L’Assemblée se penche mercredi sur la déontologie des fonctionnaires

Publié le 6 octobre 2015 à 12h18 - par

Protéger les « lanceurs d’alerte », mieux lutter contre les conflits d’intérêts ou affirmer le respect du principe de laïcité : l’Assemblée examinera à partir de mercredi 7 octobre le projet de loi sur la déontologie des quelque 5 millions de fonctionnaires.

L'Assemblée se penche mercredi sur la déontologie des fonctionnaires

Sans revenir sur les principes fondateurs du statut de fonctionnaire, au centre de récents propos controversés du ministre de l’Économie Emmanuel Macron, le texte complète la loi du 13 juillet 1983. Celle-ci avait défini pour la première fois les traits communs aux agents de la fonction publique (État, Territoriale et Hospitalière).

Il ajoute de nouvelles valeurs comme « le respect du principe de laïcité » ou le fait qu’un fonctionnaire exerce ses fonctions avec « dignité, impartialité, intégrité et probité ».

L’un des objectifs majeurs du projet de loi est aussi de mieux prévenir les conflits d’intérêt. Tout fonctionnaire devra désormais veiller « à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d’intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver ».

Les « lanceurs d’alerte » seront davantage protégés. Le texte stipule qu’aucune mesure concernant par exemple leur rémunération, promotion ou mutation ne puisse être prise s’ils ont relaté des faits « susceptibles d’être qualifiés de conflit d’intérêt », dès lors qu’ils l’ont fait « de bonne foi et après avoir alerté en vain » la hiérarchie. Les agents pourront aussi consulter un « référent déontologue ».

Initialement présenté en juillet 2013, ce projet de loi était resté lettre morte, victime selon la ministre de la Fonction publique Marylise Lebranchu de l’encombrement législatif. Ce texte de 26 articles, complété en commission, est désormais débattu en urgence (un seul examen par chambre).

Pantouflage surveillé

Le texte contient, a fait valoir sa rapporteure Françoise Descamps-Crosnier (PS), des « avancées sociales importantes ». Il prévoit ainsi de renforcer la protection des agents en cas d’agression, étendant cette protection à leurs proches.

Après l’échec récent des négociations sur la rémunération des agents, le gouvernement a aussi saisi l’occasion pour ajouter en commission un amendement qui « vise à faciliter la signature d’accords majoritaires ».

Le projet de loi renforce aussi les pouvoirs de la commission de déontologie, chargée de rendre un avis lorsqu’un agent souhaite exercer dans le privé (le fameux « pantouflage »). Un fonctionnaire qui ne respecterait pas l’avis de la commission s’exposerait désormais à des « poursuites disciplinaires ».

Pour occuper certains postes, définis par une liste établie par décret, des déclarations d’intérêt et de patrimoine devront aussi être transmises.

Pour les déclarations de patrimoine, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) fera un état des lieux lorsque le fonctionnaire quittera son poste. En cas d’anomalie par rapport à la situation initiale, son dossier sera transmis au fisc.

Contre l’avis du gouvernement et de la rapporteure, les députés ont décidé en commission que les déclarations d’intérêts seraient aussi transmises à la HATVP, et non à la commission de déontologie.

Pour la rapporteure, ce sera « sûrement un point de discussion » amené à évoluer dans l’hémicycle. La modification faite par les députés, a-t-elle estimé, peut être liée à une « peur du manque d’efficacité de la commission » et à l’oubli du fait que le  projet de loi lui attribue « beaucoup plus de pouvoirs ».

Mme Descamps-Crosnier s’attend aussi à des débats sur la possibilité pour les agents de cumuler un emploi via le statut d’auto-entrepreneur.

Selon le texte, un fonctionnaire ne peut pas exercer une activité lucrative, sauf cas dérogatoire, comme la demande d’un temps partiel. Pour la rapporteure, ce point devrait être assoupli en séance par un amendement. Avec autant de restrictions, un agent passionné par exemple d’apiculture, qui voudrait vendre son miel pendant ses week-ends, risquerait en effet d’être poussé « à se mettre hors la loi ».

Le projet de loi avait fait l’objet d’un relatif consensus auprès des syndicats de fonctionnaires en 2013. Son examen en première lecture doit s’achever vendredi.

 

Charlotte HILL

 

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