Une révolution, oui, mais prudente et mesurée

Publié le 11 décembre 2013 à 0h00 - par

En juin 2012, le groupe de travail du Conseil d’État animé par le président Martin a rendu son rapport sur la rédaction des décisions du juge administratif. Objectif : rendre plus accessible la lecture des décisions des juridictions.

La phase d’expérimentation est toujours en cours

Plusieurs moyens sont suggérés : abandon de la phrase unique, précédée d’un « considérant », et comportant de nombreuses subordonnées, séparées par des points virgules. Le style serait désormais direct, comme le sont déjà actuellement les réponses aux demandes d’avis des juridictions subordonnées. Il est aussi envisagé de rappeler dans le corps des décisions, celles des décisions de principe dont il est fait application, en donnant leurs références exactes. Certaines corrections typographiques sont également prévues afin de toiletter la forme des décisions.

Certaines décisions sont d’ores et déjà rédigées selon la nouvelle manière. Sans parler de certaines juridictions subordonnées, qui se sont crues, peut-être à tort, autorisées à modifier dès maintenant leur manière de faire, certaines décisions du Conseil d’État commencent à expérimenter la nouvelle rédaction. Mais l’expérimentation n’est pas encore la généralisation.

Une démarche extrêmement prudente

Ce n’est pas à la légère que l’on envisage de rompre avec une manière de rédiger bicentenaire. Certes, l’objectif d’accroissement de la clarté des décisions, et également bien entendu, d’accessibilité au droit, sont louables. Par ailleurs, d’autres juridictions, à fort impact national, comme la Cour de justice de l’Union européenne, ou la Cour européenne des droits de l’homme ont montré la voie, en rédigeant de manière relativement claire et explicative. 

Mais il est également clair qu’une des qualités de la règle de droit, ou en tout cas des interprétations juridictionnelles, est la stabilité. De ce point de vue, la nouvelle manière de rédiger ne doit en aucun cas marquer une discontinuité dans la manière de voir et d’interpréter le droit. C’est vraisemblablement pour cette raison que le Conseil d’État, en la matière, se hâte aussi lentement.

Au départ, seules les ordonnances de certaines sous-sections sont rédigées selon la nouvelle manière, puis, les décisions de ces sous-sections lorsqu’elles jugent seules. Les décisions du président de la section du contentieux en matière d’aide juridictionnelle le sont également. À l’heure actuelle donc, le Conseil d’État ne semble désireux ni d’étendre dans l’immédiat aux décisions plus visibles de la juridiction suprême ni, semble-t-il, d’étendre l’expérimentation aux tribunaux et aux cours administratives d’appel.

Les innovations sont donc en cours de mise en œuvre, mais le Conseil d’État a jugé utile de réaliser un bilan de l’expérimentation, bilan qui devrait vraisemblablement intervenir à la fin de l’année 2013.

La réforme est en bonne voie et verra le jour, à coup sûr. Mais ce sera en toute connaissance de cause, et avec précaution.

Laurent Marcovici


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