du 19 juillet 2011, a étendu ce « fait » de l’administration, au comportement des autres entreprises présentes sur le chantier.

Des principes fermes rappelés par le Conseil d’État

Désormais, aux termes du considérant de principe de l’arrêt du CE du 5 juin 2013, Région Haute-Normandie, « les difficultés rencontrées dans l’exécution d’un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l’entreprise titulaire du marché que dans la mesure ou celle-ci justifie soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat soit qu’elles sont imputables à une faute de la personne publique ». Et le Conseil d’État précise que, en jugeant que la responsabilité de l’administration « était susceptible d’être engagée du seul fait de fautes commises par les autres intervenants à l’opération », la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit. Il est donc clair, désormais, que les participants à une opération de travaux publics ne peuvent pas demander à la collectivité publique de les indemniser des fautes commises par les autres participants.

Mais cette décision a une autre portée, dont il ne faut toutefois pas exagérer l’importance. On l’a vu, alors que le « fait » de l’administration engageait sa responsabilité en dehors même d’un bouleversement de l’économie du contrat, le juge exigera désormais « une faute ». Selon le rapporteur public, l’impact de cette précision terminologique est faible. D’une part parce que la notion de « faits » devait déjà s’entendre comme visant une action fautive. Par ailleurs, toute modification unilatérale du contrat ou toute violation dudit contrat doit donner lieu à indemnisation selon une logique différente que celle mise en œuvre pour indemniser les aléas du chantier.

Laurent Marcovici


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