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Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 15/06/2012, 348258, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. Jacques Arrighi de Casanova

Rapporteur : Mme Marie Gautier-Melleray

Commissaire du gouvernement : Mme Sophie-Justine Lieber

Avocat : SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 avril et 8 juillet 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Astrid A, demeurant à ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0901098-0901332 du 28 septembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant, en premier lieu, à l'annulation de la décision du 29 septembre 2008 par laquelle le centre hospitalier d'Auch l'a placée en congé de maladie ordinaire du 17 avril au 10 juillet 2008 puis à compter du 17 juillet 2008, en deuxième lieu, à l'annulation de la décision du 25 mars 2009 par laquelle le centre hospitalier a prolongé au-delà de six mois le congé de maladie ordinaire dont elle bénéficiait à compter du 17 juillet 2008, et, en troisième lieu, à l'annulation de la décision du 30 avril 2009 par laquelle le centre hospitalier a confirmé son maintien en congé de maladie ordinaire plutôt qu'en congé de maladie pour accident de service ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;




Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie Gautier-Melleray, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme A et de Me Copper-Royer, avocat du centre hospitalier d'Auch,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme A et à Me Copper-Royer, avocat du centre hospitalier d'Auch ;




Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " (...) si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales " ;

Considérant qu'un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet accident du service, le caractère d'un accident de service ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'alors qu'elle procédait le 16 juillet 2008 au couchage d'une patiente hémiplégique, Mme A, aide-soignante au centre hospitalier d'Auch, a été victime d'une douleur à l'épaule droite et qu'elle a été ainsi, à compter de cette date, dans l'impossibilité de continuer à exercer ses fonctions ; que, pour rejeter les demandes de l'intéressée tendant à l'annulation des décisions des 29 septembre 2008, 25 mars 2009 et 30 avril 2009 par lesquelles le centre hospitalier d'Auch l'a placée, non pas en congé de maladie pour accident de service, mais en congé de maladie ordinaire à compter du 17 juillet 2008, puis a prolongé au-delà de six mois le congé de maladie ordinaire dont elle bénéficiait à compter du 17 juillet 2008 et, enfin, a confirmé son maintien en congé de maladie ordinaire, le tribunal administratif de Pau a jugé qu'il ne s'agissait pas d'un accident de service, au motif que Mme A, qui bénéficiait depuis un précédent accident de service d'un poste aménagé ne comportant pas de manutention, avait commis une imprudence en transférant, de sa propre initiative, la patiente de son fauteuil à son lit ;

Considérant qu'en statuant ainsi, alors que les agissements ainsi relevés, commis à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, ne constituaient pas une faute détachable du service, le tribunal administratif a commis une erreur de qualification juridique ; que, par suite, Mme A est fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Pau du 28 septembre 2010 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en l'absence de faute personnelle détachable du service, l'accident dont Mme A a été victime le 16 juillet 2008 présente le caractère d'un accident de service ; que c'est dès lors à tort que le centre hospitalier d'Auch a refusé de la faire bénéficier des dispositions citées ci-dessus de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 ; que Mme A est, par suite, fondée à demander l'annulation de la décision du 29 septembre 2008 en tant que, par cette décision, le centre hospitalier d'Auch l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 17 juillet 2007, de la décision du 25 mars 2009 par laquelle il l'a maintenue en congé de maladie ordinaire au-delà d'une durée de six mois et de la décision du 30 avril 2009 par laquelle il a rejeté son recours gracieux tendant à l'annulation de ces décisions ;

Considérant, en revanche, qu'en l'absence de moyen contestant la décision du centre hospitalier d'Auch du 29 septembre 2008 en tant que cette décision l'a placée en congé de maladie ordinaire du 17 avril au 10 juillet 2008, Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de cette décision en tant qu'elle a cette portée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; que la présente décision implique que le centre hospitalier d'Auch prenne une nouvelle décision reconnaissant l'imputabilité au service de l'accident du 16 juillet 2008 ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit aux conclusions présentées à cette fin par Mme A, en enjoignant au centre hospitalier d'Auch de prendre une telle décision dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'en revanche la présente décision n'implique pas qu'il soit enjoint au centre hospitalier d'Auch de prendre une décision de même nature pour une période antérieure à l'accident du 16 juillet 2008 ;

Considérant, enfin, que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par l'avocat de Mme A, dès lors qu'elles sont dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie à l'instance ; que ces même dispositions font également obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;



D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 28 septembre 2010 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : La décision du 29 septembre 2008 du directeur du centre hospitalier d'Auch, en tant qu'elle place Mme A en congé de maladie ordinaire à compter du 17 juillet 2007, ainsi que ses décisions des 25 mars 2009 et 30 avril 2009 sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au centre hospitalier d'Auch de prendre, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, une décision reconnaissant l'imputabilité au service de l'accident dont a été victime Mme A le 16 juillet 2008.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi et des demandes de Mme A sont rejetés.

Article 5 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier d'Auch au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Astrid A et au centre hospitalier d'Auch.


Source : DILA, 02/07/2012, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Conseil d'État

Date : 15/06/2012