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Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 13/11/2013, 13DA00513, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. Yeznikian

Rapporteur : M. Olivier Yeznikian

Commissaire du gouvernement : Mme Eliot

Avocat : SCP BIGNON LEBRAY & ASSOCIES


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2013, présentée pour Mlle C...D..., demeurant..., par la SCP Bignon, Lebray ;

Mlle D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1203903 du 5 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à titre principal, à déclarer inexistante la délibération par laquelle le conseil municipal d'Artres du 11 juillet 2008 a voté une motion de défiance à son encontre et, à titre subsidiaire, à annuler cette délibération et, d'autre part, à enjoindre à la commune d'Artres de publier le dispositif du jugement à intervenir, à compter de sa notification, dans le journal municipal de la commune, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, enfin, à mettre à la charge de la commune d'Artres la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Artres la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires de la fonction publique territoriale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- les conclusions de Mme Agnès Eliot, rapporteur public,

- et les observations de Me B...A..., intervenant en qualité de collaborateur de la SCP Bignon, Lebray, avocat de MlleD... ;


Sur les conclusions tendant à ce que la délibération du conseil municipal d'Artres soit déclarée inexistante :

1. Considérant que, pour répondre aux conclusions de Mlle D...tendant à ce que la délibération attaquée soit déclarée inexistante, le tribunal administratif s'est borné à lui donner une qualification juridique en la qualifiant de voeu au sens de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, il n'a soulevé aucun moyen d'office qui entacherait cette partie du jugement d'irrégularité ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. / Il donne son avis toutes les fois que cet avis est requis par les lois et règlements, ou qu'il est demandé par le représentant de l'Etat dans le département. / (...) / Le conseil municipal émet des voeux sur tous les objets d'intérêt local " ; qu'aux termes de l'article L. 2122-18 du même code : " Le maire est seul chargé de l'administration (...) " ;

3. Considérant que l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires de la fonction publique territoriale, dans sa version alors en vigueur, dispose que : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / l'avertissement ; / le blâme ; / (...) / Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. Ils sont effacés automatiquement au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période. / (...) / Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline. (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en adoptant, par sa délibération du 11 juillet 2008, une " motion de défiance " à l'encontre de MlleD..., alors fonctionnaire territorial exerçant les fonctions de secrétaire de mairie dans la commune, le conseil municipal d'Artres (Nord) a exprimé sa désapprobation et sa perte de confiance à l'encontre de cet agent eu égard à sa manière de servir lors de la préparation du compte administratif de 2007 et du budget pour l'année 2008, en vue de leur adoption par le conseil municipal ; que le conseil municipal a également décidé, par cette délibération, que cette mesure serait inscrite au registre des actes administratifs de la commune ; qu'au demeurant, le maire de la commune a ensuite fait état de cette délibération dans un éditorial du journal municipal d'octobre 2008 et cet agent a quitté la commune postérieurement à cette délibération ;

5. Considérant que s'il pouvait appartenir au conseil municipal de signaler l'existence d'irrégularités ou de négligences dans le fonctionnement des services communaux dont la secrétaire de mairie assumait la charge ou d'adresser des voeux pour que le maire prenne des mesures à l'égard de la secrétaire de mairie placée sous son autorité, le conseil municipal, en infligeant à MlleD..., dans les termes où il l'a fait, en réalité une mesure à caractère disciplinaire - qui s'apparente d'ailleurs à un blâme -, a excédé ses compétences au regard des dispositions de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales et a également méconnu celles de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; que, cependant, cette illégalité n'entache pas l'acte attaqué d'inexistence ; que, par suite, Mlle D...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à ce que la délibération du 11 juillet 2008 la concernant soit déclarée nulle et de nul effet ;


Sur les conclusions tendant à ce que la délibération du conseil municipal d'Artres soit annulée pour excès de pouvoir :

6. Considérant que l'acte attaqué qui, ainsi qu'il a été dit au point 5, constitue une mesure disciplinaire, a le caractère d'une décision individuelle qui devait être notifiée à la personne concernée ; que la commune n'établit ni n'allègue avoir notifié la délibération à Mlle D... ; que si elle a été inscrite au registre des actes de la commune d'Artres et si Mlle D..., alors secrétaire de mairie de cette commune, a pu en prendre connaissance après son retour de congés, il est constant que cette décision ne comportait pas la mention des voies et délais de recours ; qu'à la date à laquelle Mlle D...a saisi le tribunal administratif de Lille, la forclusion du délai de recours ne lui était pas opposable ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune doit être écartée ;

7. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, la " motion de défiance " votée par le conseil municipal d'Artres à l'encontre de Mlle D...a le caractère d'une mesure disciplinaire ; que, par suite, en la prononçant, le conseil municipal d'Artres a excédé les limites de sa compétence au regard des dispositions de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales et a également méconnu celles de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à l'annulation de cette délibération ainsi que sur l'autre moyen de la demande, que la délibération du conseil municipal d'Artres du 11 juillet 2008 concernant Mlle D...doit être annulée ;


Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif d'ordonner la publication de ses décisions aux frais de l'une des parties ; que les conclusions en ce sens présentées par Mlle D... sont irrecevables ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MlleD..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune d'Artres demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune d'Artres une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mlle D... et non compris dans les dépens ;



DÉCIDE :



Article 1er : Le jugement du 5 février 2013 du tribunal administratif de Lille est annulé.


Article 2 : La délibération du 11 juillet 2008 du conseil municipal d'Artres est annulée.


Article 3 : La commune d'Artres versera à Mlle D...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle D...ainsi que les conclusions de la commune d'Artres présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.


Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle C...D...et à la commune d'Artres.

Copie sera adressée pour information au préfet du Nord.
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N°13DA00513



Abstrats

135-02-01-02-01-03 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Conseil municipal. Délibérations.
135-02-06 Collectivités territoriales. Commune. Agents communaux (voir : Fonctionnaires et agents publics).
36-09-02-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Caractère disciplinaire d'une mesure. Mesure présentant ce caractère.

Source : DILA, 19/11/2013, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Douai

Date : 13/11/2013