Quelles marges de manœuvre dans la gestion des ressources humaines?

Publié le 17 octobre 2013 à 0h00 - par

Les dépenses de personnels s’élèvent à 53 milliards d’euros dont 33,2 pour les communes*. Elles représentent globalement un tiers des dépenses de fonctionnement. Ceci traduit bien l’enjeu des RH pour les collectivités sachant qu’aujourd’hui, ces dépenses sont souvent « la variable d’ajustement ». Il convient donc de connaitre les facteurs d’évolution de ces dépenses afin de mettre en place les moyens pour agir et identifier concrètement les marges de manœuvre.

Pour tout comprendre

Jean-François Lemmet

Les facteurs d’évolution des dépenses RH concernent tout d’abord les dépenses réglementaires qui s’imposent à chaque collectivité et qui sont décidées par l’État : la valeur du point indiciaire, la revalorisation catégorielle de certains indices et les mesures statutaires concernant les cadres d’emplois… Pour ce type de dépenses, il y a compétence liée et donc pas de marge de manœuvre.

Viennent ensuite les dépenses liées à la structure de la population salariée dans la collectivité. Cela se traduit au niveau du glissement vieillesse technicité (GVT) qui prend en compte l’avancement d’échelon, de grade et la promotion interne, du supplément familial de traitement (SFT) qui dépend de la situation familiale des agents, et bien évidemment l’impact de l’absentéisme sous toutes ses formes. Pour ces éléments propres à chaque collectivité, il peut y avoir des marges de manœuvre possibles.

Quant aux dépenses liées à la politique RH, elles concernent le recrutement, avec notamment le remplacement ou non des départs, la prévention contre l’absentéisme pour maladie ordinaire et les accidents de travail, le développement de l’employabilité des agents grâce à la formation, aux reclassements, et à la mobilité. Elle est liée également à la politique suivie par la collectivité : externalisation ou internalisation, transferts d’activité à des EPCI, nouvelles prestations pour la population…

Les moyens d’agir s’inscrivent dans une stratégie avec des outils à développer et une volonté politique. Trois axes peuvent être privilégiés :

– Le premier consiste à intégrer la gestion des RH dans la stratégie globale de la collectivité, à savoir : exploiter  les bilans sociaux, réintégrer les RH dans les études d’impacts préalables des différents projets notamment en investissement, avoir une vision prospective des besoins et éviter de raisonner dans l’immédiateté, éclairer et orienter la maîtrise budgétaire en mettant en place une « MAP » au niveau local et enfin raisonner avec une approche pluriannuelle car il faut du recul, du temps pour obtenir des résultats.

– Le deuxième axe est la mise en place d’une GPEEC fondée sur les compétences et la maîtrise des effectifs. Il s’agit de professionnaliser le recrutement, développer la mobilité avec le parcours individualisé de l’agent et anticiper les évolutions des métiers.

– Le troisième axe se traduit par la modernisation des services (dématérialisation, informatisation) et la mutualisation des moyens en interne ou en externe grâce à l’intercommunalité.

Des opérations concrètes permettent d’agir par rapport à la composante de la population salariée au niveau du GVT. La durée des échelons mini et maxi est du ressort de la collectivité, les ratios d’avancement sont votés par l’assemblée délibérante ; il existe donc une vraie marge de manœuvre avec la possibilité de tenir compte du pyramidage dans les cadres d’emplois.

Enfin pour la promotion interne, la collectivité a toute latitude pour faire ou non des propositions. Quant au régime indemnitaire, elle dispose d’une réelle liberté pour définir les montants et modalités à l’intérieur de bornes déterminées par l’État.

Concernant la politique RH, le recrutement constitue de toute évidence une marge de manœuvre importante avec le remplacement ou non de tous les départs, le  remplacement à l’identique, l’effet noria lié au recrutement de jeunes en remplacement de personnels confirmés partant en retraite… Quant aux besoins temporaires ou saisonniers, il y a possibilité de déterminer des priorités à l’intérieur d’une enveloppe budgétaire figée.

L’action sur l’absentéisme est également essentielle sachant que la moyenne est de 10 jours d’arrêt par an et par agent pour maladie ordinaire. Il est utile de traduire cette situation en postes budgétaires « neutralisés » permettant une réelle prise de conscience et donc la nécessité de définir une vraie politique de prévention.

L’employabilité des agents est aussi un sujet important : mettre en place un dispositif de reclassement permet d’éviter les sureffectifs dans les services liés aux agents en difficulté, notamment dans les métiers reconnus pour leur pénibilité.

Des leviers d’action existent. Ils sont nombreux et pas forcément spectaculaires, mais au final ils peuvent permettre de limiter ou diminuer les dépenses de personnel. Cela nécessite une volonté politique et il s’agit d’être clair sur le plan du dialogue social.

La démarche s’effectue sur plusieurs exercices budgétaires ; il convient de refuser un certain fatalisme et de rechercher en permanence le meilleur service au meilleur coût pour la population.

Jean-François Lemmet

*Source : Observatoire des finances locales. Documentation française, tableau p. 52 de l’état des lieux 2012