Pourrait-on se passer des DRH ?

Publié le 24 octobre 2016 à 4h00 - par

Apparition de nouveaux métiers, modification des modes de management… Comme dans le privé, les métiers et les collaborateurs du secteur public sont en pleine évolution. S’il ne s’adapte pas pour accompagner la collectivité à absorber ces mutations, le DRH risque de disparaître.

Pourrait-on se passer des DRH ?

Y aura-t-il encore des DRH dans dix ans ? C’est à cette question provocatrice que les intervenants du colloque « Le DRH du futur », organisé par l’association des DRH de grandes collectivités à Paris, le 14 octobre, se sont efforcés de répondre… Car, entre vision stratégique et gestion des ressources au quotidien, la fonction de directeur de ressources humaines (DRH) subit des transformations profondes.

Les missions des collectivités évoluent, à cause du redécoupage territorial notamment, et le DRH doit comprendre et anticiper les enjeux qui en découlent. Les technologies digitales apportent de nombreux changements : apparition et disparition de métiers, organisation en réseaux et en communautés, accès permanent à l’information… L’organisation en silos ne fonctionne plus et la hiérarchie traditionnelle est remise en cause. En outre, l’emploi à vie n’existe plus dans le secteur privé et il pourrait être remis en cause dans le secteur public. Pour Laurent Choain, chief people and communication officer du groupe Mazars, les DRH devront désormais recruter des personnes pour ce qu’elles ont envie de faire et non pour les faire « entrer dans un système ». Ils doivent aussi faire face à l’arrivée d’une génération qui veut travailler autrement, avec de nouvelles aspirations : s’épanouir au travail, être l’objet de respect et de considération ou encore travailler à distance. Laurent Choain estime qu’il faudrait même encourager la mobilité, donner aux agents les moyens de partir « en leur disant que la porte est ouverte », pour qu’ils aient le sentiment que s’ils restent c’est qu’ils ont vraiment envie de rester.

Le DRH doit donc être à la fois capable d’aider la collectivité à mettre en œuvre tous ces changements et à préparer les gestionnaires de demain, tout en continuant d’assurer la gestion sociale et RH (payes…) et en assistant à de multiples réunions chronophages… Un métier qui nécessite presque d’être un « surhomme ».

Anticiper les évolutions

Mais attention, si le DRH s’en tient à ses missions traditionnelles, il sera possible de s’en passer en automatisant et en réorganisant la fonction RH, constate Gilles Verrier, directeur général d’Identité RH. Il faut au contraire qu’il soit capable d’anticiper les évolutions du « monde futur », d’intégrer tous ces nouveaux enjeux, en particulier de gérer « l’employabilité ». Il devra même être prêt à embaucher des gens pour les amener à trouver un meilleur poste ailleurs quelques années plus tard, ce qui est toutefois plus difficile dans la fonction publique que dans le secteur privé. L’idéal serait qu’il consacre davantage de temps à répondre aux grands enjeux, et qu’il optimise et externalise les tâches à faible valeur ajoutée quand c’est possible.

Pour accompagner cette mutation et construire un nouveau système, le DRH doit aider à bâtir le projet d’administration de territoire, en être un des porteurs forts pour identifier de quel accompagnement ont besoin les managers et les agents, déterminer l’optimisation financière adéquate…

Toutefois, le poids du quotidien, les procédures lourdes et les évolutions réglementaires fréquentes sont des freins pour un DRH de collectivité, précise Florence Peleau-Labigne, DGS de Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart. En outre, les attentes des autres cadres sont parfois compliquées et contradictoires : les managers lui demandent de régler tous les problèmes mais estiment qu’il sort de son rôle s’il propose de nouveaux modes de management… Or, le DRH doit être dans une démarche de co-construction, trouver une articulation intelligente collective avec l’ensemble des managers. Mettre en place un dispositif de gestion des ressources humaines présente une dimension stratégique.

 

Martine Courgnaud – Del Ry

 

DRH des territoires

Il est important aussi que le DRH « sorte de sa collectivité », pour devenir le DRH des territoires par exemple. Ainsi, il y a quelques années, l’agglomération de Sénart avait réuni au sein d’un club l’ensemble des DRH, privés (grosses entreprises, PME, start-ups…) et publics, pour partager leurs réflexions sur le marketing RH territorial de la ville nouvelle. Objectif : construire une identité territoriale du bassin de vie qui les distinguait des autres territoires, en partageant des modes de faire et des enjeux territoriaux.