Check-up santé des candidats à la présidentielle: Marine Le Pen, François Bayrou et Jean-Luc Mélenchon

Publié le 1 février 2012 à 0h00 - par

Front National, MODEM, Front de Gauche, tous trois n’ont de cesse de dénoncer l’omnipotence du PS et de l’UMP. Centristes mis à part, pour lesquels la réflexion peine encore à se démarquer, les deux extrêmes se posent en complète opposition avec la politique santé menée durant ce quinquennat.

Marine Le Pen, Front national (FN)

Au Front National, Marine Le Pen porte un regard nettement critique sur la régionalisation de la santé renforcée par la loi HPST, la protection sociale devant rester « un devoir régalien », comme le sous-tend Joëlle Mélin, en charge de la thématique au sein de l’équipe de campagne. Au contraire des Autorités régionales de santé (ARS), l’échelon régional doit se restreindre au rôle d’observatoire et non de dispensation de la régionalisation des soins. Par ailleurs, la loi HPST a également consacré la toute puissance de l’hôpital sur le monde ambulatoire, estime le FN, aboutissant à « une planification assez dangereuse de la médecine de ville ». Très favorable à l’essor des fondations et opposée a priori aux fermetures de petits établissements sur critère de confort ou critère arbitraire, Joëlle Mélin promeut un système mixte de tarification, accusant celle à l’activité (T2A) de ne prôner que la quantité et un recrutement aveugle uniquement centré sur l’hôpital. L’intéressé évoque aussi « une reprise en main médico-administrative » du secteur hospitalier. Par ailleurs, Marine Le Pen entend supprimer tout remboursement des interruptions volontaires de grossesse (IVG), stopper la révision générale des politiques publiques (RGPP) et porter l’accent sur « le sens de l’État et le patriotisme » dans le cycle de formation de tous les fonctionnaires.

Pour pallier la désertification médicale, le Front national souhaite « lever momentanément » le numerus clausus durant sept ans, en ramenant au passage la durée normale du cursus de 10 à 7 ans et fermant progressivement le recours aux Praticiens hospitaliers à diplôme hors Union européenne (PADHUE) ou internes à l’UE, « qui présentent souvent l’absence d’un national apte ». Au passage, « un stage territorial » serait systématisé pour offrir aux étudiants « une découverte concrète » des territoires de santé. Le FN évoque également un plafonnement des dépassements d’honoraires en secteur 2, après concertation avec les organisations syndicales, un gel du forfait hospitalier et des taxes sur les mutuelles. Quant à la dépendance, perçue comme « priorité des priorités », la réforme devra pousser au maintien à domicile. Le financement du suivi et de l’accompagnement des malades et familles sera assuré par suppression de l’aide médicale d’État (AME). Enfin, les médicaments anti-Alzheimer, « même imparfaits », ne seront pas déremboursés, quand bien même Marine Le Pen évoque un examen « avec beaucoup plus de discernement des médicaments réellement efficaces et inefficaces ».

François Bayrou, Mouvement Démocrate (MODEM)

En cette fin janvier, guère de précisions en ligne sur le programme santé du candidat du MODEM, François Bayrou. Des grandes lignes se dessinent toutefois dans les propos de Geneviève Darrieussecq, en charge de la thématique dans son équipe de campagne. Deux urgences sont ainsi à mettre en œuvre. D’une part, la démographie médicale, avec une révision de la formation des médecins, une incitation à poursuivre en médecine générale et une modification des règles de l’internat, afin que celui-ci devienne interrégional avec une obligation de rester dans la région formatrice pour les futurs médecins. Deuxième urgence, le premier recours et la désertification rurale et urbaine. Les incitations aux Maisons de santé pluri-professionnelles (MSP) demeurent aujourd’hui trop « complexes » et nécessitent davantage de « souplesse », tout comme leur format juridique : accompagnement administratif, rémunération mêlant paiement à l’acte et forfaitisation…

Sur les dépassements d’honoraires, peu de précision à retenir, sinon celle de « trouver un juste milieu » entre une situation contractée chez les spécialistes et l’insuffisance du montant des honoraires des généralistes. Par ailleurs, si les ARS ont le mérite d’exister, leur fonctionnement nécessite davantage de régionalisation, soutient Geneviève Darrieussecq, en y associant plus étroitement usagers et élus locaux, ainsi qu’en leur confiant un réel financement via des Objectifs régionaux de dépenses d’assurance maladie (ORDAM). Le MODEM opte également pour une poursuite des grands plans de santé publique en étroite relation avec la prévention des maladies chroniques et, sur le 5e Risque, pour un règlement du dossier peut-être pas dans l’urgence mais au moins durant le prochain quinquennat, insistant avant tout sur l’augmentation des structures de prise en charge des personnes âgées.

Jean-Luc Mélenchon, Front de Gauche

Derrière Jean-Luc Mélenchon, le Front de Gauche plaide pour quatre abrogations majeures dans son appel 2012 de la santé : la T2A, la loi HPST, celle du 5 juillet dernier relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, ainsi que la Révision générale des politiques publiques (RGPP), accusée d’« imposer la pénurie des personnels soignants ». Sans pour autant remettre au goût du jour l’ancienne dotation globale, Jean-Luc Gibelin, en charge de la santé dans l’équipe de campagne, prône un nouveau financement qui permette de réellement tenir compte de l’activité hospitalière et des missions de service public. Dans l’ensemble, chaque bassin de vie disposerait d’hôpitaux publics et de centres de santé publics pluridisciplinaires, auxquels s’ajouteraient des maternités et centres d’Interruptions volontaire de grossesse (IVG) « en nombre suffisant ». Supprimées pour leur « hyperconcentration » des pouvoirs, les ARS laisseraient place à « une structuration ascendante de la démocratie sanitaire ».

Enfin, dénonçant les critères d’ordre public et de rentabilité qui prévalent en psychiatrie chez les préfets et directeurs d’hôpital, le Front de Gauche entend lui octroyer « un budget spécifique » et favoriser l’alliance entre professionnels de santé et de la justice pour « une psychiatrie de secteur » respectueuse des patients. Un appel spécifique « pour une psychiatrie accueillante et non sécuritaire » est d’ailleurs consacré à ce secteur sur le site de campagne, démarquant par son importance visuelle, Jean-Luc Mélenchon des autres postulants à la présidentielle. Enfin, outre ces positions, s’ajoutent pêle-mêle un remboursement à 100% des dépenses de santé – qui supprimerait de facto les dépassements d’honoraires –, un pôle public du médicament, une prise en charge matérielle et financière de la dépendance par la Sécurité sociale, etc.

Thomas Quéguiner

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