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Cour Administrative d'Appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 07/05/2013, 11MA00928, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. GONZALES

Rapporteur : Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ

Commissaire du gouvernement : Mme HOGEDEZ

Avocat : BACHA


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête enregistrée le 4 mars 2011 par télécopie et le 8 mars 2011 par courrier, présentée pour Mme E...D...demeurant..., par Me C...A... ; Mme D...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement rendu le 30 décembre 2010 par le tribunal administratif de Marseille en tant qu'il concernait la requête enregistrée sous le n° 0909333 ;

- de condamner le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles et de la Camargue à lui verser le montant de la rémunération dont elle a été indûment privée correspondant à ses temps de déplacement et de pause ainsi que le montant des frais de transport engagés dans le cadre de son service ;

- de condamner le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles et de la Camargue à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle estime avoir subi du fait d'une dégradation de ses conditions de travail ;

- d'assortir le montant des sommes dues des intérêts au taux légal avec capitalisation desdits intérêts ;

- de mettre à la charge du syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles et de la Camargue le paiement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 86-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État et dans la magistrature ;

Vu le décret n° 91-861 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique (musique, danse, art dramatique, arts plastiques) ;

Vu le décret n° 2001-654 du 19 juillet 2001 fixant les conditions et les modalités de règlements des frais occasionnés par les déplacements des personnels des collectivités locales et établissements publics mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et abrogeant le décret n° 91-573 du 19 juin 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2013 :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant MeA..., pour Mme D...et de Me F..., de la SCP d'Assomption-Hureaux, pour le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles et de la Camargue ;

1. Considérant que Mme D...a été recrutée en 1986 par le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles en qualité d'assistante territoriale d'enseignement artistique et était plus précisément chargée de l'enseignement du violoncelle dans quatre communes : Arles, Tarascon, Saint-Rémy-de-Provence et Saint-Martin-de-Crau ; qu'elle a, le 14 octobre 2008, fait l'objet d'une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours pour manquement à son devoir de réserve ; qu'elle a contesté cette décision dans le cadre d'une requête enregistrée au greffe du tribunal administratif de Marseille sous le n° 0808582 ; qu'elle a, en parallèle, adressé, le 30 décembre 2009, une réclamation préalable à son employeur en sollicitant le versement de sommes non perçues au titre de ses temps de trajets entre ses différents lieux de travail, de ses temps de pause, de ses frais de déplacements ainsi qu'une indemnisation en réparation du préjudice moral qu'elle estimait avoir subi du fait d'une dégradation de ses conditions de travail et d'un harcèlement moral ; qu'une réponse négative lui ayant été opposée le 4 février 2010, elle a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une seconde requête enregistrée au greffe sous le n° 0909333 ; que, par un jugement en date du 30 décembre 2010, le tribunal administratif de Marseille, après avoir joint les deux requêtes, les a rejetées ; que Mme D...interjette appel dudit jugement en tant qu'il portait sur la requête enregistrée sous le n° 0909333 ;

Sur les conclusions relatives aux temps de déplacement entre les différents lieux de travail de MmeD... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 12 juillet 2001 : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail applicables aux agents des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant sont déterminées dans les conditions prévues par le décret du 25 août 2000 susvisé sous réserve des dispositions suivantes " ; qu'aux termes de l'article 7 dudit décret : " Les régimes d'obligations de service sont, pour les personnels qui y sont soumis, ceux définis dans les statuts particuliers de leur cadre d'emplois " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du
2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique : " Les assistants d'enseignement artistique assurent un service hebdomadaire de vingt heures " ; que si les obligations de service prévues par le statut des assistants territoriaux d'enseignement artistique font obstacle à ce que puisse être appliqué le décret précité du 12 juillet 2001 en tant qu'il est relatif à la réduction de la durée du travail et à l'annualisation du temps de travail, elles ne font, en revanche, pas obstacle à ce que puisse être appliqué ledit décret en tant qu'il définit, pour les agents des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant, le temps de travail effectif par référence au décret du
25 août 2000 ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 août 2000 : " La durée de travail effectif s'entend comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles " ; que le temps de trajet d'un agent pour se rendre de son premier à un autre lieu de travail doit être regardé comme du temps de travail effectif dès lors que, durant ce laps de temps, l'agent est à la disposition de son employeur et ne peut vaquer librement à ses occupations personnelles ;

4. Considérant, en outre que si, aux termes de l'article 6-3 du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984, les assistants territoriaux d'enseignement artistique dont les services hebdomadaires excèdent le maximum de services réglementaires prévu par leur statut peuvent recevoir une indemnité, le syndicat intercommunal intimé n'établit pas avoir indemnisé sur la base de ces dispositions son agent pour les heures de service accomplies au-delà de la durée hebdomadaire de 20 heures ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à la rémunération des heures de trajet effectuées entre ses différents lieux de travail ; qu'il y a lieu, dans cette mesure, d'annuler ledit jugement ;

6. Considérant que Mme D...sollicite une rémunération au titre du temps consacré aux déplacements effectués entre janvier 2005 et décembre 2008 ; que si ses demandes sont, sur ce point, il est vrai, imprécises, la requérante fournit cependant suffisamment d'éléments permettant de calculer le préjudice allégué et, notamment, ses emplois du temps ; qu'il en résulte que, jusqu'à la rentrée scolaire 2007/2008 pour laquelle son emploi du temps a été modifié, la requérante effectuait un trajet de l'ordre de 25 minutes pour se rendre d'Arles à Tarascon le mercredi et un trajet de 20 minutes environ pour se rendre d'Arles à Saint-Martin-de-Crau le samedi ; que, son temps de trajet a été augmenté lors de rentrée scolaire 2007/2008, les cours ayant été répartis sur quatre jours au lieu de trois ; que ledit temps de trajet a été porté à environ 2 heures par semaine pour les journées du mercredi (trajet d'Arles à Saint-Rémy-de-Provence puis de Saint-Rémy-de-Provence à Tarascon) et du samedi (trajet de Tarascon à Saint-Martin-de-Crau puis de Saint-Martin-de-Crau à Arles) ; qu'au vu de ces éléments, de la période de vacances scolaires de 16 semaines qui n'a pas à être prise en considération, et d'un taux horaire non contesté de 24,09 €, il sera fait une exacte appréciation de la somme due à Mme D...au titre des heures de trajets précitées en l'évaluant à la somme de 4 047,12 € ; que, dès lors, le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles est condamné à verser à Mme D...la somme de 4 047,12 € ; que cette somme portera intérêts à compter de la réception par l'administration de la demande préalable de Mme D...datée du 30 décembre 2009 ; qu'en application des dispositions de l'article 1154 du code civil, les intérêts échus un an après la date de ladite réception puis à chaque échéance annuelle seront capitalisés pour produire
eux-mêmes intérêts ;

Sur les conclusions relatives aux temps de pause :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret précité du 25 août 2000 : " Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre six heures sans que les agents bénéficient d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes " ;

8. Considérant qu'en application des dispositions précitées, Mme D...est fondée à prétendre, ses temps de trajets devant être comptabilisés comme du temps de travail effectif, qu'elle n'a pas bénéficié, certains jours, après modification de son emploi du temps pour la rentrée scolaire 2007/2008, du temps de pause réglementaire ; que, cependant, ledit temps de pause durant lequel l'agent n'est pas à la disposition de son employeur et peut vaquer librement à ses occupations personnelles ne constitue pas du temps de travail effectif devant être rémunéré en tant que tel ; que par suite, les conclusions présentées à ce titre par Mme D...doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au remboursement de frais de déplacements :

9. Considérant que si Mme D...peut être regardée comme soutenant qu'elle n'a pas été intégralement indemnisée des frais de déplacements engendrés par ses trajets, elle n'assortit pas son moyen de précisions permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé, le syndicat intimé produisant au contraire un état détaillé, année par année, des remboursements opérés ;

Sur les conclusions indemnitaires présentées par MmeD... :

10. Considérant que Mme D...soutient qu'elle a subi un préjudice moral du fait, d'une part, d'une dégradation de ses conditions de travail et, d'autre part, d'un harcèlement moral ;

11. Considérant toutefois que s'il est exact que l'organisation du temps de travail de la requérante a été modifiée à compter de la rentrée scolaire 2007/2008, ce qui a généré plus de temps de trajets pour l'intéressée, cette réorganisation, qui avait au demeurant été validée par le médecin du travail et dont il n'est pas établi qu'elle n'aurait concerné que la requérante, n'excédait en rien l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ; que, par ailleurs, les changements de salles allégués ainsi que la défectuosité des instruments de musique mis à sa disposition ne sont pas établis ; que si Mme D...soutient également que ses compétences ont été remises en cause, il ressort au contraire des pièces du dossier, d'une part, que ses qualités pédagogiques ont toujours été reconnues et, d'autre part, que si des parents d'élèves ont été joints au téléphone par le secrétariat du syndicat intercommunal, il s'agissait uniquement d'obtenir leur avis, non pas sur la qualité des cours de l'intéressée mais sur la modification des heures de cours ; que, par ailleurs, si Mme D...a fait l'objet d'une exclusion temporaire de fonctions le 14 octobre 2008, il n'est pas établi ni même d'ailleurs allégué, Mme D...n'ayant pas interjeté appel du jugement attaqué en tant qu'il portait sur ladite sanction, que celle-ci lui aurait été infligée à tort ; qu'enfin, s'il a été demandé à
Mme D...qui avait adressé à sa hiérarchie une soixantaine de courriers en les déposant sur ses différents lieux de travail et en en faisant des copies pour des autorités autres que son employeur, de les adresser par voie postale au siège du syndicat intercommunal, ce fait n'est pas non plus de nature à caractériser un harcèlement moral à l'égard de la requérante ; que, par suite, Mme D...n'est pas fondée à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat intercommunal pour la gestion du personnel de musique des Alpilles et de Camargue le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les dispositions précitées font en revanche obstacle à ce que soit versée au syndicat intercommunal intimé la somme qu'il réclame en application des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 30 décembre 2010 est annulé en tant qu'il a rejeté, dans le cadre de la requête enregistrée sous le n° 0909333, les conclusions de Mme D...tendant à être rémunérée pour les temps de trajets effectués entre ses différents lieux de travail.
Article 2 : Le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel de musique des Alpilles et de la Camargue versera à Mme D...la somme de 4 047,12 euros (quatre mille quarante sept euros et douze centimes). Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande présentée le 30 décembre 2009 par MmeD.... Les intérêts échus un an après la date de ladite réception, puis à chaque échéance annuelle, seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D...est rejeté.
Article 4 : Le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles et de la Camargue versera à Mme D...la somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions présentées par le syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles et de la Camargue en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...D...et au syndicat intercommunal pour la gestion du personnel des écoles de musique des Alpilles et de la Camargue.
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N° 11MA009282



Abstrats

36-08 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération.
36-08-03-004 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers. Frais de déplacement.

Source : DILA, 17/05/2013, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Marseille

Date : 07/05/2013