Le premier plan de lutte contre les violences faites aux enfants dévoilé mercredi

Publié le 27 février 2017 à 12h53 - par

Mieux repérer un phénomène de l’ombre largement sous-estimé : le gouvernement va présenter mercredi 1er mars une série de mesures pour tenter d’enrayer la maltraitance des enfants, l’un des derniers plans sociétaux d’ampleur avant la fin du quinquennat.

protection de l'enfant

Le plan interministériel « de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants » sera dévoilé par la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, Laurence Rossignol. Conçu sur trois ans (2017-2019) et sur le modèle des plans mis en place depuis 2005 pour lutter contre les violences faites aux femmes, il est le premier du genre.

À deux mois de la fin du quinquennat, l’objectif est « de susciter une prise de conscience et diffuser des solutions pour faire reculer toutes les formes de violences au sein de la famille (physiques, psychologiques, sexuelles et négligences) », indique le ministère. « Les violences faites aux femmes sont progressivement sorties de l’indicible et de l’invisible », ce qui n’est pas le cas des violences à l’égard des enfants, regrettait en janvier la ministre. « Elles ne viennent nous bouleverser que de manière sporadique, lorsqu’un drame se produit ».

Depuis le début de l’année, les cas de neuf enfants ayant trouvé la mort suite à des violences infligées par leurs parents ou beaux-parents ont été relayés dans les médias, selon un décompte de l’AFP. Mais les histoires tragiques de Kenzo, 21 mois, qui a succombé à des coups répétés, ou Yanis, garçonnet de 5 ans qui a trouvé la mort après une punition pour avoir fait pipi au lit, ne sont que « l’arbre qui cache la forêt », dit à l’AFP la pédiatre Anne Tursz, directrice de recherche à l’Inserm.

« Le côté extrême de ces faits divers est contre-productif car ils sont à la fois représentatif du pire et pas représentatif d’un problème de société de grande ampleur, largement sous-estimé », explique-t-elle.

L’être « le plus vulnérable »

La maltraitance des enfants, qui touche tous les milieux, manque de statistiques officielles. En 2006, l’Observatoire national de l’enfance en danger recensait 77 500 cas connus d’enfants de moins de 15 ans en danger.

Une étude menée sur la période 1996-2000 par Mme Tursz estimait à 255 les homicides d’enfants de moins d’un an chaque année, contre 17 selon les statistiques officielles. Ainsi, la mise en place d’une collecte annuelle de données fiables et des mesures pour mieux détecter les phénomènes du « bébé secoué » devraient faire partie des actions proposées par le gouvernement.

La prévention aura également une place centrale dans ce plan, qui viendra en complément de la loi sur la protection de l’enfant du 14 mars 2016 et de la feuille de route de juin 2015. « Le rôle du secteur médical, par lequel passent tous les enfants, est primordial tant sur la prévention que sur la prise en charge », insiste Anne Tursz, demandant la création d’un « référent maltraitance » en milieu médical sur lequel les médecins pourraient se reposer. Le « déni » des professionnels est très important, juge la pédiatre, rappelant que la Haute autorité de santé a formulé en 2014 des recommandations pour aider les médecins à mieux détecter et signaler les cas de maltraitance d’enfants.

« C’est l’être le plus vulnérable qui existe », précise à l’AFP Martine Brousse, présidente de la Voix de l’enfant, qui alerte sur le fait que « l’enfant ne doit pas être placé au même niveau que la femme » car il « n’est pas un adulte, n’a aucun moyen de défense ».

L’association lancera début mars une campagne de communication, avec la voix de l’acteur Bruno Solo, pour mieux faire connaître le 119, numéro national et gratuit pour l’enfance en danger. « Libérons la parole. Quand il s’agit des enfants, occupons-nous de ce qui ne nous regarde pas », poursuit-elle.

Le plan traitera aussi de l’accès des mineurs à la pornographie ou des conséquences des punitions corporelles sur les enfants. En janvier, une disposition symbolique de la loi Égalité et citoyenneté concernant le refus des violences corporelles des parents envers les enfants a été censurée par le Conseil constitutionnel.

par Jessica LOPEZ/Copyright © AFP : « Tous droits de reproduction et de représentation réservés ». © Agence France-Presse 2017