Des considérations esthétiques peuvent-elles servir de critère d’attribution ?

Publié le 15 mars 2009 à 0h00, mis à jour le 15 mars 2009 à 0h00 - par

Le pouvoir adjudicateur peut retenir un critère esthétique à la condition d’apporter suffisamment de précisions sur ses attentes. En d’autres termes, les candidats doivent savoir à l’avance la manière dont sera appréciée leur offre, et ce, afin d’éviter à l’acheteur public de bénéficier d’un pouvoir discrétionnaire dans le choix de l’attributaire. C’est ce qu’a affirmé le Conseil d’État dans un arrêt du 5 novembre 2008. Analyse et commentaire d’Olivier Caron et Alexandre Labetoule, avocats.

Des considérations esthétiques peuvent-elles servir de critère d’attribution ?

Faits

La commune de Saint-Nazaire et la communauté d’agglomération de la région nazairienne et de l’estuaire (Carene) avaient lancé une procédure d’appel d’offres pour l’attribution d’un marché de mobilier urbain. La société Decaux Mobilier Urbain, dont l’offre avait été rejetée, a obtenu l’annulation du marché devant le juge des référés précontractuels. Le juge de première instance avait considéré qu’en prévoyant un critère esthétique, la commune de Saint-Nazaire et la Carene avaient entaché la procédure d’irrégularité. Cette ordonnance a été cassée par le Conseil d’État.

Décision

Le pouvoir adjudicateur peut retenir un critère esthétique à la condition d’apporter suffisamment de précisions sur ses attentes. En d’autres termes, les candidats doivent savoir à l’avance la manière dont sera appréciée leur offre, et ce, afin d’éviter à l’acheteur public de bénéficier d’un pouvoir discrétionnaire dans le choix de l’attributaire.

Le conseil de l’avocat

Lorsqu’il entend prévoir un critère esthétique, le  pouvoir adjudicateur doit veiller à rendre le plus objectif possible ce critère éminemment subjectif. Pour ce faire, il lui appartient d’apporter un maximum de précisions sur ses attentes afin d’établir la « règle du jeu » à partir de laquelle seront jugées les offres. Dans l’affaire commentée, le Conseil d’État a jugé que les indications figurant dans le cahier des clauses techniques particulières pouvaient contribuer à encadrer le critère esthétique. Le marché stipulait : « Les mobiliers urbains (…) devront de plus être en cohérence avec l’identité portuaire et maritime de cette dernière et s’inscrire dans le style nazairien alliant exigence fonctionnelle (solidité, résistance, confort d’usage, durabilité, facilité d’entretien et de remplacement) et esthétique. À cet égard, le mobilier retenu devra être d’esprit contemporain, de forme simple et épurée, de préférence en métal et d’une couleur dominante blanche ».

Cela étant, la règle du jeu devra être d’autant plus précise et détaillée que le critère esthétique aura une pondération élevée.

Référence : CE, 5 novembre 2008, Commune de Saint-Nazaire, req. n° 310484, mentionné aux tables du Recueil Lebon

Extrait

« … les indications précitées s’agissant du critère d’attribution relatif à l’esthétique des mobiliers urbains étaient suffisantes pour ne pas conférer en l’espèce au pouvoir adjudicateur une liberté de choix discrétionnaire ; que doit ainsi être écarté le moyen tiré de ce qu’en recourant à un tel critère, la commune de Saint-Nazaire et la Carene n’ont pas garanti le respect de l’égalité de traitement des candidats et la transparence de la procédure. »

Texte officiel : Code de justice administrative (article L. 551-1)


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