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Cour Administrative d'Appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 31/01/2013, 12NC00246, Inédit au recueil Lebon

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Président : Mme HERBELIN

Rapporteur : Mme Julienne BONIFACJ

Commissaire du gouvernement : M. COLLIER

Avocat : CAYLA-DESTREM


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 février 2012 et 23 mars 2012, présentés pour M. B... A..., demeurant..., par Me C... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102407 du 13 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du
3 janvier 2011 par laquelle le maire de Lorry-lès-Metz a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'ordonner sa réintégration dans un délai de 3 mois à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Lorry-lès-Metz une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement ne vise pas les pièces produites par les parties ;

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- les droits de la défense ont été méconnus, car il n'a pas obtenu la communication de son dossier individuel et il a été informé de l'engagement de la procédure disciplinaire par un courrier reçu le 12 octobre 2010, soit postérieurement à l'entretien avec le maire prévu le
7 octobre 2010 ; le rapport de saisine du conseil de discipline ne lui a pas été communiqué ;

-la composition du conseil de discipline était irrégulière en tant qu'elle comportait des agents d'un grade inférieur au sien ;

- le conseil de discipline de recours était également irrégulièrement composé ;

- la décision est entachée d'erreur de droit en ce que la qualification d'insuffisance professionnelle n'est pas constituée ; les griefs qui lui sont reprochés, à les supposer exacts, sont de nature disciplinaire, et, en outre, certains avaient déjà fait l'objet d'une sanction disciplinaire ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; au surplus, aucune mesure n'a été prise par la commune pour lui permettre d'améliorer sa manière de servir ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2012, présenté pour la commune de Lorry-lès-Metz qui conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que :

- le jugement est régulier ;

- le recours du requérant en première instance, introduit le 19 mai 2011, alors que la décision lui a été notifiée le 5 janvier 2011, était tardif et par suite irrecevable ;

- les moyens d'illégalité externe ne sont pas recevables ;

- les droits de la défense n'ont pas été méconnus ; l'entretien préalable n'était pas obligatoire et le requérant a bénéficié d'un délai suffisant entre la réception du courrier d'information et la tenue du conseil de discipline ; il a été informé de son droit à obtenir communication de son dossier et la commune n'était pas tenue de lui en adresser une copie ; une copie du rapport de saisine du conseil de discipline lui a été adressée le 2 novembre 2011 ;

- les conseils de discipline étaient régulièrement composés, les agents de maitrise présents relevaient de l'échelle de rémunération 5 et du groupe hiérarchique 2 et n'avaient donc pas un grade inférieur à celui du requérant ;

- l'arrêté est suffisant motivé en droit, comme en fait ;

- l'insuffisance professionnelle du requérant est démontrée ; les faits qui lui sont reprochés sont établis et les tâches qui lui ont été confiées relevaient de la compétence d'un agent de catégorie C ;

- la décision n'est pas entachée d'erreur de droit, les faits reprochés au requérant relevant bien de l'insuffisance professionnelle et non de fautes disciplinaires ; des fautes disciplinaires pouvaient être prises également en compte ;

- aucune formation ne lui a été refusée et le requérant ne s'est pas rendu à celles où il était inscrit ;


Vu le mémoire, enregistré le 25 juillet 2012, présenté pour M. A... qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, que :

- sa requête de première instance était recevable, la saisine du conseil de discipline de recours ayant suspendu le délai de recours contentieux ;

- tous ses moyens sont recevables, dès lors qu'il avait soulevé des moyens d'illégalité externe en première instance ;

- compte tenu du caractère très volumineux de son dossier, il lui était impossible de le consulter sur place et il était en droit d'en obtenir une copie ;

- la notion de grade est différente de celle d'échelle de rémunération ;
Vu le mémoire, enregistré le 21 décembre 2012, présenté pour la commune de Lorry-lès-Metz, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 janvier 2013, présenté pour M. A..., qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 88-547 du 6 mai 1988 portant statut particulier du cadre d'emplois des agents de maîtrise territoriaux ;

Vu le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;

Vu le décret n° 95-1018 du 14 septembre 1995 fixant la répartition des fonctionnaires territoriaux en groupes hiérarchiques en application de l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n°2006-1690 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux ;

Vu le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux ;

Vu le code de justice administrative ;



Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2013 :

- le rapport de Mme Bonifacj, président,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- les observations de M.A...,

- et les observations de Me Olszak, avocat de la commune de Lorry-lès-Metz ;
Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative,
" La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. " ; que ces dispositions ne font pas obligation aux juridictions de viser et d'analyser distinctement dans leurs décisions les mémoires de production de pièces transmis par les parties au litige qui ne contiennent ni conclusion ni moyen ; que les pièces produites par le requérant ont, au demeurant, été visées dans le jugement du tribunal administratif par la mention " Vu les autres pièces du dossier " ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le jugement qu'il attaque aurait été rendu selon une procédure irrégulière ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :
. En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983: " (...) Le fonctionnaire, à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée, a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance des défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier" ; que l'article 4 du décret du
18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux dispose que : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. L'intéressé doit disposer d'un délai suffisant pour prendre connaissance de ce dossier et organiser sa défense (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 du même décret : " Lorsqu'il y a lieu de saisir le conseil de discipline, le fonctionnaire poursuivi est invité à prendre connaissance, dans les mêmes conditions, du rapport mentionné au septième alinéa de l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984 précitée et des pièces annexées à ce rapport. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 30 septembre 2010 et reçue le 12 octobre 2010 par M.A..., le maire de la commune de Lorry-Lès-Metz a informé ce dernier qu'une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle était engagée à son encontre et qu'il avait la possibilité d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel à la mairie ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à la commune de le convoquer à un entretien préalable à son licenciement ; que, par suite, la circonstance qu'il ait reçu ce courrier postérieurement à l'entretien qu'il a eu avec le maire le 7 octobre 2010 reste sans influence sur la régularité de la procédure ; que le conseil de discipline s'étant réuni le 8 décembre 2010,
M.A..., qui au surplus a renoncé à demander le report de cette réunion, a disposé d'un délai suffisant pour préparer sa défense ;

4. Considérant, d'une part, que si M. A...soutient que ses demandes de copies de l'intégralité de son dossier individuel sont restées sans réponse, il n'établit pas avoir été empêché de consulter sur place son dossier et, à cette occasion, de prendre copie des documents utiles à sa défense ; que, dans ces conditions, la procédure prévue par les dispositions de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 a été respectée ; que, d'autre part, le rapport de saisine du conseil de discipline a été adressé au requérant le 2 novembre 2010 ; qu'ainsi M. A...n'est pas fondé à soutenir que la commune aurait méconnu les droits de la défense ;
5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 93 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le licenciement pour insuffisance professionnelle est prononcé après observation de la procédure prévue en matière disciplinaire " ; qu'aux termes de l'article 90 de la même loi: " Le conseil de discipline ne comprend en aucun cas des fonctionnaires d'un grade inférieur à celui du fonctionnaire déféré devant lui. Il comprend au moins un fonctionnaire du grade de ce dernier ou d'un grade équivalent. Les grades et emplois de la même catégorie classés par décret dans un même groupe hiérarchique sont équivalents au sens de la présente loi. " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 14 septembre 1995 dans sa rédaction alors en vigueur : " Constituent le groupe hiérarchique 1 : /1° Les fonctionnaires de catégorie C titulaires d'un grade ou d'un emploi relevant des échelles 3 ou 4 de rémunération " et aux termes de l'article 3 : " Constituent le groupe hiérarchique 2, dénommé groupe hiérarchique supérieur de la catégorie C : /1° Les fonctionnaires de catégorie C titulaires d'un grade ou d'un emploi relevant des échelles 5 ou 6 de rémunération ; / 2° Les agents de maîtrise principaux, brigadiers-chefs principaux et chefs de police municipale " ;
6. Considérant que M.A..., qui était titulaire du grade d'adjoint administratif territorial de 1ère classe, relevait, en application de l'article 2 du décret du 22 décembre 2006, de l'échelle de rémunération 4 et appartenait ainsi au groupe hiérarchique 1 ; que les agents de maîtrise et adjoints techniques principaux de 2ème classe qui appartiennent également à un cadre d'emploi de catégorie C, bénéficient de l'échelle de rémunération 5 et font ainsi partie du groupe hiérarchique 2 ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que des agents ayant un grade inférieur au sien auraient siégé au conseil de discipline du 8 décembre 2010 et au conseil de discipline régional de recours du 16 mars 2011 ;
7. Considérant, enfin, que la décision en date du 3 janvier 2011 par laquelle le maire de Lorry-Lès-Metz a prononcé le licenciement de M. A...pour insuffisance professionnelle, comporte les considérations de faits et de droit qui la fonde ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;


. En ce qui concerne la légalité interne :

8. Considérant que la décision prononçant le licenciement de M. A...a été motivée, notamment, par un comportement hiérarchique inadapté, des erreurs et négligences dans la rédaction de documents administratifs, un manque d'autonomie et une lenteur excessive dans l'exécution des ordres donnés, de mauvaises relations de travail avec ses collègues et une absence de résultats ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ces appréciations sur la manière de servir de M. A...reposent sur des faits inexacts ; que ces faits, contrairement à ce que soutient le requérant, étaient de nature à justifier un licenciement pour inaptitude professionnelle ; qu'au regard de l'importance des difficultés rencontrées par M. A...pour assumer les fonctions qui lui étaient confiées, le maire n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation des aptitudes professionnelles du requérant en prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle ; que la situation professionnelle de l'intéressé postérieure à la décision attaquée reste dans tous les cas sans influence sur la légalité de la décision en litige ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par la commune, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées ;


Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lorry-lès-Metz, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...la somme demandée par la commune de Lorry-lès-Metz au même titre ;


D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Lorry-lès-Metz présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...et à la commune de Lorry-lès-Metz.



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N° 12NC00246
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Abstrats

36-10-06-03 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement. Insuffisance professionnelle.

Source : DILA, 21/03/2013, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Nancy

Date : 31/01/2013