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Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 26/12/2012, 357152, Inédit au recueil Lebon

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Rapporteur : M. Marc Pichon de Vendeuil

Commissaire du gouvernement : M. Xavier De Lesquen

Avocat : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 février et 25 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'association France énergie éolienne, dont le siège est 13-15, rue de la Baume à Paris (75008) ; l'association France énergie éolienne demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-984 du 23 août 2011 modifiant la nomenclature des installations classées ainsi que la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le Premier ministre sur son recours gracieux formé le 25 octobre 2011 et tendant au retrait de ce décret ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens, y compris la contribution à l'aide juridique prévue à l'article R. 761-1 du même code ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n°2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

Vu la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;

Vu la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n°183/184 QPC du 14 octobre 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de l'association France Energie Eolienne,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de l'association France Energie Eolienne ;




Sur la légalité externe:

1. Considérant, en premier lieu, que la circonstance, à la supposer établie, qu'aucun expert en matière d'éoliennes n'aurait siégé lors de l'examen du projet de décret par le Conseil supérieur de prévention des risques technologiques qui, en application du premier alinéa de l'article L. 511-2 du code de l'environnement, a été consulté préalablement à l'adoption du décret litigieux, est dépourvue d'incidence sur la régularité de l'avis émis dès lors qu'une telle présence n'était requise par aucun texte ;

2. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que le décret a été pris " sans être précédé d'un rapport du ministre chargé des installations classées " n'est pas assorti des précisions de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé ; qu'il ne peut, par suite, qu'être écarté ;

3. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu du second alinéa de l'article L. 511-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, les projets de décrets de nomenclature font l'objet d'une publication, éventuellement par voie électronique, avant transmission pour avis au Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques ; que si, par sa décision n°183/184 QPC du 14 octobre 2011, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution cet alinéa, il a décidé de reporter l'effet de son abrogation au 1er janvier 2013, sans remettre en cause les effets passés de cette disposition ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'écarter du présent litige l'application du second alinéa de l'article L. 511-2 ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de décret a été publié sur le site du ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement du 10 au 29 mai 2011; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas été publié conformément aux dispositions de l'article L. 511-2 du code de l'environnement doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L. 553-1 du code de l'environnement, issu du VI de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, et du 3° de l'article 10 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité auquel renvoient ces dispositions, que le législateur a entendu que les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent constituant des unités de production composées d'un nombre de machines électrogènes au moins égal à cinq et dont la hauteur des mâts dépasse cinquante mètres soient soumises au régime de l'autorisation des installations classées pour la protection de l'environnement prévu par l'article L. 511-2 du même code ; que, toutefois, il ne résulte ni de ces dispositions, ni des travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi du 12 juillet 2010 que le législateur ait entendu priver le Premier ministre de l'exercice du pouvoir de police spéciale qu'il détient en vertu de l'article L. 511-2 du code de l'environnement pour soumettre à autorisation, enregistrement ou déclaration les autres installations présentant des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit encore pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la circonstance que le décret attaqué a soumis à autorisation au titre de la réglementation des installations classées non seulement, ainsi que le prévoit l'article L. 553-1 du code de l'environnement, les installations mentionnées par cet article mais également, sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-2 du même code, d'autres installations, n'est pas de nature à l'entacher d'illégalité ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le décret aurait, en soumettant à autorisation d'autres installations que celles expressément définies à l'article L. 553-1, méconnu les dispositions de cet article doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment d'un rapport de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques de décembre 2011, que l'implantation et l'exploitation des installations définies par le décret attaqué présentent des risques et inconvénients, de la nature de ceux qu'énonce l'article L. 511-1 du code de l'environnement, pour la sécurité et la santé publiques, la faune ainsi que pour la préservation de l'environnement et sont susceptibles de porter atteinte aux paysages ; qu'ainsi, l'auteur du décret n'a pas commis d'erreur manifeste, dans l'appréciation à laquelle il s'est livré des dangers ou inconvénients pouvant découler du fonctionnement de ces installations pour les intérêts protégés par cet article, en soumettant, d'une part, au régime de l'autorisation les installations d'éoliennes comprenant au moins un aérogénérateur dont le mât a une hauteur supérieure ou égale à 50 mètres ainsi que celles comprenant un aérogénérateur dont le mât a une hauteur comprise en 12 et 50 mètres et une puissance totale installée supérieure ou égale à 20 MW et, d'autre part, au régime de la déclaration les installations d'éoliennes comprenant des aérogénérateurs d'une hauteur comprise entre 12 et 50 mètres et d'une puissance inférieure à 20 MW ;

7. Considérant, enfin, que la soumission des installations terrestres de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent à la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement n'impose pas des sujétions constitutives d'une entrave au développement de l'exploitation de l'énergie mécanique du vent et ne crée en particulier pas des règles nationales qui ne seraient pas proportionnées et nécessaires ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait contraire aux dispositions et aux objectifs définis par la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables doit être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de l'association France énergie éolienne doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ;










D E C I D E :
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Article 1er : La requête de l'association France énergie éolienne est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association France énergie éolienne, au Premier ministre et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Source : DILA, 23/03/2016, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

ECLI:FR:CESJS:2012:357152.20121226

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Conseil d'État

Date : 26/12/2012