La fonction publique, source de bien-être au travail?

Publié le 6 décembre 2016 à 9h00 - par

Tout employeur a l’obligation de veiller au bien-être des travailleurs. Pour autant, les managers publics n’ont pas toujours la formation ou les leviers nécessaires pour garantir aux agents ce bien-être, qui a des impacts sur leur motivation, leur efficacité et leur productivité.

La fonction publique, source de bien-être au travail?

Restructurations, réorganisation, responsabilisation des agents, transformation digitale… De multiples facteurs pèsent sur les conditions de travail, sur lesquels le manager public n’a pas toujours les moyens d’agir ou pour lesquels il n’est pas toujours formé. Or, les conditions de travail et les méthodes de management ont des conséquences importantes sur le bien-être et donc sur la santé des collaborateurs. À cet égard, le Code du travail rappelle que tout employeur doit prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (article L. 4121-1).

Quatre critères définissent le bien-être au travail, a rappelé Victor Waknine, du cabinet Mozart Consulting, lors d’une conférence sur la compatibilité entre le management public et le bien-être au travail, organisée le 18 novembre à Paris par les mutuelles du pôle Fonctions publiques d’AG2R La Mondiale. L’employé doit être utile, disposer d’un certain degré d’autonomie, être compétent et avoir un sentiment d’appartenance. Des critères intégrés, « par nature », à la fonction publique, selon Victor Waknine qui considère que les agents publics sont « porteurs d’une mission, de valeurs de bien-être au travail ». Ce sont ces critères qui motivent, qui donnent l’envie d’aller travailler. Toutefois, certains DRH peuvent manquer d’une ambition d’agir pour le bien-être au travail, partagée par la direction générale et les élus. Le cabinet Mozart Consulting propose une méthode de calcul de l’indice du bien-être au travail (IBET), signal d’alerte qui permet à la collectivité de localiser les désengagements de ses agents (absentéisme notamment), et de trouver des solutions de prévention objectives.

En effet, il faut en finir avec les idées reçues sur l’absentéisme des agents, estime Jean-François Verdier, inspecteur général des finances, ancien directeur général de l’administration et de la fonction publique. Il peut révéler des problèmes moraux ou une souffrance qui ne sont pas liés à la santé mais à la motivation. Ainsi, dans la fonction publique hospitalière (FPH), les agents jouissent d’une très bonne image – en particulier les infirmières – mais l’hôpital public est très critiqué par les responsables politiques, qui mettent l’accent sur l’ambulatoire et la médecine privée, selon Pierre Dewite, directeur général du CHU de Poitiers, président de la conférence des directeurs généraux de CHU. Ce dénigrement apporte un sentiment de dévalorisation contraire à la motivation. En outre, le rôle des infirmières est devenu beaucoup plus normalisé et beaucoup plus contrôlé. Le dialogue, insuffisant, a été remplacé par les mails.

Éric Faure, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, explique que ce sont les coups durs qui motivent les sapeurs-pompiers et sont bénéfiques à la vie collective. Formés pour être opérationnels en cas de catastrophes, ils sont la plupart du temps cantonnés à des tâches routinières et vivent un décalage total entre la vie de la caserne et le terrain. Au-delà de l’action des managers, le sport, la solidarité et le lien social créé par l’association amicale de la caserne permettent de prendre en compte leur bien-être.

Sensibiliser les managers

Dans la fonction publique territoriale (FPT), l’organisation du travail diffère selon le type et la taille d’une collectivité et le management qu’ils induisent. En outre, la  baisse des ressources, associée aux restructurations permanentes, ont des effets durables sur les finances et les ressources humaines (RH). C’est l’avis de Jean-Robert Massimi, directeur général du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), qui estime que les élus mettent alors les RH au centre des stratégies et des enjeux. Pour l’agent, la vie professionnelle devient beaucoup plus imprévisible : lieu, conditions de travail…

Certains leviers ont permis de sensibiliser une partie des managers : document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP), plans de qualité de la vie au travail, démarches de responsabilité sociétale des entreprises (RSE)… Par ailleurs, dans les actions de formation initiale ou continue des managers, des cas pratiques abordent le management et la notion de bien-être. Mais il faudrait aussi apprendre aux jurys de concours à repérer lors des oraux des « apprentis dictateurs » qu’il convient d’éviter de recruter, constate Jean-François Verdier. À l’inverse, lors des entretiens d’évaluation, il serait bon de distinguer les cadres qui sont particulièrement soucieux du bien-être des agents.

Dans la FPH, les managers ne sont pas suffisamment formés pour encadrer les agents, déplore Pierre Dewite. Les médecins sont les managers de l’hôpital, une fonction qu’ils assument en plus de leurs compétences médicales. Et « un aide-soignant qui ne possède pas le bac peut devenir directeur d’un établissement de soins en 25 ans »…
 

Martine Courgnaud – Del Ry

 

Prévention de la santé au travail : l’inégalité entre les secteurs public et privé

La charte des droits fondamentaux de l’Union européenne rappelle que « tout travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité ». En 2013, un accord interprofessionnel sur la qualité de vie au travail au sens large a été signé pour le secteur privé ; il est complété par des accords d’entreprise. Dans la fonction publique, seule la prévention des risques psychosociaux est prise en compte, par un protocole d’accord signé par huit organisations syndicales le 22 octobre 2013.


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