Quelle employabilité pour les cadres seniors de la FPE à l’heure des restructurations ?

GRH

Publié le 16 février 2012 à 0h00 - par

Telle était la problématique du premier colloque organisé ce 14 février à l’ENA par Galilée.sp, association de cadres supérieurs de l’État.

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Un rendez-vous qui s’inscrit dans un contexte particulier, puisque le député du Loir-et-Cher Pascal Brindeau (NC), l’un des intervenants, s’apprête à remettre au ministre de la Fonction publique son rapport sur la gestion des carrières des agents publics, avec pour toile de fond l’année européenne du vieillissement actif.

Denis Stokkink, économiste et président du « think tank européen Pour la solidarité », a d’ailleurs rappelé que la place des seniors n’était pas une problématique franco-française, mais bien commune à l’ensemble de l’Union Européenne. Hors, le taux d’emploi des seniors n’est pas le même que l’on soit à Stockholm ou à Paris : les Suédois emploient ainsi 81 % de leurs seniors, contre 60 % en France, et pour une moyenne européenne de 65 %. « Pourtant à ces âges, on est encore en bonne santé, avec des qualités importantes, une transmission possible. Comment valoriser tout cela ? » interroge-t-il.
 

Prendre en compte l’aspect humain de la RGPP

C’est la principale revendication de Pascal Brindeau, et la principale conclusion de son rapport, selon les propres mots du parlementaire. « Il y a trois écueils à éviter. Considérer que la question de l’employabilité des seniors est une question ciblée, ce qui est faux. Il faut travailler sur la perception des agents seniors qu’ont l’ensemble des générations. (…)

Le second écueil est de considérer qu’il s’agit d’une question technique. C’est une question éminemment politique, car il ne s’agit pas seulement de l’évolution naturelle de la durée de vie, mais aussi des conséquences de la réforme des retraites et de la RGPP (…).

Troisième écueil, considérer que, parce qu’il s’agit de réformes structurelles, ce sont des réformes de long terme. En réalité, c’est une question urgente, car dans les dix années à venir, 33 % des agents vont partir en retraite, ce qui constitue une perte de savoirs et d’intelligence considérable« .

Il a aussi milité pour une gestion globale des ressources humaines de la Fonction publique, « une gestion des ressources et non des carrières », déplorant les cloisonnements entre ses trois versants et à l’intérieur de ceux-ci. « La mobilité est très difficile à mettre en place » a-t-il ajouté.
 

Entretenir la motivation pour retarder l’ « entrée en seniorité »

Un point sur lequel le rejoint Jean-Marc Canon, secrétaire général de l’UGFF-CGT, pour qui « il n’y a pas trois fonctions publiques, mais trois versants de la Fonction publique ». Hors pour la majorité des agents selon lui, la Fonction publique a mal évolué, un constat encore plus partagé chez les agents les plus anciens. « La Fonction publique doit se réformer, mais les réformes ne réussiront que si les agents se sentent les acteurs de celles-ci. Elles doivent inciter à faire appel à l’expérience des cadres seniors. »

Pour Jean-François Verdier, directeur général de l’administration et de la Fonction publique, il s’agit de « retarder au maximum l’âge d’entrée en seniorité. On y entre plus tard lorsqu’on connaît une carrière dynamique et attractive, lorsque celle-ci est valorisée, et si les conditions de travail sont satisfaisantes. Et il y a aussi une dimension culturelle. Il faut lutter contre l’idée que les seniors sont systématiquement moins mobiles, moins compréhensifs, plus vite fatigués, et plus chers ». Il faut donc lutter contre les représentations négatives que peuvent avoir les managers, favoriser la formation de ces derniers, et poser la question du tutorat et du « tutorat inversé ».

Au risque sinon, selon Michèle Kirry, DRH des ministères du Travail, de l’Emploi et de la Santé, des Solidarités et de la Cohésion sociale, et des Sports, d’une vraie « désespérance », d’une « casse humaine », chez les cadres seniors. « Le risque étant que par contagion, cette désespérance touche les plus jeunes, qui vont se demander « mais que va-t-on faire de moi après ? ».

Elle prône ainsi la création d’outils – hors cadres statutaires – permettant une valorisation des parcours de ces agents, et des perspectives d’évolutions professionnelles et salariales via la mobilité.
 

La mobilité comme levier

Un point de vue partagé par Christian Leyrit, vice-président du conseil général de l’environnement et du développement durable, qui a plaidé pour la création d’une bourse des compétences, « vivier » identifiable d’agents en recherche de missions en appui aux entreprises, chambres consulaires, administrations déconcentrées et décentralisées ou aux pays du sud.

Avant d’inviter les cadres dans l’impasse à ne pas hésiter à se tourner vers les fonctions publiques européenne et territoriale, et avant que René Doche, DG adjoint de l’Assemblée permanente des Chambres de Métiers et de l’Artisanat (APCMA) n’insiste sur les besoins criants en expertise des chambres consulaires.
 

La gestion des âges comme axe majeur

Le ministre de la Fonction publique, François Sauvadet, a conclu la journée en affirmant que la fonction publique devait se « réformer et se former. Les métiers évoluent et évolueront, même si la vocation reste la même. La GRH ne peut pas se satisfaire que de l’ancienneté (…), l’expérience, le parcours doivent être mis en avant », plaidant ainsi pour une valorisation de chaque étape de la vie professionnelle et de la mobilité.

Il a enjoint les gestionnaires RH de la Fonction publique à ne pas négliger « la dimension managériale. Les mutations de la société, les mutations technologiques imposent d’accompagner tous ceux qui seront chahutés dans leurs repères. (…) L’apport des seniors ne se limite pas à l’expérience, la GRH doit avoir une importance toute particulière, notamment la GPEC. Il faut un accompagnement des évolutions de carrières. La diversité des âges est toujours trop peu prise en compte dans les politiques managériales, les connaissances statistiques sont perfectibles. C’est un véritable changement culturel auquel nous sommes appelés » a-t-il insisté.

Il a appelé à une généralisation des bonnes pratiques, à l’ouverture à l’expérimentation, à travailler sur l’apprentissage et le tutorat, la VAE, la formation professionnelle, proposant des « postes de respiration » pour les agents les plus soumis à la pénibilité, affirmant enfin « faire de la gestion des âges de la vie un axe majeur de la gestion de la Fonction publique de demain ».


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