La société nationale Corse Méditerranée dans la tourmente

Publié le 25 septembre 2015 à 14h56 - par

La SNCM devra rembourser les aides d’État qu’elle a perçues.

droit européen

Une situation bien compromise

La société nationale Corse Méditerranée (SNCM) est titulaire de la délégation de service public de transports maritimes entre la Corse et le continent, attribuée par la collectivité territoriale de Corse. Le contrat a été conclu en 2007, pour une durée de six ans. La SNCM emploie environ 1 500 salariés, et elle subi des pertes d’environ 50 millions d’euros par an.

Une société concurrente, la société Corsica ferries,  mène un combat, notamment juridique, contre la SNCM qui a en partie abouti. Plusieurs contentieux se sont développés, notamment devant la juridiction administrative française. Le Conseil d’État a ainsi jugé, le 13 juillet 2012, que la SNCM n’avait pas bénéficié d’une aide d’État.

La Commission européenne a montré dans une décision du 2 mai 2013 qu’elle était d’un avis différent. Elle a demandé aux autorités françaises de récupérer l’aide auprès de la SNCM, soit une somme d’environ 220 millions d’euros. La Commission n’a guère attendu pour mettre en œuvre les moyens dont elle dispose. Dès le mois de février 2014, elle a engagé un recours en manquement pour défaut d’exécution de sa décision de 2013. Cette procédure, destinée à contraindre les parties à s’exécuter, nécessite en effet la saisine de la Cour de justice de l’Union européenne.

La France a émis un titre exécutoire, mais s’en est tenue là, raison pour laquelle la Commission européenne a enclenché la procédure en manquement.

La Cour de justice de l’Union européenne confirme la décision de la Commission

Dans son arrêt du 9 juillet dernier, C 63/14, la Cour commence à rappeler qu’un État ne peut méconnaître l’obligation de rembourser les aides d’État indument perçues qu’en cas d’impossibilité absolue.

La France faisait valoir qu’en novembre 2014, la société avait été placée en redressement judiciaire à la suite du constat de sa cessation de paiement. Elle indique également qu’elle est dans l’impossibilité absolue de recouvrer la somme due, et que le recouvrement aurait pour conséquence immédiate la mise en liquidation judiciaire de la société « et, au final, affecter gravement l’équilibre économique de toute une région ». L’interruption de l’activité de la SNCM affecterait la continuité territoriale entre la Corse et le continent.

Mais la Cour ne se laisse pas fléchir. Certes, la France invoque le risque de troubles sociaux, mais elle n’établit pas qu’elle ne pourrait y faire face en mobilisant les ressources dont elle dispose,  « par d’autres voies maritimes ou par la voie aérienne ». De fait, le seul facteur social n’est pas pris en compte par la Cour. La cessation de l’activité de la SNCM est également envisagée avec froideur par la Cour, qui ne voit dans cette circonstance aucune menace pour la continuité territoriale rendant absolument impossible le remboursement de l’aide.

Enfin, le fait que le contentieux engagé au fond par les autorités françaises n’ait pas encore été jugé n’est pas non plus un motif justifiant l’inaction de la France. La SNCM n’en a pas fini avec ses difficultés.

Laurent Marcovici


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