L’autopartage coûte cher aux collectivités

Publié le 24 février 2017 à 17h16 - par

Le nombre d’abonnés au service parisien de voitures partagées Autolib’ augmente constamment. Pourtant, son équilibre économique est difficile à atteindre, la croissance des recettes globales masquant un nombre de trajets en baisse. Une information qui augure mal de la rentabilité de l’autopartage dans les villes moins denses…

L'autopartage coûte cher aux collectivités

Malgré l’augmentation régulière du nombre d’abonnés, le dispositif parisien Autolib’, plus grand service d’autopartage au monde, n’est pas rentable. Pour arriver à cette conclusion, le bureau de recherche 6t a étudié les nombreuses données d’usage figurant dans les rapports d’activité du syndicat mixte Autolib’ Métropole, et les fichiers open data qui fournissent des informations chaque dimanche depuis juin 2014 : nombre de voitures en service, taux d’indisponibilité, nombre de stations et de bornes de charge en service, nombre de trajets réalisés sur différentes durées, nombre d’abonnements d’un an actifs. Acquérir de nouveaux abonnés ne suffit donc pas à garantir la pérennité du service.

Une analyse qui va à l’encontre de celle présentée par Autolib, sur des bases de calcul différentes : les objectifs de rentabilité sont exprimés en nombre d’abonnés, alors que la fréquence d’usage par abonné et le nombre de trajets par voiture diminuent. Car l’augmentation des recettes globales d’Autolib’ (abonnements et trajets réalisés) masque un usage des voitures en baisse, explique 6t. En effet, le nombre de trajets par voiture a diminué de 5,6 % entre 2015 et 2016. Ce sont la densité et la disponibilité des véhicules qui encouragent les usagers à utiliser intensivement le service, alors quasiment sûrs de trouver une voiture à proximité. Mais si la disponibilité diminue, plusieurs recherches infructueuses peuvent les décourager. Donc, plus le nombre d’abonnés par voiture augmente, moins les usagers utilisent le service et plus le nombre de trajets par abonné diminue.

Ainsi, entre septembre et décembre 2014, chaque abonné accomplissait en moyenne 1,4 trajet Autolib’ par semaine ; entre septembre et décembre 2016, ce chiffre descend à environ 0,8 trajet par semaine. Quant au nombre de trajets par voiture et par jour, il stagne et semble même diminuer, passant de 4,5 trajets par jour en moyenne par voiture fin 2014, à 4,4 fin 2015, puis à 4,1 fin 2016.

Des constats qui posent le problème du modèle économique d’Autolib’ pour les villes moins denses que Paris, qui compte davantage d’usagers potentiels à proximité de chaque station et peut ainsi proposer plus de stations et susciter plus de trajets potentiels, encourageant un réflexe Autolib’. Par exemple, trois ans après son lancement, le service lyonnais Bluely enregistrerait moins d’une location par voiture et par jour sur l’année 2016 (4,1 en décembre 2016 pour Autolib’).

6t identifie certaines pistes pour maintenir Autolib’. La subvention par le groupe Bolloré, « difficile à croire ». L’affichage publicitaire sur les voitures, testé sur 10 % du parc depuis octobre 2016, paraît difficile à pérenniser, le stationnement sur la voie publique de véhicules utilisés comme support à la publicité étant interdit. Le financement par la collectivité, qui couvrirait les déficits à l’aide des impôts locaux. Ou encore l’augmentation des tarifs, prévue pour 2017 : pour les abonnés annuels, la location devrait passer de 6 euros à 7 euros la demi-heure.

6t publiera désormais un baromètre mensuel sur l’évolution des usages d’Autolib’.

 

Marie Gasnier

 

Les abonnés, source principale de recettes

En décembre 2014, les abonnés pour un an représentaient 99 % de l’ensemble des abonnés actifs et réalisaient 96,8 % des trajets ; en décembre 2015, près de 99,5 % de l’ensemble des abonnés actifs et 96,7 % des trajets. Selon 6t, la décomposition des recettes montre une part croissante du poids des abonnements : 23 % en 2014, 26 % en 2015 et 27 % en 2016.
Le nombre d’abonnés « un an », par voiture en service, a augmenté régulièrement : 34 en décembre 2016 contre 22 en juin 2014, pour un trajet moyen de 38 minutes.


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