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CAA de NANCY, 2ème chambre - formation à 3, 25/06/2015, 13NC02288, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. MARTINEZ

Rapporteur : Mme Laurie GUIDI

Commissaire du gouvernement : M. GOUJON-FISCHER

Avocat : GARTNER


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Sarl Schiocchet Excursions a demandé au tribunal administratif de Nancy l'annulation des marchés publics correspondant aux lots nos 10 et 11 relatifs à la mise en oeuvre du schéma de transports interurbains de la Meuse conclus respectivement avec la société Rapides de la Meuse et la société Dupasquier et la condamnation du département de la Meuse à lui verser la somme de 4 517 819,80 euros en réparation du préjudice résultant du rejet de sa candidature augmentée des intérêts moratoires capitalisés.

Par un jugement n° 1000607 du 22 octobre 2013, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête n° 1302288 et un mémoire, enregistrés le 22 décembre 2013 et le 21 mai 2015, la Sarl Schiocchet Excursions, représentée par Me Philippot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 22 octobre 2013 ;

2°) d'annuler les marchés publics correspondant aux lots nos 10 et 11 relatifs à la mise en oeuvre du schéma de transports interurbains de la Meuse conclus respectivement avec la société Rapides de la Meuse et la société Dupasquier ;

3°) de condamner le département de la Meuse à lui verser la somme de 4 517 819,80 euros en réparation du préjudice résultant du rejet de sa candidature augmentée des intérêts moratoires capitalisés ;

4°) avant dire droit, d'enjoindre au département de la Meuse de communiquer les éléments constitutifs des contrats relatifs aux lots nos 10 et 11 ainsi que les éventuelles demandes de précisions faites sur le fondement de l'article 59-I du code des marchés publics ;

5°) de mettre à la charge du département de la Meuse une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La Sarl Schiocchet Excursions soutient que :

- l'estimation des kilométrages déterminant l'étendue des marché est insuffisante, alors que sa candidature a été analysée au regard de plusieurs éléments extrêmement précis ; l'avis d'appel public à la concurrence aurait dû identifier plus précisément les services résultant de la mise en oeuvre du nouveau schéma départemental ainsi que le montant estimatif des marchés ;

- la publication rectificative au bulletin officiel des annonces des marchés publics du nombre de kilomètres estimatif annuel doit être considérée comme un élément substantiel de la consultation et être assimilée à une modification substantielle des marchés devant entraîner un report de la clôture des offres ;

- le département n'a pas demandé aux candidats de remplir les rubriques facultatives du formulaire DC5 ; le renseignement spontané de certaines rubriques n'autorisait pas le département à se servir de ces informations pour analyser sa candidature ;

- sa candidature a été analysée à l'aune de documents et selon des critères qui ne figuraient pas dans l'avis d'appel public à la concurrence ;

- les informations relatives à la comparaison entre les moyens nécessaires à l'exploitation du lot et les moyens fournis par l'entreprise basée sur son chiffre d'affaire et sur les moyens fournis n'ont été demandées par le département ni dans l'avis d'appel public à la concurrence, ni dans le règlement de consultation ;

- il ressort clairement des dossiers de candidature des attributaires des lots que ces derniers n'ont pas fourni d'éléments sur le nombre de véhicules ou sur le nombre de chauffeurs dont ils disposaient ;

- la prise en compte de ses seules capacités financières constitue une erreur manifeste d'appréciation et révèle une volonté claire de fermer les marchés publics aux petites et moyennes entreprises ;

- le département a raisonné sur une offre globale portant sur l'ensemble des deux lots alors qu'il a procédé lot par lot pour les deux attributaires des lots concernés ;

- le département a commis une erreur manifeste d'appréciation en retenant comme attributaires des candidats n'ayant pas les compétences requises, ceux-ci ne disposant pas de tous les véhicules nécessaires à l'exécution du marché ;

- des niveaux minimaux de capacité n'ayant pas été publiés dans l'avis d'appel public à la concurrence ont été irrégulièrement utilisés pour rejeter sa candidature ;

- le département a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne tenant pas compte de la structure du secteur économique pour procéder à l'allotissement des marchés, favorisant ainsi illégalement les entreprises de grosse taille au détriment des petites et moyennes entreprises ;

- les certificats de bonne exécution des marchés effectués sur les trois dernières années n'ont pas été demandés par l'avis d'appel public à la concurrence, ni par le document de consultation ; la fourniture de ces certificats a constitué un critère supplémentaire qui a irrégulièrement fait l'objet d'un examen par la commission d'appel d'offres ;

- elle a droit à être indemnisée dès lors qu'elle avait de fortes chances d'obtenir les marchés concernés, son offre étant régulière ;

- son préjudice doit être fixé à 4 517 819,80 euros.


Par un mémoire en défense enregistré le 7 mai 2014, le département de la Meuse, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la Sarl Schiocchet Excursions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Le département de la Meuse fait valoir que :

- l'objet du marché était suffisamment précisé ; le département n'était pas tenu de faire figurer le montant estimatif du marché dans l'avis d'appel public à la concurrence ; les précisions complémentaires figurent dans le document de consultation ;

- la précision du kilométrage estimatif annuel ne constitue pas une modification substantielle de l'objet du marché nécessitant de respecter un nouveau délai de 52 jours à compter de l'envoi à publication de l'avis rectificatif ;

- l'avis d'appel public à la concurrence a renvoyé au formulaire DC5 et à toutes ses rubriques ;

- la notion de structure de l'entreprise n'est pas un critère extérieur à la consultation et synthétise seulement les capacités des candidats ;


- le chiffre d'affaires est un élément d'analyse tout à fait pertinent qui permet de comparer les performances des entreprises dans un même secteur ;

- les certificats de bonne exécution étaient demandés au titre de l'avis d'appel public à la concurrence et du règlement de consultation ;

- la Sarl Schiocchet Excursions n'avait ni les moyens nécessaires à l'accomplissement des prestations, ni les capacités d'y remédier en démontrant la possibilité pour elle d'acquérir le matériel nécessaire à leur exécution ;

- la prise en compte des capacités financières n'a nullement empêché les petites et moyennes entreprises de candidater ;

- le département a procédé à une analyse distincte pour chaque lot ;

- les candidatures des sociétés attributaires ont fait l'objet du même examen que la société Schiocchet relatif à leurs capacités techniques et financières ;

- les précisions complémentaires concernant le nombre de véhicules, de conducteurs ainsi que du pourcentage d'investissement, nécessaires à la bonne exécution des marchés qui figuraient dans le dossier de consultation des entreprises à titre estimatif ne constituaient pas des niveaux minimum de capacités requis a posteriori ;

- la société requérante n'apporte aucun élément pertinent pour démontrer que le département aurait avantagé dans le cadre de l'allotissement certaines entreprises au détriment des petites et moyennes entreprises ;

- la société requérante n'avait aucune chance sérieuse de remporter les marchés auxquels elle a candidaté ; même si sa candidature avait été retenue, son offre n'aurait pu qu'être écartée du fait de la production par cette dernière d'un document en allemand non accompagné d'une traduction française ;

- les marchés en cause étant des marchés à bon de commande sans montant minimum, aucune commande n'est légalement garantie au titulaire du marché et, par suite aucune marge bénéficiaire, ce qui rend le préjudice invoqué incertain ;

- l'estimation du préjudice est abusive et s'élèverait plus vraisemblablement à 170 674 euros.


Par ordonnance du 29 avril 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 21 mai 2015.


Vu :
- les autres pièces du dossier ;


Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Guidi,
- les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public,
- et les observations de Me Philippot, avocat de la société Schiocchet Excursions.


Me Philippot, pour la société Schiocchet Excursions, a présenté une note en délibéré enregistrée le 16 juin 2015.

1. Considérant que le département de la Meuse a lancé sous forme d'appel d'offres ouvert une consultation relative à la mise en oeuvre du schéma des transports interurbains de la Meuse par voie d'appel public à la concurrence publié au journal officiel de l'Union européenne et au bulletin officiel d'annonces des marchés publics ; que ce marché a été subdivisé en 18 lots donnant chacun lieu à la conclusion d'un contrat distinct ; que la candidature de la société Schiocchet Excursions à l'attribution des lots n°10 et 11 a été rejetée au motif que " au vu du chiffre d'affaires, de la structure de l'entreprise, il apparaît que la candidate n'a pas les capacités structurelles et financières pour répondre aux lots 10 et 11 " ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, saisi d'un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat par un concurrent évincé, il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences ; qu'il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité éventuellement commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit d'accorder des indemnisations en réparation des droits lésés, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat ;

3. Considérant qu'à l'appui de sa demande devant le tribunal administratif de Nancy, la Sarl Schiocchet Excursions soutenait notamment que le département de la Meuse lui avait irrégulièrement opposé l'absence de régularisation de sa candidature par la production d'un certificat de bonne exécution, alors que certains candidats à l'attribution des marchés publics relatifs à la mise en oeuvre du schéma des transports interurbains de la Meuse ont pu régulariser leur candidature postérieurement à la date de remise des offres ; que ce motif ne figurant toutefois pas parmi les motifs de rejet de la candidature de la Sarl Schiocchet Excursions, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en ne se prononçant pas sur ce moyen qui était inopérant ;


Sur les conclusions à fin d'annulation et les conclusions indemnitaires :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 du code des marchés publics : " I. - La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avec précision avant tout appel à la concurrence ou toute négociation non précédée d'un appel à la concurrence en prenant en compte des objectifs de développement durable. Le ou les marchés ou accords-cadres conclus par le pouvoir adjudicateur ont pour objet exclusif de répondre à ces besoins (...) " ; qu'aux termes de l'article 77 du même code : " I. - Un marché à bons de commande est un marché conclu avec un ou plusieurs opérateurs économiques et exécuté au fur et à mesure de l'émission de bons de commande. Lorsqu'un marché à bons de commande est attribué à plusieurs opérateurs économiques, ceux-ci sont au moins au nombre de trois, sous réserve d'un nombre suffisant de candidats et d'offres " ; que les marchés à bons de commande doivent être regardés comme des accords-cadres au regard du droit de l'Union européenne ; qu'aux termes de l'article 36, relatif à la rédaction et aux modalités de publication des avis d'appel public à la concurrence, de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services : " 1. Les avis comportent les informations mentionnées à l'annexe VII A et, le cas échéant, tout autre renseignement jugé utile par le pouvoir adjudicateur, selon le format des formulaires standard adoptés par la Commission (...) " ; que la rubrique 6 c relative aux marchés publics de services de l'annexe VII A prévoit que : " dans le cas d'accords-cadres, indiquer également la durée de l'accord-cadre, la valeur totale des prestations estimée pour toute la durée de l'accord-cadre ainsi que, dans toute la mesure du possible, la valeur et la fréquence des marchés à passer " ; qu'il s'ensuit que l'avis d'appel d'offres portant sur les marchés litigieux doit comporter les informations prévues par la directive 2004 / 18 / CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 et être conforme au modèle fixé par le règlement (CE) n° 1564 / 2005 de la Commission du 7 septembre 2005, ainsi que le prévoit d'ailleurs l'article 40 du code des marchés publics ;

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions précitées, que le règlement de consultation des marchés publics de transports en vue de la mise en oeuvre du schéma des transports interurbains de la Meuse a pu légalement se borner à préciser, contrairement à ce que soutient la requérante, que " les prestations du marché sont exécutées par l'émission de bons de commande successifs selon les besoins " et que " chaque bon de commande (...) précise celles des prestations décrites dans le marché dont l'exécution est demandée et en détermine la quantité " ; que le département de la Meuse demeure néanmoins tenu de faire figurer, dans le cadre " Quantité ou étendue globale " de l'avis d'appel d'offres, selon le modèle fixé par le règlement communautaire mentionné ci-dessus, à titre indicatif et prévisionnel, les éléments permettant d'apprécier l'étendue du marché ; que s'il est constant que l'avis d'appel d'offres initial était dépourvu de toute indication relative au kilométrage annuel de chacun des lots, ce document a été complété par un avis rectificatif publié au journal officiel de l'Union européenne et au bulletin officiel des annonces des marchés publics du 23 octobre 2010, mentionnant notamment le kilométrage estimatif annuel afférent à chaque lot ; qu'eu égard à la nature et aux modalités d'exécution des prestations de transport en cause, l'avis d'appel public à la concurrence doit ainsi être regardé comme ayant suffisamment précisé l'étendue du marché ; que si la société requérante fait valoir que cette indication aurait dû être complétée par une estimation du nombre de véhicules et de chauffeurs, l'estimation du kilométrage total parcouru résulte nécessairement des hypothèses retenues par le pouvoir adjudicateur relatives au nombre de tournées et à la longueur des trajets empruntés ; que ces précisions complémentaires étaient au demeurant à la disposition des candidats dans le dossier de consultation des entreprises ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence d'estimation de l'étendue du marché dans les documents de la consultation et l'avis d'appel public à la concurrence doit être écarté ;

6. Considérant, d'autre part, que si la société requérante fait valoir que l'information complémentaire ainsi apportée par l'avis rectificatif d'appel d'offres aurait dû conduire à différer la date limite de remise des offres en ménageant à cet effet un délai de cinquante deux jours conformément aux dispositions de l'article 57 du code des marchés publics, une telle prolongation de la date limite ne s'imposerait qu'en cas de modification substantielle apportée à l'objet et aux conditions initiales du marché ; que, toutefois, la simple précision du kilométrage estimatif à parcourir annuellement par les véhicules de transport en commun, apportée par l'avis rectificatif du 23 octobre 2010 ne saurait être regardée comme emportant une modification substantielle de l'objet et des conditions du marché ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du I de l'article 45 du code des marchés publics : " Le pouvoir adjudicateur ne peut exiger des candidats que des renseignements ou documents permettant d'évaluer leur expérience, leurs capacités professionnelles, techniques et financières ainsi que des documents relatifs aux pouvoirs des personnes habilitées à les engager (...). La liste de ces renseignements et documents est fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie. Lorsque le pouvoir adjudicateur décide de fixer des niveaux minimaux de capacité, il ne peut être exigé des candidats que des niveaux minimaux de capacité liés et proportionnés à l'objet du marché. Les documents, renseignements et les niveaux minimaux de capacité demandés sont précisés dans l'avis d'appel public à concurrence ou, en l'absence d'un tel avis, dans les documents de la consultation (...) " ; qu'aux termes du I de l'article 52 de ce code : " (...) Les candidatures qui n'ont pas été écartées en application des dispositions de l'alinéa précédent sont examinées au regard des niveaux de capacités professionnelles, techniques et financières mentionnées dans l'avis d'appel public à la concurrence, ou, s'il s'agit d'une procédure dispensée de l'envoi d'un tel avis, dans le règlement de la consultation. Les candidatures qui ne satisfont pas à ces niveaux de capacité sont éliminées " ; qu'enfin, aux termes du II de l'article 58 dudit code : " Au vu des seuls renseignements relatifs aux candidatures, les candidatures qui ne peuvent être admises en application des dispositions de l'article 52 sont éliminées. Cette élimination est effectuée par la commission d'appel d'offres pour les collectivités territoriales (...) " ; qu'aux termes de l'article de l'arrêté du 28 août 2006 pris en application de l'article 45 du code des marchés publics : " A l'appui des candidatures et dans la mesure où ils sont nécessaires à l'appréciation des capacités des candidats, le pouvoir adjudicateur ne peut demander, en application de l'article 45 du code des marchés publics (...), que le ou les renseignements et le ou les documents suivants : / déclaration concernant le chiffre d'affaires global et le chiffre d'affaires concernant les fournitures, services ou travaux objet du marché, réalisés au cours des trois derniers exercices disponibles (...), déclaration indiquant l'outillage, le matériel et l'équipement technique dont le candidat dispose pour la réalisation de marchés de même nature " ; qu'il résulte de ces dispositions que le pouvoir adjudicateur est tenu de contrôler les garanties professionnelles, techniques et financières des candidats à l'attribution d'un marché public ;

8. Considérant, d'une part, que pour contrôler, en application du I de l'article 52 du code des marchés publics, les garanties professionnelles, techniques et financières de la Sarl Schiocchet Excursions, le département de la Meuse a examiné sa candidature en comparant les moyens fournis par la société aux moyens nécessaires à l'exploitation des lots 10 et 11 ; que le rapport d'analyse des candidatures relève que la capacité de la Sarl Schiocchet Excursions est inférieure de 61% et 41,6% par rapport aux moyens nécessaires à l'exploitation des lots s'agissant du nombre de véhicules et de 72,2% et 58,3 % s'agissant du nombre de conducteurs ; que le même rapport indique également que les moyens financiers de la société sont inférieurs de 83% et de 62,6% par rapport aux besoins d'investissements de la société nécessaires à l'acquisition du nombre de véhicules requis pour l'exécution de ces marchés ; qu'en se fondant sur ces données, résultant tant des éléments requis par les documents de consultation que des informations fournies par la société dans le cadre de la présentation de son offre, pour estimer qu' " au vu du chiffre d'affaires et de la structure de l'entreprise, il apparaît que le candidat n'a pas les capacités structurelles et financières pour répondre aux lots 10 et 11 ", le département de la Meuse n'a, ni fait application de seuils minimaux de capacité financière qui n'était pas prévus par les documents de consultation, ni porté atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats ; qu'en outre, en rejetant la candidature de la société requérante aux motifs de l'insuffisance de ses moyens en personnel et en matériel et de son incapacité financière à faire face à l'investissement nécessité par les deux marchés pour lesquels elle avait déposé une offre, le département de la Meuse n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux éléments qu'il a ainsi pris en considération sur le fondement des dispositions précitées de l'article 45 du code des marchés publics ; que la société soutient également que le département de la Meuse a entaché d'erreur manifeste l'appréciation portée sur les capacités financières des autres candidats en violation du principe d'égalité d'accès à la commande publique en ne relevant pas, dans le rapport d'analyse des candidatures, le nombre d'autocars et de chauffeurs dont disposaient ses concurrentes ; qu'il résulte cependant de l'instruction qu'eu égard au montant des chiffres d'affaires annuels des autres candidates, en particulier celui de la société Dupasquier et de la société Les Rapides de Meuse attributaires des lots 10 et 11, très supérieurs à celui de la société Schiocchet Excursions, le département a pu examiner leur candidatures sans comparer le nombre de véhicules et de chauffeurs dont elles disposaient à ceux requis pour l'exécution des lots 10 et 11 ; que contrairement à ce que soutient la Sarl Schiocchet Excursions, ces deux entreprises disposaient du nombre de véhicules requis par les lots 10 et 11 ; que, par suite, le département n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ni porté atteinte au principe d'égalité de traitement dans le cadre de l'examen des candidatures ;

9. Considérant, d'autre part, que contrairement à ce que soutient la Sarl Schiocchet Excursions, l'article 5 du règlement de consultation a dressé, en application des dispositions précitées, la liste du contenu du dossier de consultation des entreprises comprenant notamment des déclarations DC6 et DC5 relatives au chiffre d'affaires global et à la part du chiffre d'affaires concernant les services objet du marché réalisés au cours des trois derniers exercices disponibles ; qu'en renvoyant aux formulaires DC6 et DC5 dans l'avis d'appel public à la concurrence, le département de la Meuse a nécessairement signifié aux entreprises que les renseignements exigés à l'appui de leur candidature correspondaient à toutes les rubriques de ces formulaires ; que, par suite, la société n'est pas fondée à soutenir que les renseignements, et notamment les certificats de bonne exécution, qui lui ont été demandés n'étaient pas prévus par les documents de consultation ; que la Sarl Schiocchet Excursions ne saurait par ailleurs utilement faire valoir que le défaut de traduction en français d'un document de spécifications techniques des cars ne pouvait figurer parmi les motifs de rejet de sa candidature, dès lors qu'un tel motif ne figure pas parmi ceux retenus par le département pour rejeter sa candidature ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 10 du code des marchés publics : " Afin de susciter la plus large concurrence, et sauf si l'objet du marché ne permet pas l'identification de prestations distinctes, le pouvoir adjudicateur passe le marché en lots séparés dans les conditions prévues par le III de l'article 27. A cette fin, il choisit librement le nombre de lots, en tenant notamment compte des caractéristiques techniques des prestations demandées, de la structure du secteur économique en cause et, le cas échéant, des règles applicables à certaines professions. Les candidatures et les offres sont examinées lot par lot (...) " ;

11. Considérant que si la Sarl Schiocchet Excursions soutient que le département de la Meuse a commis une erreur manifeste d'appréciation dans la définition des lots des marchés publics de transports en vue de la mise en oeuvre du schéma des transports interurbains de la Meuse en ne tenant pas compte de la structure du secteur économique du transport routier de personnes et en favorisant les entreprises les plus importantes au détriment des petites et moyennes entreprises, il résulte cependant de l'instruction que l'allotissement a été réalisé sur une base géographique cohérente avec l'objet du marché ; que contrairement à ce que soutient la société, la commission d'appel d'offres n'a pas examiné la candidature de la Sarl Schiocchet Excursions globalement mais lot par lot, notamment en ce qui concerne ses capacités financières et le nombre de véhicules dont elle disposait ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 10 du code des marchés publics doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin en tout état de cause de procéder aux mesures d'instructions sollicitées par la requérante, que les conclusions de la Sarl Schiocchet Excursions tendant à l'annulation des marchés portant sur les lots 10 et 11 relatifs à la mise en oeuvre du schéma des transports interurbains conclus par le département de la Meuse et à la condamnation du département de la Meuse à l'indemniser du préjudice résultant de son éviction irrégulière doivent être rejetées ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Sarl Schiocchet Excursions n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le département de la Meuse qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y lieu en revanche de condamner la Sarl Schiocchet Excursions à verser une somme de 1 500 euros au département de la Meuse en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la Sarl Schiocchet Excursions est rejetée.

Article 2 : La Sarl Schiocchet Excursions versera une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au département de la Meuse en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl Schiocchet Excursions et au département de la Meuse.


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N°13NC02288



Abstrats

39-02-005 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Formalités de publicité et de mise en concurrence.
39-02-02 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Mode de passation des contrats.

Source : DILA, 09/07/2015, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Nancy

Date : 25/06/2015