Statu quo sur l’organisation en pôles

Publié le 19 mars 2014 à 0h00 - par

HOSPIMEDIA – Les conférences des présidents de CME et de directeurs généraux viennent de rendre officiellement leur rapport sur l’organisation en pôle, à Marisol Touraine. Elles prennent acte de l’implantation des pôles dans le paysage hospitalier, tout en relevant un certain nombre de dysfonctionnement mais en ne proposant que des modifications à la marge.

Et de deux. Les présidents des Conférences (présidents de CME de CHU, CHS, CH, directeurs généraux de CHU, CHS, CH) viennent de remettre officiellement leur rapport sur l’organisation en pôle, le deuxième issu des concertations sur le Pacte de confiance, après celui de Claire Compagnon sur les droits des usagers dans les établissements de santé. Il a été précédé d’une enquête réalisée par les intersyndicales de Praticiens hospitaliers (PH), rendue publique en octobre dernier. Laquelle a fait état d’un désintérêt, voire d’un rejet, de la majorité des PH pour l’organisation en pôles. Tout dernièrement, Hospimedia a publié la contribution de la conférence des présidents de CME de CHU à ce rapport, qui demande une révision complète du mode de nomination des chefs de pôle, en requérant la co-décision du chef d’établissement, du président de la CME et du doyen de l’université, dans le choix du chef de pôle. Actuellement, le directeur d’établissement nomme le chef de pôle, après proposition de trois noms par le président de la CME et du doyen. Une proposition que n’a pas retenue le rapport final des conférences qui, s’il établit un état des lieux nuancé de l’organisation en pôles, ne propose pas de réelles réformes.

7 constats, 19 propositions

À partir de 7 constats, la mission formule 19 propositions. Premier constat, l’organisation en pôle s’est généralisée et a été plutôt bien acceptée. « La grande majorité des décideurs des hôpitaux ne fait état d’aucune difficulté sur la pertinence de l’organisation en pôle », relate la mission. Néanmoins, cet unanimisme est tempéré par les établissements mono-disciplinaires, spécialisés en psychiatrie, pour qui la logique sectorielle prévaut, ainsi que par les organisations syndicales de PH, qui font état d’un désinvestissement institutionnel d’une majorité des médecins et anciens chefs de service. Mais, si l’organisation en pôle semble faire consensus, c’est aussi parce qu’elle s’est constituée sur une logique médicale avant tout. Dans les CHU, en revanche, la recherche est plutôt traitée en dehors des pôles, dans des Départements hospitalo-universitaires (DHU). Cependant, cette logique médicale se heurte à la taille des pôles dans des établissement trop petits ou, a contrario, dans des établissements trop importants : là, les pôles, qui peuvent comprendre plus de 300 ETP, sont ingouvernables. Autre écueil relevé par la mission : les contrats de pôle ne sont pas généralisés et leur contenu reste variable. Les délégations de gestion, également, sont éparses, et ne sont pas non plus présentes dans l’ensemble des établissements. « Celles-ci sont, ainsi, mises en œuvre dans plus de 60 % des CH dont le budget est supérieur à 60 millions d’euros, alors qu’elles ne le sont que dans 40 % des CH en moyenne », a relevé la mission. Les pôles sont également mal outillés : ils disposent de peu d’indicateurs de suivi et de tableaux de bord. De la même manière, la formation des chefs de pôles est lacunaire et manque d’harmonisation. 

Absence de dialogue social

À leur grand dam, les conférences déplorent une absence de dialogue social au sein des pôles et un désinvestissement « institutionnel des médecins non chefs de pôle ». Enfin, directoire et directeurs d’établissements permettent d’éviter au sein des établissements une balkanisation rampante due à l’organisation en pôle.

19 propositions sont donc formulées pour répondre à cet état des lieux et améliorer l’existant. Outre la réaffirmation de la liberté d’organisation des pôles et la possibilité, pour certains petits établissements, de déroger à la mise en place de pôles, la mission propose notamment d’élaborer une charte des pôles mais aussi d’inscrire les grands principes de l’organisation en pôle dans le règlement intérieur de l’établissement. À l’instar de la conférence des présidents de CME de CHU, la mission recommande aussi de réaffirmer la place du service dans le pôle, en confiant au président de CME la responsabilité de proposer, conjointement avec le chef de pôle, le(s) noms(s) du chef(s) de service.

Dérogation pour les petits établissements

Si la mission propose aux petits établissements de déroger à l’organisation en pôle, elle suggère également de fixer un plafond en termes d’ETP dans les pôles, qui pourrait être de 300. Pour améliorer l’efficience des pôles, la mission souhaite généraliser les contrats de pôles, projets de pôle et délégations de gestion. Les contrats de pôles devront être signés par le directeur d’établissement et le président de CME et visés par les doyens de faculté dans les CHU. Le pilotage pourra être renforcé grâce à la mise à disposition d’outils tels que des tableaux de bord, des comptes de résultat analytique, etc.

Dans l’optique d’une meilleure participation des équipes dans la vie du pôle, la mission souhaite également favoriser l’expression directe, en rendant obligatoire, dans le projet social, les modalités d’expression et de concertation au sein des pôles et en les inscrivant dans le manuel de certification de la Haute Autorité de santé (HAS). La mission préconise aussi le développement du management participatif.

2 mandats de chefs de pôle

En matière de mandat des chefs de pôle, la mission propose de limiter à deux le nombre de mandat de chefs de pôle et d’impliquer plus avant le président de CME dans la nomination des chefs de pôle. Pour remédier aux formations des chefs de pôle, les conférences souhaitent qu’elles puissent être intégrées dans le Développement professionnel continu (DPC). Cette dernière proposition a laissé de marbre Nicole Smolski, présidente de l’intersyndicale Avenir Hospitalier, qui a initié une enquête sur l’organisation en pôles auprès des PH. « Il n’est pas question que le DPC serve à améliorer le fonctionnement des pôles, il doit être totalement dévolu à l’amélioration des pratiques professionnelles des praticiens », a-t-elle déclaré à Hospimedia. Pour autant, elle se déclare satisfaite du bilan établi par les conférences, qui ont relevé le désinvestissement des PH dans la vie des pôles. « Si les conférences font état d’une insatisfaction, leurs propositions ne vont pas assez loin. Ils ne remettent pas en cause le bureau de pôle, qui confine les managers entre eux. De même, la délégation de gestion reste sous le contrôle du directeur, qui craint la balkanisation. Or, dans l’esprit de la réforme, les pôles avaient été mis en place pour déconcentrer cette gestion. Ne pas le faire va à l’encontre de l’esprit de cette réforme. »

Jean-Bernard Gervais

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