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Cour Administrative d'Appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 12/11/2013, 11MA04254, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. BOUCHER

Rapporteur : Mme Hélène BUSIDAN

Commissaire du gouvernement : M. ROUX

Avocat : CABINET D'AVOCATS LABRY


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2011, présentée pour le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Aude, dont le siège est ZI La Bouriette, rue Aristide Bergès, BP 1053, cedex 9, à Carcassonne (11870), représenté par son président en exercice, par le cabinet d'avocatsA... ;

Le SDIS de l'Aude demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001548 du 21 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, sur demande de Mme C...B..., annulé une décision verbale de suspension de ses fonctions de sapeur-pompier volontaire du 29 juin 2009 et un arrêté du président du conseil d'administration du SDIS de l'Aude du 18 février 2010 prononçant la résiliation d'office de son engagement en qualité de sapeur-pompier volontaire stagiaire ;

2°) de rejeter la demande de MmeB... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celle de 35 euros au titre des dépens ;
........................................................................................................
........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers ;

Vu le décret n° 99-1039 du 10 décembre 1999 relatif aux sapeurs-pompiers volontaires ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2013 :
- le rapport de Mme Busidan, premier conseiller,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour le SDIS de l'Aude ;


1. Considérant que, par jugement du 21 septembre 2011, le tribunal administratif de Montpellier, sur demande de MmeB..., sapeur-pompier volontaire en période probatoire au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Aude a annulé deux décisions émanant de ce service, l'une verbale en date du 29 juin 2009 portant suspension de fonctions de Mme B...et l'autre prise par arrêté du 18 février 2010 portant résiliation d'office de l'engagement de l'intéressée ; que le SDIS de l'Aude relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'il ressort de la demande présentée par Mme B...et enregistrée le 1er avril 2010 devant le tribunal administratif de Montpellier que l'intéressée y précisait ses nom, prénom et adresse ; qu'elle y citait deux décisions prises à son égard par le SDIS, une mise à pied orale ayant débuté le 29 juin 2009 et une résiliation d'office de son engagement en date du 18 février 2010, en exposant des critiques que les premiers juges ont pu à bon droit analyser comme des moyens de légalité ; qu'en réponse à une demande de régularisation adressée par le greffe du tribunal le 11 mai 2010, l'intéressée a produit le 18 mai suivant la copie de l'arrêté du 18 février 2010 et des pièces de nature à établir l'existence de la décision verbale attaquée ; que, par suite, le SDIS de l'Aude n'est pas fondé à soutenir que la demande de Mme B...était irrecevable faute de satisfaire aux dispositions des articles R. 411-1 et R. 412-1 du code de justice administrative selon lesquelles tout recours doit être formé contre une décision et énoncer l'exposé de faits et moyens ; que le SDIS de l'Aude n'est pas davantage fondé à soutenir que la demande de Mme B...n'était en réalité qu'une simple demande d'explication et que les premiers juges auraient ainsi statué ultra petita ;

Sur la décision verbale de suspension :

3. Considérant, en premier lieu, que si le SDIS de l'Aude soutient que la décision orale du 29 juin 2009 n'aurait jamais existé, il ne conteste pas cependant qu'à cette date, ainsi qu'il ressort d'un courrier du 27 octobre 2009 adressé par Mme B...à sa hiérarchie, le chef du centre d'affectation de l'intéressée lui a ordonné de rendre son "bip" et la clé de la caserne, l'a notée comme indisponible sur la liste du personnel du centre, ne lui a pas permis de suivre la formation qu'elle demandait et lui a supprimé mobilisation, astreintes et vacations ; qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, une telle décision, qui faisait manifestement grief à l'intéressée, ne peut s'analyser que comme une mesure de suspension prise sur le fondement de l'article 33 du décret susvisé du 10 décembre 1999 instituant une procédure conservatoire de suspension de fonctions en cas de faute grave ou de manquement grave d'un sapeur-pompier volontaire à ses obligations, quand bien même le SDIS n'a pas ensuite engagé de procédure disciplinaire ; que, dès lors que le SDIS expose qu'il ne reproche à Mme B...la commission d'aucune faute mais une insuffisance professionnelle, cette mesure de suspension méconnaît, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, les dispositions dudit article 33 qui subordonne la légalité de la suspension de fonctions d'un sapeur-pompier volontaire à la commission par ce dernier d'une faute grave ; que le SDIS de l'Aude n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif en a prononcé l'annulation ;

Sur la légalité de l'arrêté du 18 février 2010 portant résiliation d'office de l'engagement :

4. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 12 du décret du 10 décembre 1999 susvisé : " Le premier engagement comprend une période probatoire, permettant l'acquisition de la formation initiale, qui ne peut être inférieure à un an ni supérieure à trois ans. / L'autorité territoriale d'emploi peut, après avis du comité consultatif des sapeurs-pompiers volontaires compétent, résilier d'office l'engagement du sapeur-pompier volontaire en cas d'insuffisance dans l'aptitude ou la manière de servir de l'intéressé durant l'accomplissement de sa période probatoire. / L'autorité territoriale d'emploi met fin à la période probatoire dès l'acquisition de la formation initiale. " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'à défaut d'indication contraire dans l'arrêté d'engagement d'un sapeur-pompier volontaire, celui-ci bénéficie d'une période probatoire de trois ans tant qu'il n'a pas acquis la formation initiale ; que l'engagement de Mme B... ayant pris effet le 1er octobre 2007, elle se trouvait encore en période probatoire à la date de sa résiliation par l'arrêté du 18 février 2010 en litige ;

6. Considérant qu'alors même que les sapeurs-pompiers volontaires ne sont pas des fonctionnaires et quelles que soient les particularités de l'engagement dont ils bénéficient, la rupture de leur engagement avant le terme de la période probatoire dont ils bénéficient en vue notamment d'acquérir leur formation, a le caractère d'une décision retirant ou abrogeant une décision créatrice de droits qui doit, comme telle, être motivée en vertu des dispositions des articles 1er et 3 de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; que, par ailleurs, lorsqu'une telle décision, eu égard à ses motifs, doit être regardée comme ayant été prise en considération de la personne, l'intéressé doit être préalablement mis à même de prendre connaissance de son dossier en vertu de l'article 65 de la loi susvisée du 22 avril 1905 ;

7. Considérant, d'une part, que l'arrêté du 18 février 2010 par lequel le président du conseil d'administration du SDIS de l'Aude a prononcé la résiliation d'office de l'engagement de Mme B... en cours de période probatoire se borne à évoquer "l'insuffisance dans l'aptitude et la manière de servir de l'intéressée durant l'accomplissement de sa période probatoire", sans exposer aucune circonstance de fait précise se rapportant à son comportement ; que cet arrêté est ainsi insuffisamment motivé au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 imposant une motivation comportant l'énoncé de considérations de droit et de fait ;

8. Considérant, d'autre part, qu'alors que la mesure de résiliation en litige a été prise pour des motifs tenant à la personne de MmeB..., il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas soutenu par le SDIS de l'Aude, que l'intéressée aurait été mise à même de prendre connaissance de son dossier avant de faire l'objet d'une telle mesure ; que, dès lors, la procédure à l'issue de laquelle cette mesure a été prise est irrégulière ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SDIS de l'Aude n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé, d'une part, la décision orale du 29 juin 2009 suspendant Mme B...de ses fonctions de sapeur-pompier volontaire et, d'autre part, l'arrêté du 18 février 2010 ;

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens :

10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, au titre des dépens, de laisser la contribution pour l'aide juridique à la charge du SDIS de l'Aude ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeB..., qui n'est, dans la présente instance, ni partie perdante, ni tenue aux dépens, la somme que le SDIS de l'Aude demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

11. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Girard, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge du SDIS de l'Aude le versement à Me Girard de la somme de 2 000 euros ;


D E C I D E :
Article 1er : La requête du SDIS de l'Aude est rejetée.
Article 2 : Le SDIS de l'Aude versera à Me Girard une somme de 2 000 (deux mille) euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Girard renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours de l'Aude, à Mme C...B...et à Me D...Girard.
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N° 11MA04254



Abstrats

135-01-04-02-03 Collectivités territoriales. Dispositions générales. Services publics locaux. Dispositions particulières. Services d'incendie et secours.
36-12-03 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat.

Source : DILA, 21/11/2013, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Marseille

Date : 12/11/2013