Analyse des spécialistes / Urbanisme

L’ordonnance du 25 mars 2016 harmonise les procédures d’urbanisme avec les procédures environnementales

Publié le 10 mai 2016 à 13h04 - par

Le « choc de simplification » voulu par le gouvernement se poursuit dans le secteur de l’aménagement et de la construction. Comme l’a récemment rappelé le secrétariat d’État en charge de la Réforme de l’État et de la simplification, ce secteur constitue en effet « un axe majeur du programme de simplification pour les entreprises ».

Point sur l'ordonnance du 25 mars 2016

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Olivier Laffitte

À cet égard, un certain nombre de mesures ont d’ores et déjà été prises afin de relancer l’activité : homogénéisation des contrôles des bâtiments par les services départementaux d’incendie et de secours et les autorisations d’ouverture pour les établissements recevant du public, possibilité lors de l’achat d’un logement neuf sur plan de demander au promoteur de réaliser des travaux modificatifs par rapport au projet d’origine afin de l’adapter aux besoins et goûts de l’acquéreur, ou encore allongement du délai de validité des autorisations d’urbanisme, porté depuis janvier 2016 de deux à trois ans.

Pris sur le fondement de la loi « Macron » n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances, l’ordonnance n° 2016-354 du 25 mars 2016 et son décret d’application du même jour n° 2016-355 relatifs à l’articulation des procédures d’autorisation d’urbanisme avec diverses procédures relevant du Code de l’environnement s’inscrivent dans cette même démarche, en permettant de mieux coordonner l’instruction des diverses autorisations nécessaires au développement d’un projet immobilier.

Il est fréquent en effet qu’un même projet nécessite l’obtention de plusieurs autorisations relevant non seulement de législations différentes (Code de l’urbanisme et/ou Code de l’environnement) mais également d’autorités différentes (maire et/ou préfet).

Bien que parfaitement conforme au « principe de l’indépendance des législations », il en résulte toutefois une complexité non négligeable et surtout un allongement des délais d’obtention cumulés desdites autorisations.

Les textes précités visent ainsi à remédier à ces inconvénients en assurant une meilleure articulation des procédures d’urbanisme et d’environnement.

D’une part en effet, lorsqu’un projet porte sur une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité (dit « IOTA »), soumis sur le fondement de l’article L. 214-3 du Code de l’environnement à autorisation, aux motifs qu’il serait notamment susceptible de présenter des dangers pour la santé ou la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux ou de réduire la ressource en eau, ou à simple déclaration pour les IOTA ne présentant pas de tels risques, tout permis de construire ou décision de non opposition à déclaration préalable de travaux ne pourra désormais être mis en œuvre avant la délivrance de l’autorisation ou de la décision d’acceptation de l’autorité compétente en matière de IOTA.

D’autre part, et pour ce qui concerne les IOTA objets d’une autorisation unique (dites « AU-IOTA »), outre la suppression de l’obligation d’adresser la demande d’autorisation à ce titre en même temps que la demande de permis de construire, les nouvelles dispositions précisent désormais, par dérogation à l’interdiction générale de commencer les travaux avant obtention de l’autorisation AU-IOTA, que les permis de démolir pourront cependant recevoir exécution avant la délivrance de ladite autorisation unique, à la condition toutefois que la démolition ne porte pas atteinte aux intérêts protégés par l’autorisation AU-IOTA.

Enfin, en matière de travaux nécessitant l’obtention d’une dérogation à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées, tout permis ou décision de non opposition à déclaration préalable de travaux ne pourra être mis en œuvre avant l’obtention de l’autorisation préfectorale précitée.

Sur le plan formel, la bonne articulation entre ces différentes procédures est assurée par le fait que tout pétitionnaire au titre d’une autorisation d’urbanisme doit désormais indiquer dans sa demande si ses travaux sont par ailleurs soumis à l’une des réglementation IOTA précitée ou font l’objet d’une dérogation à l’interdiction d’atteinte aux espèces protégées.

Au final, ces mesures, applicables à compter du 26 mars 2016, permettront à n’en pas douter de mieux coordonner l’instruction des différentes autorisations nécessaires à la réalisation de projets immobiliers et permettront en particulier aux promoteurs de purger au plus vite les recours des tiers contre ces actes administratifs.

Reste à savoir cependant si cette articulation renforcée ne sera pas elle-même source d’un contentieux nouveau mettant fin au règne jusqu’alors absolu de l’indépendance des législations. À cet égard, l’appréciation que devra désormais porter l’autorité en charge de délivrer les permis de démolir quant à l’existence ou non d’atteintes aux intérêts protégés par la réglementation environnementale propre aux AU-IOTA, constituera à n’en pas douter un précédent dangereux…

 

Olivier Laffitte, Avocat associé du cabinet Taylor Wessing


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