Hubert Allier : « l’Uniopss refuse de voir le secteur de la solidarité basculer dans la compétition »

Publié le 8 janvier 2010 à 1h00 - par

À l’aube d’une année cruciale pour le secteur social et médico-social, l’ (Uniopss) tient son 30 congrès, du 27 au 29 janvier à Lyon, sur le thème : « Les solidarités à l’épreuve de la crise : intérêt général ou compétition ? ». Face aux préoccupations des associations dans l’environnement actuel, l’Uniopss entend articuler, lors de son congrès, « théorie et pratique, réflexion et action, prises de distance et approches de terrain ». Présentation par son directeur général, Hubert Allier.

Hubert Allier : « l’Uniopss refuse de voir le secteur de la solidarité basculer dans la compétition »

Lettre de l’Action sociale : L’Uniopss consacre son 30e congrès au thème : « Les solidarités à l’épreuve de la crise : intérêt général ou compétition ? ». Le secteur est-il vraiment à la croisée des chemins ?

Hubert Allier : 2010 s’annonce comme une année très difficile pour l’ensemble de notre secteur. En cette période de profonds bouleversements, le thème choisi pour notre 30e congrès croise deux problématiques. À savoir :

– La question de la solidarité. Dans notre pays, certaines solidarités sont moins assurées que d’autres.
– L’évolution générale de l’environnement du secteur, qui concerne autant le contexte financier difficile – des alertes inquiétantes nous parviennent, en particulier des conseils généraux – que la question de la reconnaissance des acteurs associatifs.

Hubert Allier est directeur général de l’Uniopss

Hubert Allier a pris ses fonctions de directeur général de l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss) en 2001. Auparavant, il était le directeur de l’Uriopss Rhône-Alpes (depuis 1995). Hubert Allier avait intégré l’Uriopss huit ans plus tôt, en 1987, comme conseiller technique gestion et tarification.
Au début de sa carrière, Hubert Allier a dirigé, pendant plusieurs années, divers établissements pour personnes handicapées (ESAT, foyers d’hébergement…). Aujourd’hui, il siège dans de nombreuses instances du secteur, dont le conseil d’administration de l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm).

En dépit de ces préoccupations et des interrogations des associations, il y a urgence à traiter les questions sociales fortes qui sont devant nous : la prise en charge de la dépendance, la lutte contre les exclusions, la politique en faveur de la jeunesse…

Nous vivons, à la fois, une crise du sens et de l’éthique et une crise des politiques sociales et de leur financement. Tout cela, sans grand souci de considération pour les acteurs du secteur. Nous sommes soumis à un mouvement de bascule permanent. Les pouvoirs publics encouragent la diffusion des méthodes du marché dans le secteur, quand, dans le même temps, l’État n’a jamais produit autant de normes et de réglementation pour le réguler !

L’Uniopss refuse de voir le secteur de la solidarité basculer dans la compétition. Nous soutenons que les associations ne sont pas des entreprises de production, mais des entreprises de relation qui ne peuvent pas être régies par les seules lois du marché. Mais, dans ces conditions, comment s’appuyer encore sur l’intérêt général ?

Toutes ces questions vont irriguer nos débats pendant les trois jours du congrès. Avec deux interrogations plus soutenues :

Quelle est la place du non lucratif ?
Quels sont les défis et les choix possibles ?

LAS : Justement, avez-vous des craintes pour l’avenir du secteur non lucratif ?

Hubert Allier : La question de la place du non lucratif et de la solidarité dans une société marchande qui exclut sera au cœur de notre congrès. Depuis des années, les capacités d’innovation et d’observation des besoins mises en œuvre par les acteurs associatifs non lucratifs ont permis d’initier de nouvelles politiques sociales. Nous devons préserver cette richesse. Mais, sous la double influence de l’Europe et de notre réglementation hexagonale, on tente de cantonner les associations au rôle de simples opérateurs, appliquant des méthodes et des outils. Ainsi, au nom de l’efficacité économique, de la performance, prônées par l’Europe, le statut des acteurs intéresse de moins en moins ; c’est l’activité qui prime.

En France, la systématisation des appels d’offre, la généralisation de la concurrence, la mise en place de la tarification à la personne, l’évaluation des activités… s’inscrivent dans la même veine.

L’Uniopss refuse cette évolution. C’est capital. Au-delà du rôle des associations, il s’agit d’un véritable enjeu de société. Néanmoins, pour être reconnues, les associations doivent évoluer, s’adapter au nouveau contexte. L’époque est propice à la rénovation et à la construction. Le secteur associatif doit être capable de développer une culture nouvelle, sans perdre son âme, pour promouvoir un modèle associatif et des associations en capacité de maintenir et de développer leurs actions dans la société et dans les dispositifs de solidarité. Ce changement de culture constitue un véritable défi.

LAS : Comment le secteur associatif de solidarité peut-il influer sur les choix qui seront faits pour l’avenir ?

Hubert Allier : Fort de sa capacité d’adaptation, le secteur peut faire énormément. J’en suis convaincu. Aujourd’hui, on accorde une trop grande importance aux outils, au détriment du sens et de la finalité de l’action. Cette finalité n’est pas assez affirmée. Les associations ne sont pas là juste pour offrir une prestation ; la solidarité a un sens et doit s’appuyer sur un projet fort. Cela n’est pas suffisamment dit. À nous de le rappeler. C’est un de nos enjeux.

À l’issue du congrès, l’Uniopss présentera un Manifeste porteur de sens, assorti d’illustrations sur le rôle politique des associations. Le texte est en cours de rédaction. Il sera distribué, débattu et finalisé lors du congrès. Ce Manifeste permettra de donner une nouvelle impulsion à notre ingénierie d’accompagnement des associations. Il abordera aussi bien leur fonction politique et sociétale que leur fonction économique.

30e congrès de l’Uniopss : demandez le programme !

Voici les moments forts des trois jours du congrès. 3 séances plénières :

– Cohésion sociale & choix de société.
– Dans la tourmente du marché, à l’épreuve de la régulation.
– Le devenir du modèle non lucratif de solidarité.

14 ateliers thématiques : santé, handicap, personnes âgées, Europe, enfance, exclusions, décentralisation, tarification… Programme détaillé du congrès et inscription sur : www.congres-uniopss.fr

 

Crédit photo : Uniopss / copyright : F. Stijepovic

 


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