Les recommandations de la HAS sont-elles contraignantes ?

Publié le 16 mai 2011 à 0h00 - par

Le Conseil d’État donne une valeur réglementaire aux recommandations professionnelles de la Haute Autorité de Santé.

Recommandations et bonne pratique professionnelles

La Haute Autorité de la Santé (HAS) recense à ce jour 194 recommandations de bonnes pratiques professionnelles. Elles peuvent être initiées et réalisées par la HAS seule ou en partenariat avec un autre organisme. Elles peuvent être promues et réalisées par un organisme représentatif des professionnels concernés au niveau national. Dans ce cas, sous réserve que l’organisme promoteur élabore la recommandation selon les méthodes de la HAS, celle-ci, après avis du comité de validation de la HAS et délibération favorable du collège de la HAS, reçoit le label HAS.
Dans le cas particulier où la recommandation touche le domaine de la cancérologie,  l’organisme promoteur doit introduire une demande initiale à l’INCa (Institut National du Cancer). La recommandation recevra alors un double label HAS et INCa.

Deux recommandations appropriées à la médecine du travail

Sur les 194 recommandations existantes, seules deux concernent le champ de la santé au travail :

  • Le dossier médical en santé au travail (DMST) – Recommandations  HAS, janvier 2009.
  • Les recommandations pour la surveillance médico-professionnelle des travailleurs exposés à l’action cancérigène des poussières de bois – Label conjoint HAS/INCa, janvier 2011- Promoteur : SFMT (Société Française de Médecine du travail).

Première recommandation, le dossier médical en santé au travail

La recommandation « Dossier médical en santé au travail » définit la nature des données qui doivent figurer dans la dossier médical en santé au travail (DMST), les principes de tenue et d’utilisation du DMST. Ces informations sont destinées aux médecins du travail et aux personnels infirmiers du travail collaborateurs des médecins du travail sous leurs responsabilités. Si le respect des règles de confidentialité et de secret médical doit être garanti par l’employeur des médecins du travail, ces derniers ont l’obligation déontologique de veiller à ce qu’elles soient respectées. Ainsi la recommandation place la responsabilité de l’accès aux données à un médecin du travail administrateur en accord avec ses pairs. Le personnel de maintenance informatique doit être habilité par ce même médecin.

Seconde recommandation, les travailleurs exposés aux poussières de bois

La recommandation « Poussières de bois » préconise la réalisation systématique d’une nasofibroscopie à intervalle régulier chez les travailleurs exposés après une certaine durée d’exposition. Elle a pour objectif le dépistage précoce des cancers des sinus de la face, en particulier de l’ethmoïde.

Des recommandations méconnues de l’informatique

À l’heure actuelle, peu de logiciels de santé au travail répondent au cahier des charges des recommandations HAS en matière de DMST. D’autre part, la sécurisation des données sous l’égide d’un médecin du travail administrateur n’est pas en « routine administrative » dans tous les services de santé au Travail.

La valeur réglementaire des recommandations 

La réponse des responsables de SST aux interrogations des médecins du travail sur les conséquences du non-respect des recommandations de bonne pratique professionnelle de la HAS se résume le plus souvent au fait qu’une recommandation HAS n’est pas obligatoire. Elle n’aurait qu’une valeur indicative, d’orientation.

Pour ce qui concerne la surveillance médicale des travailleurs exposés à certains risques, elle est définie pour certains de ces risques par des textes règlementaires (décret ou arrêtés techniques).
Quelle est la valeur de la conférence de consensus de 1999 sur la surveillance des travailleurs exposés ou ayant été exposés à l’amiante ou bien de la recommandation de janvier 2011 sur la surveillance médicale des travailleurs exposés aux poussières de bois ?
En matière de responsabilité médicale dite fautive, l’arrêt Mercier (cour de cassation du 20 mai 1936)  indique que « l’obligation de soins découlant du contrat médical et mise à la charge du médecin est une obligation de moyen ; le médecin ne pouvant s’engager à guérir, il s’engage seulement à donner des soins non pas quelconques mais consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science ».
Les recommandations de bonne pratique édictent de fait des principes issus des données actuelles et acquises de la science et il paraît hasardeux pour un médecin de s’en affranchir.

La recommandation « Dossier médical en santé au travail » de la HAS est une recommandation technique. Est-elle opposable aux médecins du travail et, par conséquent, aux services de santé au travail ?

Le Conseil d’État, dans un arrêt du 27 avril 2011 n° 334396, a jugé que les recommandations de bonne pratique professionnelle HAS avaient une valeur règlementaire. Cette valeur de règlement doit être précisée pour les recommandations labellisées HAS placées pour le fond sous la responsabilité de l’organisme promoteur. Les médecins du travail semblent en capacité d’exiger de disposer d’un dossier médical informatisé conforme aux recommandations et de disposer du contrôle de l’accès aux données médicales.


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