Loi Sauvadet : un bilan en demi-teinte

Publié le 10 novembre 2015 à 16h46 - par

Certains agents éligibles à la titularisation en application du dispositif Sauvadet s’en désintéressent, notamment lorsqu’ils sont confrontés à une perte de revenus.

Loi Sauvadet : un bilan en demi-teinte

Sur la période 2013-2016, la loi du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique (dite loi Sauvadet) doit favoriser l’accès des agents contractuels de la fonction publique au statut de fonctionnaire (titularisation), ainsi que la transformation des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée. Environ 125 000 contractuels (38 500 dans la fonction publique d’État, 43 000 dans la fonction publique territoriale et 44 000 dans la fonction publique hospitalière) étaient susceptibles d’être titularisés, sous réserve de réussir les épreuves de sélection professionnelle.

Le bilan d’application reste très contrasté, en particulier dans la fonction publique territoriale où certaines collectivités n’ont pas encore organisé de recrutements réservés. Le dispositif d’accès aux emplois titulaires sera prorogé jusqu’au 31 mars 2018 par amendement dans le projet de loi déontologie.

Le désintérêt de certains agents pour la titularisation

La population éligible au dispositif Sauvadet est estimée dans la fonction publique territoriale à 43 000 contractuels dont 31 % en catégorie A, 25 % en catégorie B et 42 % en catégorie C. 19 000 titularisations sur 43 000 possibles sont intervenues. Comparés à la répartition hiérarchique des non titulaires de la fonction publique territoriale (11,5 % en A, 15,2 % en B et 65,2 % en C au 31 décembre 2011), ces pourcentages soulignent la grande précarité des agents recrutés sur des postes d’exécution. Les estimations de titularisation sont ainsi peu favorables aux plus précaires dans la fonction publique territoriale.

L’ouverture des recrutements réservés témoigne de la diversité de situation des contractuels, certains refusant la sécurité offerte par la titularisation. La perte de revenu résultant de l’entrée dans les corps et cadres d’emplois constitue la raison principale du désintérêt de certains éligibles mieux rémunérés sous contrat. Tel est le cas d’emplois déterminés à l’hôpital et dans la territoriale, principalement pour les emplois de catégorie A. Pour certains agents, l’exercice des fonctions sous contrat reste plus souple.

Le taux de réussite aux sélections professionnelles dans la fonction publique territoriale est de 83 %. Les sélections professionnelles sont organisées pour leurs agents par les collectivités et établissements qui peuvent, par convention, charger leur centre de gestion (CDG) de cette organisation. La commission d’évaluation professionnelle procède à l’audition des candidats dont le dossier a été déclaré recevable, et se prononce sur leur aptitude à exercer les missions du cadre d’emplois auquel la sélection professionnelle donne accès. L’audition, d’une durée totale de vingt minutes, consiste en un entretien basé sur un dossier remis par le candidat lors de son inscription.

Une application contrastée et des exclusions justifiées

Des exclusions au dispositif se justifient par la nature de l’emploi permanent considéré qui commande une dérogation, par principe, à la règle de l’emploi titulaire. Ces emplois sont logiquement écartés du champ de la transformation automatique du CDD en CDI. Pour la fonction publique territoriale, les exclusions visent les emplois fonctionnels, les fonctions de collaborateur de groupe d’élus et les emplois de cabinet.

Dans le cas des emplois supérieurs des collectivités territoriales, les règles dérogatoires de recrutement à l’emploi permanent s’expliquent par les liens directs avec l’autorité exécutive que leur nature suppose. La loi ou le décret prévoit, pour les deux dernières catégories, que la qualité de collaborateur de groupe d’élus ou de cabinet est incompatible avec l’affectation à un emploi permanent d’une collectivité.

D’après la Direction générale des collectivités locales, l’application de la loi Sauvadet demeure très contrastée dans la territoriale où 32 400 des 43 000 agents éligibles devraient être titularisés d’ici la fin du plan quadriennal, soit 10 000 environ en catégorie A, 9 000 en B et 12 500 en C. Mais certaines collectivités n’ont pas encore organisé de sélection professionnelle. Ainsi, si 75 % des éligibles devaient être titularisés dont 42 % dès la première année du plan, l’objectif n’a pas cependant pas été tenu. Pour les organisations syndicales, la loi du 12 mars facilite l’accès à l’emploi titulaire, cependant proportionnellement moins pour les agents de catégorie C que pour les autres catégories.

Les agents déclarés aptes à l’accès à l’emploi titulaire, à l’issue des sélections professionnelles, l’ont été pour 43 % en catégorie B, 42 % en catégorie A et 15 % en catégorie C. La faible représentation des agents de catégorie C s’explique par le fait que les agents contractuels de ce niveau de catégorie accédant au premier grade des cadres d’emplois de catégorie C n’avaient pas à passer les entretiens de sélection professionnelle. Seul l’accès au second grade de ces cadres d’emplois nécessitait pour les agents de participer aux sélections. La répartition des lauréats par filières concerne respectivement les filières administrative (39 %), technique (20 %), culturelle (14 %), médicosociale (11 %) et sportive (7 %).

Le « stock » de contractuels, conjoncturellement résorbé par le plan de 2012, se reconstitue inéluctablement. Les non titulaires sont indispensables au service public : besoins temporaires, vacances d’emplois, fonctions nouvelles… Il importe donc pour lutter contre la fragilité des contrats d’ajuster au mieux la gestion des ressources humaines afin que le recrutement de non titulaires soit l’ultime recours pour assurer la continuité du service public, faute de fonctionnaire. Le chantier de la clarification et l’harmonisation des cas de recours aux contractuels et la redéfinition des conditions de durée et de renouvellement des contrats demeure de ce fait, plus que jamais d’actualité.

 

Source : Bilan d’étape de la mise en œuvre de la loi du 12 mars 2012 dans la fonction publique de l’État, Ministère de la Décentralisation et de la Fonction publique

 

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