La « police de sécurité du quotidien », équation à plusieurs inconnues

Publié le 2 octobre 2017 à 15h36 - par

Lutter efficacement contre la délinquance tout en rapprochant la police de la population : telle est l’équation à plusieurs inconnues de la future « police de sécurité du quotidien », un dossier aussi ambitieux que périlleux pour Gérard Collomb.

La "police de sécurité du quotidien", équation à plusieurs inconnues

Le ministre de l’Intérieur avance à pas de loup sur ce chantier prévu pour début 2018 qui, reconnaît l’un de ses proches, suscite « beaucoup d’attentes ».

Promesse de campagne du candidat Emmanuel Macron, le projet, dont le chef de l’État doit préciser les contours le 18 octobre à l’Élysée, est né dans un contexte brûlant : le mouvement de grogne inédit des policiers et « l’affaire Théo », du nom d’un jeune homme grièvement blessé lors de son arrestation en banlieue parisienne.

La police de sécurité du quotidien (PSQ) dispose déjà d’un calendrier, mais les contours essentiels de la réforme restent flous. De nouvelles unités dédiées seront-elles créées ? Les services seront-ils réorganisés ?

« Nous avons besoin de savoir si cela va être une philosophie, une doctrine ou une réforme de structure », relève Céline Berthon, secrétaire générale du Syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN).

Or, la concertation promise par M. Collomb avec les « autorités locales, les organisations syndicales, les associations d’élus, et des universitaires », prévue initialement en septembre et octobre, tarde à se mettre en place aux yeux des intéressés.

En novembre et décembre, les territoires retenus pour l’expérimentation doivent ensuite mettre en place l’organisation du dispositif.

Plusieurs villes se sont déjà portées candidates : Lille, Lens, Roubaix, Toulouse ou encore Aulnay-sous-Bois, commune devenue, avec « l’affaire Théo », le symbole d’un divorce entre police et jeunes dans les quartiers.

La « pol prox » de retour ?

L’exécutif a en tout cas clairement dit ce que la « PSQ » ne serait pas : « le retour pur et simple à la police de proximité », comme l’a déclaré Emmanuel Macron devant les préfets le 7 septembre.

M. Macron a toutefois rendu hommage à cette police de proximité dont l’abandon « a conduit à éloigner les forces de l’ordre de la réalité du terrain et à créer les incidents, les troubles graves que nous avons connus il y a quelques mois ».

Mais, 14 ans après l’enterrement de la « pol prox » par Nicolas Sarkozy, ce symbole de la politique sécuritaire de Lionel Jospin est devenu un tabou donnant prise à toutes les accusations de laxisme.

Le député LR Éric Ciotti ne s’est d’ailleurs pas privé de voir, dans la « PSQ », le retour d’« une vieille lubie de la gauche ».

« La PSQ ne peut pas être une resucée de la police de proximité, elle ne peut pas être non plus une philosophie pensée uniquement au niveau ministériel avec une déclinaison identique sur tous les territoires », insiste Mme Berthon.

« La police du quotidien, ce n’est pas que de l’échange, ce n’est pas que du contact, c’est aussi, sur certains territoires, une réponse judiciaire », fait-on valoir dans l’entourage de Gérard Collomb.

Le ministre, qui se prévaut régulièrement de son expérience d’élu local, entend donner toute sa place « au terrain ».

« Nous dessinons des éléments de doctrine forts mais les initiatives reposent sur le terrain. La délinquance de Pau ne ressemble pas à celle de Toulouse ou de Nantes », abonde Éric Morvan, le nouveau patron de la police nationale, qui plaide pour une « police de la disponibilité ».

Place Beauvau, on estime que le chantier de la « PSQ » n’est pas indépendant d’autres réformes comme celles de la simplification de la procédure pénale ou du continuum entre sécurité privée, police municipale et forces de sécurité nationales.

Il pose également la question de l’évaluation de l’action policière.

« La doctrine proposera notamment les moyens de rendre compte de l’action des forces de sécurité à nos concitoyens, dans une perspective plus qualitative, complétant les statistiques de la délinquance », a promis Emmanuel Macron.

Une petite révolution dans la culture policière française, qui devra d’abord convaincre des policiers oscillant entre défiance à l’égard de la hiérarchie et malaise sur le sens de leurs missions.

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