Le droit au reclassement n’est plus adapté aux évolutions de la Fonction publique

Publié le 19 octobre 2016 à 12h26 - par

La direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) organisait, le 19 septembre 2016, un groupe de travail consacré au droit au reclassement pour raison de santé. Il y a été acté que ce droit n’est plus adapté aux évolutions de la fonction publique. Des mesures correctives doivent être prises au plus vite sous peine d’une nouvelle dégradation de l’état de santé des agents à reclasser.

Le droit au reclassement n'est plus adapté aux évolutions de la fonction publique

Construit dans les années 1980 dans un contexte de développement de l’emploi public, le droit au reclassement ne paraît aujourd’hui plus adapté selon un rapport* de  l’IGAS et l’IGA, remis au ministre de la Fonction publique en décembre 2011. Le ministère de la Fonction publique veut de ce fait harmoniser les pratiques du reclassement des agents dans les trois versants de la Fonction publique (Territoriale, État et Hospitalière).

Le droit au reclassement garantit au fonctionnaire le maintien de son statut d’agent public. Les agents devenus inaptes physiquement à la suite d’un accident ou d’une maladie et qui ne peuvent plus exercer, au moins temporairement, les fonctions correspondant à leur grade, même après aménagement de leurs conditions de travail peuvent être reclassés. Ce principe de reclassement ne concerne pas seulement les fonctionnaires titulaires mais également les fonctionnaires stagiaires et les agents non titulaires puisque le reclassement pour inaptitude physique des salariés est posé comme un principe général du droit.

La nécessaire harmonisation du champ du reclassement entre les trois versants de la Fonction publique

Le statut des fonctionnaires prévoit des mesures de reclassement pour les agents reconnus définitivement inaptes à l’exercice de leurs fonctions. Ces reclassements ne sont envisageables que chez l’employeur pour lequel ils travaillent. Le droit au reclassement ne paraît plus adapté, aujourd’hui, pour répondre aux évolutions de la fonction publique, marquée par un nombre toujours élevé d’accidents de travail et de maladies professionnelles, la prolongation de la vie professionnelle, une réduction des recrutements, la prise en compte de nouveaux risques ou encore le vieillissement de la population.

Par ailleurs, la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a fait seulement évoluer la procédure de reclassement pour les salariés du secteur privé. Tous les fonctionnaires déclarés inaptes pour raisons de santé doivent pouvoir être reclassés dans un autre corps ou dans un autre grade de leur cadre d’emplois. Mais cette possibilité de reclassement n’est pas encore offerte aux agents de la fonction publique d’État.

Le champ du reclassement n’est ainsi pas identique entre les trois versants de la Fonction publique. Dans la fonction publique hospitalière et la fonction publique territoriale, un agent peut être reclassé dans un emploi d’un autre cadre d’emplois ou corps par intégration dans un autre grade du même cadre d’emplois, emploi ou corps. Dans la fonction publique de l’État, le reclassement est effectué dans un emploi d’un autre corps. Désormais, il est aussi proposé de permettre dans la fonction publique de l’État de reclasser par changement de grade au sein du même corps.

Des pistes d’action pour mieux accompagner les reclassements encore trop théoriques

La mise en œuvre d’une procédure de reclassement pour inaptitude physique n’est pas encadrée par un délai dans la fonction publique territoriale et dans la fonction publique hospitalière. Il faut s’orienter vers une recherche de poste de reclassement dans un délai encadré. L’obligation de reclassement nécessite l’appréhension de deux étapes (souvent mal appréhendées) dans un délai raisonnable : la recherche des postes éventuellement aménagés pouvant être compatibles avec l’aptitude de l’agent, et l’identification et l’analyse des vacances d’emploi prévisibles au sein des services. La collectivité, qui, six mois après le constat médical d’inaptitude d’un agent, se contente d’une simple recherche de poste, ne satisfait pas à son obligation de reclassement.

Les employeurs publics se doivent de mieux accompagner les agents en situation de reclassement pour inaptitude physique. L’agent, devenu inapte à occuper son poste, doit pouvoir se voir confier l’exercice de nouvelles fonctions et être accompagné pour l’acquisition de nouvelles compétences. Il faut favoriser le développement d’équipes en mode projet pour accompagner les agents en situation de reclassement. Une équipe interdisciplinaire « en mode projet » doit être créée pour accompagner au cas par cas l’agent à reclasser vers un nouveau projet professionnel.

Malheureusement dans la fonction publique territoriale et contrairement aux autres fonctions publiques, les fonctionnaires en situation de reclassement ne peuvent pas encore bénéficier de périodes de professionnalisation d’une durée maximale de six mois comportant une activité de service et des actions de formation en alternance. Cela n’aide pas au bon accompagnement des situations. Malgré tout et afin de prévenir les phénomènes d’usure professionnelle, des employeurs publics mettent en place des dispositifs de reconversion professionnelle intégrés dans le déroulement de carrière.

Le reclassement, à titre expérimental, au niveau d’un bassin d’emploi est également envisagé par le ministère de la Fonction publique. Mais à ce stade, toutes ces propositions d’amélioration des processus de reclassement restent encore trop théoriques à un moment où le nombre d’agents à reclasser augmente. L’enjeu est d’importance, les obligations juridiques doivent s’adapter rapidement à la réalité de gestion.

 

* Source : Évaluation du dispositif de reclassement des fonctionnaires déclarés inaptes à l’exercice de leurs fonctions pour des raisons de santé, rapport de l’IGAS et de l’IGA, décembre 2011