L’ambulatoire, un virage et des questions

Publié le 5 octobre 2017 à 8h00 - par

Encouragé depuis plusieurs années pour des raisons médicales et économiques, le recours à l’ambulatoire a décollé en France et va continuer à se développer pour sortir du modèle du « tout-hôpital », mais ce virage pose des questions en termes de réorganisation des structures.

L'ambulatoire, un virage et des questions

L’ambulatoire est le fait d’être pris en charge médicalement sans passer la nuit à l’hôpital. Ce sera le fil rouge des 70e entretiens de Bichat, qui ont lieu du jeudi 5 au samedi 7 octobre à Paris, après avoir déjà été un thème phare du congrès de l’Association française de chirurgie (AFC) la semaine précédente.

« On en parle beaucoup depuis plusieurs années. Aujourd’hui sous l’impulsion des patients, avec la volonté politique et celle des professionnels de santé de travailler ensemble, c’est en train d’arriver », a déclaré à l’AFP le docteur François Sarkozy, président du Comité d’organisation des entretiens de Bichat, rendez-vous annuel consacré à la formation continue des médecins.

Le taux global national de la chirurgie ambulatoire est passé de 36,2 % en 2009 à 54 % l’an dernier et l’objectif est d’arriver à 66,2 % en 2020, note le rapport du congrès de l’AFC.

La France est partie de loin. « La chirurgie ambulatoire a commencé à se développer il y a déjà 30 ans aux États-Unis et 20 ans dans les pays du nord de l’Europe, comme la Grande-Bretagne. En France, ce n’est qu’en 1992 qu’elle a été autorisée », rappelle une pionnière française, le docteur Corinne Vons, dans le rapport de l’AFC.

Soins de ville

Aujourd’hui, le recours à l’ambulatoire est promu par les autorités de santé. Sortir du « tout-hôpital » est l’une des priorités de la stratégie nationale de santé du gouvernement, sur laquelle la ministre Agnès Buzyn a lancé une grande concertation mi-septembre.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), qui sert de base à cette stratégie nationale, pointe « le poids majeur des hospitalisations ponctuelles » (une à deux journées), qui est « le premier poste de dépenses de l’Assurance maladie (31 milliards de dépenses, avec une progression de 2,4 % pour la période 2012-2015) ».

Le HCSP recommande donc « d’accélérer le virage ambulatoire » mais aussi de « développer la capacité de l’offre de soins de ville à remplacer certains séjours » à l’hôpital.

« Le virage de l’ambulatoire, c’est faire sortir plus vite les patients de l’hôpital mais aussi, dans certains cas, ne plus y entrer », résume le docteur Sarkozy.

Il cite comme exemples la mise sous insuline de patients diabétiques ou les chimiothérapies à domicile parfois prescrites par certaines structures, comme le centre de lutte contre le cancer Léon Bérard à Lyon ou Necker à Paris.

Progrès techniques

« Il y a une convergence d’intérêts », fait de son côté valoir à l’AFP le chirurgien Hubert Johanet, co-auteur du rapport de l’AFC. « Sur le plan médical, il est démontré que plus vite les gens reprennent leur autonomie, après une opération, moins il y a de problèmes (complications, risques d’infections, etc.). D’autre part, la sécurité sociale a compris que moins les gens restent à l’hôpital, moins ça coûte cher », poursuit-il.

Le recours accru à la chirurgie ambulatoire est rendu possible par les progrès techniques. Le Dr Johanet cite l’exemple des hernies inguinales : « Auparavant on en opérait 6 % en ambulatoire, on en est aujourd’hui à 66 % dans certaines techniques ». « De nombreuses équipes progressent et vont arriver à réaliser des opérations lourdes en ambulatoire », prédit-il.

Cela nécessite cependant une « meilleure coordination » entre l’hôpital et la médecine libérale de ville pour assurer le suivi des patients, afin qu’ils ne soient « pas livrés à eux-mêmes », souligne le docteur Sarkozy.

Et si le mouvement se poursuit, il aboutira mécaniquement à des fermetures de lits dans les hôpitaux, avec de possibles conséquences sur les personnels. Selon le rapport de l’AFC, « un alignement sur les standards internationaux équivaudrait à la fermeture de quelque 98 000 lits sur les 414 000 existants ».
 

Copyright © AFP : « Tous droits de reproduction et de représentation réservés ». © Agence France-Presse 2017


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Santé »

Voir toutes les ressources numériques Santé