Améliorer la lutte contre l’usage des substances illicites

Publié le 9 décembre 2014 à 0h00 - par

Un rapport parlementaire du 20 novembre 2014, co-signé par deux députés membres du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, évalue la politique de la lutte contre l’usage de substances illicites dont le cannabis et introduit 12 propositions.

Améliorer la lutte contre l'usage des substances illicites

Constats de la consommation des substances illicites

Sur le cannabis, la France est en tête de l’expérimentation et de consommation en Europe, quelle que soit la tranche d’âge analysée. Néanmoins, l’usage régulier est en baisse entre 2002 et 2011 chez les jeunes de 17 ans (de 12 % à 7 %) ainsi que chez les jeunes adultes de 15 à 34 ans (de 20 % à 18 %).

Les autres drogues classiques telles que poppers, cocaïne, champignons hallucingènes, ectasy ou MDMA (méthylène-dioxy-methamphétamine), autres amphétamines, héroïne, crack sont peu usitées mais avec une hausse pour l’héroïne et la cocaïne.

Les nouvelles drogues de synthèse (NDS) sont en pleine expansion. 60 nouvelles substances ont circulé en France au moins une fois entre 2008 et 2012. 350 substances sont surveillées en Europe. Ces NDS imitent les effets des autres drogues avec une composition moléculaire suffisamment différente pour ne pas tomber sous le coup de la loi. Elles sont relativement simples à fabriquer et sont vendues sur Internet ou dans des « smart shops » de certains pays européens sous l’appellation de « sels de bains » ou de « stimulants sexuels ».

Les moyens de lutte contre l’usage des substances illicites

De nombreux départements ministériels sont impliqués dans cette lutte. Ils sont coordonnés par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) placée sous l’autorité du Premier ministre. Une trentaine de collaborateurs travaillent à la Mildeca mais son budget est divisé par deux entre 2009 et 2017 (18,5 millions d’euros en 2014) et son action territoriale est jugée insuffisante dans le rapport parlementaire.

Environ 2 milliards d’euros (soit 0,1 % du PIB) sont consacrés à la politique de lutte contre l’usage des substances illicites, soit 850 millions d’euros pour l’application de la loi, 830 millions d’euros pour les soins, 300 millions d’euros pour la prévention. Ces moyens en masse sont comparables à l’effort consenti par les autres pays européens.

Les propositions sur les moyens de prévention des plus jeunes

Les lieux d’intervention de cette prévention sont les collèges et les lycées, mais aucun recensement des mesures réglementaires obligatoires n’y est effectué. Les formateurs sont de deux ordres : policiers formateurs anti-drogue (PFAD) et gendarmes formateurs relais anti-drogue (FRAD). Il est proposé d’unifier les interventions de ces deux corps sous l’égide de la Mildeca et de regrouper les formations sous l’égide de l’Institut de formation de la police nationale en rationalisant leur contenu et la procédure de dispensation.

Les propositions sur les moyens au niveau des soins

Les lieux de soins sont de deux ordres :

  • les Centres de Soins d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie en ambulatoire (CSAPA) qui opèrent la prise en charge médicale et psychologique des patients, la prescription et le suivi des traitements médicamenteux ;
  • les Centres d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction de risques pour Usagers de Drogues (CAARUD) qui proposent l’accueil gratuit, anonyme et inconditionnel d’usagers de substances psychotropes.

Ces deux organismes sont très inégalement représentés sur le territoire. Une des propositions majeures est de développer des réseaux addictions chargés de coordonner les différents acteurs.

Les propositions sur les moyens de réduction des risques

La nécessité de renforcer le contrôle des traitements de substitution aux opiacés (TSO) est mise en avant : méthadone et Subutex (buprénorphine haut dosage) ont été distribués à 50 000 et 97 000 bénéficiaires respectivement en 2013. Les TSO sont remboursés par la CNAM et pour lutter contre les trafics, il est proposé d’instaurer une prescription électronique (e-prescription) et de renforcer les ordonnances sécurisées.

Plusieurs moyens nouveaux sont envisagés pour développer les programmes d’échanges de seringues (PES) dont la gratuité en pharmacie est envisagée. Il serait également demandé une plus grande implication des pharmacies pour récupérer le matériel usagé (6 000 pharmacies sur 11 000 sont actuellement volontaires dans cette action). Enfin, le PES serait intégré à la prison où il n’existe pas mais où le risque de VIH est six fois plus élevé que dans la population générale.

Sur l‘utilisation des salles de consommation à moindre risque, les avis sont divergents selon les deux rapporteurs.

Les propositions sur les conséquences judiciaires

Les interpellations pour usage illicite de stupéfiants ont été multipliées par 80 en 40 ans et touchent l’intégralité du territoire, zones urbaines ou rurales. En 2010, plus de 9 procédures sur 10 concernaient des consommateurs de cannabis, premier produit en cause dans les interpellations pour usage de substances illicites.

Les réponses pénales sont très disparates d’un tribunal à l’autre, notamment sur la question de l’usage personnel du cannabis (de 20 à 50 grammes). Il est proposé de revoir la loi de 1970 sur la pénalisation de l’usage individuel du cannabis avec trois options :

  • contravention judiciaire de 3e classe d’un montant maximal de 450 €,
  • contravention forfaitaire type infraction sécurité routière,
  • légalisation totale ou restreinte à l’espace privé avec l’institution d’une offre règlementée du produit sous le contrôle de l’État.

Ce rapport a le grand mérite d’éclairer le débat. Aux parlementaires ou au gouvernement de reprendre celui-ci, la situation actuelle semblant difficilement tenable tant en termes de résultats que de dépenses publiques.

DT.

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Drogues, usages et soins


Objectifs :

Comprendre un phénomène qui dépasse le cadre de la protection de l’enfance

  • Faire le point sur la nature et les usages des drogues actuelles
  • Connaître l’état de la législation en la matière et les principaux dispositifs de soins
  • Dépasser le seul discours de prévention afin de s’adapter à la réalité des modes de consommation
  • Faire le lien avec les comportements liés à la consommation de substances légales
  • Appréhender diverses expérimentations d’accompagnement thérapeutique

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