Les causes juridiques en marchés publics

Publié le 11 janvier 2016 à 15h16 - par

Connaître la procédure est indispensable pour faire prévaloir ses droits.

contentieux marchés publics

La notion de cause juridique, piège contentieux

La notion de cause juridique en droit administratif, si elle repose sur des fondements théoriques réels, n’en a pas moins une fonction essentiellement opératoire. En d’autres termes, son utilité essentielle consiste à permettre au juge, à l’issue d’un certain délai, de cristalliser le débat contentieux.

Pour autant, ses conséquences sur les droits des requérants sont importantes et une approximation peut conduire au rejet d’une demande pourtant bien fondée. En effet, une fois le recours cristallisé, le requérant ne peut plus invoquer de moyens qui relèverait d’une autre cause juridique que celle à laquelle appartient le ou les moyens déjà invoqués.

C’est peut-être cet effet, assez piégeant, qui conduit le Conseil d’État, en matière contractuelle, à alléger les choses en la matière.

Deux décisions récentes du Conseil d’État sur les causes juridiques en matière contractuelle

Par la première, le Conseil d’État juge que le défendeur devant  le tribunal administratif (souvent l’administration) est soumis à la cristallisation du contentieux devant la cour (CE, 16 décembre 2015, n° 373509, société Ruiz). Mais il faut distinguer. Si le défendeur de première instance est appelant, il peut invoquer tous moyens, mais la demande est cristallisée après l’expiration du délai d’appel. En revanche si le défendeur de première instance est intimé en appel, « il est recevable à invoquer tout moyen pour la première fois, en défense comme à l’appui de conclusions d’appel incident, lesquelles ne doivent pas présenter à juger un litige distinct de l’appel principal ». Le critère d’exclusion est donc la notion de litige distinct. En l’occurrence, le Conseil d’État juge le moyen tiré du caractère forfaitaire du marché, et le moyen tiré de la méconnaissance du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux n’étaient pas distincts, dès lors qu’il s’agit dans les deux cas de l’exécution du contrat.

Par la seconde, le Conseil d’État va plus loin dans la construction jurisprudentielle (CE, 23 décembre 2015, n° 376527, Commune de Montereau-Fault-Yonne). Il s’agissait d’un litige entre une personne publique et son assureur. Devant le tribunal, la personne publique invoquait la violation d’un texte réglementaire. Devant  la cour, elle a invoqué une stipulation du contrat. Pour juger que les deux moyens figuraient dans la même cause juridique, le Conseil d’État juge que la règle issue du texte réglementaire aurait dû figurer dans le contrat. Selon le Conseil : « Lorsqu’une disposition impose de faire figurer certaines clauses dans des contrats, l’action d’une victime tendant à la réparation des préjudices résultant de la violation d’une clause figurant dans le contrat en application de cette disposition et son action tendant à la réparation des préjudices résultant de la méconnaissance de garanties que le contrat était réputé comporter en vertu de cette disposition tendent toutes deux à mettre en jeu la responsabilité contractuelle de son cocontractant. Elles procèdent donc d’une même cause juridique. »

La procédure administrative contentieuse n’a pas fini de délivrer tous ses secrets.

Laurent Marcovici


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