Préférence géographique en marchés publics : prudence !

Publié le 29 janvier 2016 à 18h14 - par

La Cour de justice de l’Union européenne s’inscrit en gardienne rigoureuse de la libre concurrence.

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Pour tout comprendre

Respecter les principes de l’Union

Ce sont bien les textes, tant des traités initiaux que du droit communautaire dérivé, qui imposent le respect des principes de la libre circulation des marchandises et de la liberté d’établissement dans l’Union européenne. Comme le relève le considérant 2 de la directive 2004/18 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services, de ces principes, en découlent d’autres, comme l’égalité de traitement, la non-discrimination, la reconnaissance mutuelle, la proportionnalité et la transparence.

Cette directive impose également le respect de l’accès égal des soumissionnaires et l’interdiction de la création d’obstacles injustifiés à l’ouverture des marchés publics à la concurrence.
Dans cette perspective, il semble clair que la notion de « préférence nationale » est parfaitement incompatible avec les principes issus de l’Union. La Cour de justice vient d’en donner une illustration dans une affaire où ce qui était en cause est ce que l’on pourrait appeler la « préférence géographique ». Un juge espagnol a en effet demandé  à la cour si un marché public pouvait prévoir que seules des entreprises disposant d’un établissement dans une ville pouvait candidater.

Une décision motivée et prudente

A première vue, le critère géographique semblait justifié. Le besoin à satisfaire était celui d’un hôpital public. Pour désencombrer les établissements hospitaliers publics une collaboration avec des hôpitaux privés a été mise en place. Certains services publics de soins médicaux d’appui sont externalisés et assurés par ces établissements privés. Ces établissements privés mettent à la disposition du service public de santé leurs infrastructures et leurs moyens techniques et humains, à savoir, notamment, des infirmiers et des assistants, dans le but de contribuer à l’accomplissement des tâches du système de service public de santé. Les interventions chirurgicales et les autres soins médicaux sont assurés par des chirurgiens relevant du service public de santé, qui se rendent à cet effet dans lesdits établissements privés.

Il pouvait sembler naturel de limiter la possibilité de contracter aux établissements situés dans le ressort géographique de l’hôpital. Mais en l’occurrence, l’appel d’offres imposait au candidat d’avoir son établissement dans la ville. C’est un établissement situé dans une commune limitrophe, mais dans la même agglomération qui contestait la procédure.

La cour censure la procédure (CJUE,  22 octobre 2015, affaire C552/13). Mais elle souligne que le marché nécessitait bien d’assurer la proximité et l’accessibilité de l’établissement hospitalier privé. Ce critère n’est donc pas, par lui-même, irrégulier. Mais la limitation à une commune ne permet pas d’assurer le but que peut régulièrement poursuivre l’institution d’un tel critère.

La solution est donc pertinente, mais ne pose pas une règle générale contraignante. Elle n’interdit pas dans tous les cas qu’un critère géographique soit choisi.

Laurent Marcovici


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