Base de données juridiques

Effectuer une recherche

COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 4ème chambre - formation à 3, 17/01/2013, 12LY00984, Inédit au recueil Lebon

  • Favori

    Ajoutez ce texte à vos favoris et attribuez lui des libellés et annotations personnels

    Libellés

    Séparez les libellés par une virgule

    Annotations

  • Partager
  • Imprimer

Président : M. du BESSET

Rapporteur : M. Marc DURSAPT

Commissaire du gouvernement : Mme VINET

Avocat : SCP SOTTY - MARCHAND


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 avril 2012, présentée pour M. et Mme A...B..., domiciliés...;


M. et Mme B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100866 du 16 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de décisions implicites du 8 février 2011 et de décisions expresses du 31 mars 2011, du maire de la commune de Marsannay-le-Bois refusant de faire usage de ses pouvoirs de police pour faire cesser les nuisances sonores provenant de l'école, et des présidents du syndicat à vocation scolaire (SIVOS) du Levant et de la Communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon (COVATI) refusant de mettre en oeuvre des moyens propres à faire cesser ces nuisances ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) subsidiairement, d'ordonner une expertise acoustique ;

Ils soutiennent qu'au regard des articles R. 1334-31 et suivants du code de la santé publique, le rapport de l'expertise à laquelle ils ont fait procéder établit le caractère anormal des nuisances sonores qu'ils subissent depuis l'extension de l'école en 2007 avec création sur la parcelle n° 39, à la place d'un bois qui amortissait les bruits, d'une cour de récréation jouxtant leur propriété, et du transfert dans cette école d'activités périscolaires, de la maison d'accueil des adolescents et de " l'espace jeunes " ; qu'ainsi, les nuisances se sont accrues dans leur intensité, leur fréquence et dans leur durée ; que le jugement attaqué est insuffisamment motivé et entaché d'erreurs de droit et d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors notamment qu'il n'évoque pas l'existence du rapport d'expertise pourtant débattu par les parties et ne s'exprime pas sur l'interprétation des dispositions invoquées du code de la santé publique, ce qui revient à estimer qu'elles ne sont pas applicables aux personnes publiques ; qu'on ne peut leur opposer la circonstance que l'école existait avant leur installation dès lors qu'ils ne pouvaient imaginer qu'une cour de récréation serait aménagée à la place du bois contigu qui appartenait à un particulier ; que l'intérêt général ne justifie pas les nuisances subies alors que d'autres infrastructures existantes pourraient accueillir les activités en cause, comme c'était le cas antérieurement ; que leur préjudice est anormal et spécial ; qu'en leur qualité de tiers par rapport à l'ouvrage public que constitue l'école, ils sont fondés à en demander un fonctionnement normal au SIVOS du Levant, propriétaire et à la COVATI gestionnaire ; qu'au regard de l'illégalité des décisions des présidents de ces collectivités, et comme suite à leur annulation, il y a lieu pour la Cour, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de leur enjoindre de supprimer les nuisances en redéployant les activités périscolaires et extrascolaires sur d'autres sites et en procédant à l'édification d'un mur anti-bruits ; que de même, au regard de l'illégalité et à la suite de l'annulation de la décision du maire refusant de faire usage de ses pouvoirs de police issus de l'article L . 2212-2 du code général des collectivités territoriales, il y a lieu pour la Cour d'enjoindre à cette autorité de faire cesser ou réduire les nuisances de l'ouvrage en redéployant les activités périscolaires et extrascolaires sur d'autres sites, en procédant à des travaux d'insonorisation ou en enjoignant à toute autre personne publique compétente de le faire ;

Vu le jugement attaqué et les décisions en litige ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2012, présenté pour la commune de Marsannay-le-Bois, la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon, et le syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant, qui concluent au rejet de la requête et à la condamnation de M. et Mme B...à verser à chacun d'eux une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils font valoir que le jugement attaqué est suffisamment motivé et exempt des erreurs alléguées ; qu'il n'y a pas de nuisances accrues depuis 2007 par la suppression du bois de la parcelle n° 39 qui séparait de 25 mètres la cour de l'école de la limite de propriété des requérants, dès lors que la cour nouvellement aménagée sur cette parcelle n'est utilisée chaque jour que pour deux récréations de vingt minutes des enfants de moins de six ans ; que les activités extrascolaires et périscolaires sur la parcelle n° 42 ne génèrent pas davantage un bruit permanent et ne peuvent être assimilées avec celles de la parcelle n° 39 ; que les utilisations supplémentaires des locaux et du terrain de l'école décidées en 2008 ne génèrent pas de nuisances pour les requérants ; que l'accueil périscolaire qui existait avant l'installation des requérants est limité à la parcelle n° 42 ; que le centre de loisirs extrascolaire pour les enfants de 6 à 18 ans, est implanté sur la parcelle n° 41 encore plus éloignée des requérants et ne peut générer, compte tenu du mode d'organisation des activités, que des nuisances limitées ; que les époux B...ont fait un choix risqué en s'installant à proximité immédiate d'une école communale ; qu'ils sont les seuls riverains à se plaindre ; que le caractère excessif des bruits générés n'est établi ni dans sa fréquence, ni dans sa durée ni dans son intensité, l'expertise n'étant pas probante dès lors que les relevés n'ont été effectués que par ciel dégagé sans vent et pendant la récréation, alors qu'en cas d'intempéries et pendant les vacances le bruit est nécessairement moins important ; qu'en tout état de cause plus aucun bruit n'est émis au-delà de 18 h 30 et les nuisances à l'intérieur de la maison des requérants sont nulles fenêtres fermées ; que l'émergence globale constatée par l'expert n'est pas probante en zone rurale ; que l'argumentation sur l'existence d'autres infrastructures est sans incidence sur la légalité des décisions attaquées ; qu'il n'y a pas de préjudice anormal et spécial ni de violation de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales ;

Vu l'ordonnance en date du 13 septembre 2012 fixant la clôture d'instruction au 28 septembre 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2012 :

- le rapport de M. Dursapt,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public,

- les observations de MeC..., représentant M. et MmeB..., et de Me D..., représentant la commune de Marsannay-le-Bois, le syndicat à vocation scolaire du Levant et la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon ;


1. Considérant que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. et Mme B...tendant à l'annulation de décisions implicites du 8 février 2011 et de décisions expresses du 31 mars 2011, du maire de la commune de Marsannay-le-Bois refusant de faire usage de ses pouvoirs de police pour faire cesser les nuisances sonores provenant de l'école, et des présidents du syndicat à vocation scolaire (SIVOS) du Levant et de la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon (COVATI) refusant de mettre en oeuvre des moyens propres à faire cesser ces nuisances ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le jugement attaqué, qui analyse les moyens soulevés par les requérants, relève qu'il ne résulte pas de l'instruction que les bruits causés par les évolutions des enfants fréquentant l'école voisine constituent des nuisances anormales justifiant que le maire de la commune fasse usage de ses pouvoirs de police sur le fondement des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ou que les autorités compétentes prennent des mesures en vue de faire cesser ces nuisances ; qu'ainsi ce jugement est suffisamment motivé ;




Sur la légalité des décisions en litige :

3. Considérant que M. et Mme B...ont acquis en 2003 une propriété sur le territoire de la commune de Marsannay-le-Bois, jouxtant alors une parcelle boisée qui la séparait du bâtiment de l'école maternelle ; qu'au cours de l'année 2007 la commune a acquis ce terrain par préemption et y a aménagé une cour de récréation en prolongement d'une extension nouvelle du bâtiment scolaire ; que se plaignant des nuisances sonores générées par cette cour de récréation et par le transfert à partir de l'année 2008 d'activités péri et extra scolaires sur le site de l'école, ils ont, le 7 décembre 2010, mis simultanément en demeure de faire cesser ces nuisances sonores, le maire au titre de ses pouvoirs de police, et les présidents du syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant et de la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon, au titre du fonctionnement anormal de l'ouvrage public ; que par courrier du 31 mars 2010, le conseil de la commune et des deux établissements publics les a informés du rejet de leurs demandes par les autorités compétentes ; que pour soutenir que le Tribunal administratif aurait dû annuler ces décisions, M. et Mme B...invoquent les dispositions des articles R. 1334-30 et suivants du code de la santé publique et l'expertise acoustique à laquelle ils ont fait procéder en octobre 2010 ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 1334-30 du code de la santé publique : " Les dispositions des articles R. 1334-31 à R. 1334-37 s'appliquent à tous les bruits de voisinage à l'exception de ceux qui proviennent des infrastructures de transport et des véhicules qui y circulent, des aéronefs, des activités et installations particulières de la défense nationale, des installations nucléaires de base, des installations classées pour la protection de l'environnement ainsi que des ouvrages des réseaux publics et privés de transport et de distribution de l'énergie électrique soumis à la réglementation prévue à l'article 19 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie. " ; qu'aux termes de l'article R. 1334-31 du même code : " Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme, dans un lieu public ou privé, qu'une personne en soit elle-même à l'origine ou que ce soit par l'intermédiaire d'une personne, d'une chose dont elle a la garde ou d'un animal placé sous sa responsabilité. " et qu'aux termes de l'article R. 1334-32 : " Lorsque le bruit mentionné à l'article R. 1334-31 a pour origine une activité professionnelle autre que l'une de celles mentionnées à l'article R. 1334-36 ou une activité sportive, culturelle ou de loisir, organisée de façon habituelle ou soumise à autorisation, et dont les conditions d'exercice relatives au bruit n'ont pas été fixées par les autorités compétentes, l'atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme est caractérisée si l'émergence globale de ce bruit perçu par autrui, telle que définie à l'article R. 1334-33, est supérieure aux valeurs limites fixées au même article. " ;

En ce qui concerne les décisions du maire de la commune de Marsannay-le-Bois :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale, ... " ; qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / (...) / 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ; / (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'expertise acoustique à laquelle les requérants ont fait procéder en octobre 2010, que les bruits issus de la cour de récréation jouxtant nouvellement leur propriété, dépassent significativement le seuil d'émergence des bruits de voisinage fixé par les articles R. 1334-30 et suivants du code de la santé publique ; que, toutefois, les requérants ne contestent pas sérieusement que cette nouvelle cour n'accueille chaque jour que deux récréations d'une vingtaine de minutes et seulement en période scolaire ; que par ailleurs, l'expertise acoustique n'ayant été réalisée que pendant une de ces récréations, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que les activités périscolaires et extrascolaires également invoquées généreraient à leur égard des nuisances supplémentaires ; qu'ainsi les bruits issus de la nouvelle cour de récréation de l'école maternelle, qui sont inhérents au fonctionnement d'une telle institution, n'apparaissent pas tels, notamment dans leur durée et leur répétition, que le maire de la commune ait été tenu de faire usage des pouvoirs de police qu'il tient des dispositions précitées ;

En ce qui concerne les décisions du président de la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon :

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par convention en date du 31 décembre 2009, le syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant, dont il n'est pas contesté qu'il est propriétaire de l'école maternelle et donc de la cour dont s'agit, n'a mis à disposition de la Communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon que certains locaux situés à l'intérieur du bâtiment abritant l'école et a d'ailleurs conservé l'ensemble des droits et obligations du propriétaire ; qu'il s'en suit que le président de la communauté de communes n'était pas compétent pour réserver une suite favorable à la demande de M. et Mme B... le mettant en demeure de prendre des mesures susceptibles de mettre fin aux nuisances sonores en provenance de la cour de l'école maternelle ;

En ce qui concerne les décisions du président du syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant :

8. Considérant, en premier lieu, qu'alors même que l'émergence globale du bruit causé par les activités scolaires et périscolaires en cause dépasse parfois, notamment lors des récréations, les valeurs limites fixées à l'article R. 1334-33 du code de la santé publique, ce dépassement ne saurait avoir pour effet d'obliger le syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant à déplacer ou modifier l'ouvrage public, régulièrement implanté, où sont pratiquées ces activités qu'il ne lui appartient pas de contrôler ;

9. Considérant, en second lieu, qu'à supposer même que les requérants subissent du fait de la présence de cet ouvrage public un préjudice anormal et spécial, cette circonstance, qu'ils pourraient utilement invoquer à l'appui d'une demande d'indemnité, est sans influence sur la légalité des décisions dont ils demandent l'annulation ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par la commune de Marsannay-le-Bois, le syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant et la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon ;
DECIDE :


Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la commune de Marsannay-le-Bois, le syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant, et la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B..., à la commune de Marsannay-le-Bois, à la communauté de communes des vallées de la Tille et de l'Ignon, au syndicat intercommunal à vocation scolaire du Levant et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 20 décembre 2012, où siégeaient :
- M. du Besset, président de chambre,
- M. Dursapt et Mme Samson-Dye, premiers conseillers,
Lu en audience publique, le 17 janvier 2013.
Le rapporteur,
M. DursaptLe président,
E. du Besset
La greffière,
M.-T. Pillet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,
La greffière,
''
''
''
''
2
N° 12LY00984
nv



Abstrats

135-02-03-02-06 Collectivités territoriales. Commune. Attributions. Police. Police de la tranquillité.
49-04-02 Police administrative. Police générale. Tranquillité publique.

Source : DILA, 23/01/2013, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Lyon

Date : 17/01/2013