La loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 ainsi que ses décrets d’application marquaient une volonté d’associer les usagers et les familles. Toutefois, l’application de ces textes reste encore fragile. Ils subissent une érosion qui ralentit les rapports entre les usagers, les familles et les professionnels représentant l’administration. Les recommandations de bonnes pratiques professionnelles (RBPP), lorsqu’elles sont appliquées, ne contrecarrent pas quelques pratiques éducatives, médicales, sociales, scolaires et thérapeutiques « dominantes ».
Quoiqu’à la marge, des ESMS agissent encore en toute monarchie. Pour ceux-ci, associer n’est pas naturel. Ces pratiques mériteraient d’être encadrées pour qu’aboutisse un pouvoir plus égalitaire, plus solidaire et concerté s’inscrivant dans une forme de « frater ». Nous vivons des périodes où la légalité visant à gommer certaines pratiques met du temps à s’imposer. Tous les ESMS ne sont heureusement pas inscrits dans ce constat. Les pratiques dévoilées ci-dessus, si elles ne sont pas des pratiques courantes, touchent parfois les ESMS les plus brillants (ce sont des facteurs de risque inhérents au métier).
Si la volonté d’associer les usagers, familles et représentants légaux est inscrite dans les bonnes pratiques éthiques, elle demande aux professionnels de modifier leurs rapports dans autant de postures et de positionnements. Les dirigeants sont-ils capables d’inverser leur communication et de favoriser la participation des usagers, de leurs représentants et des familles à la veille qualité ?
Quelques constats complémentaires
Nombreux sont les ESMS ayant assimilé dans la loi du 2 janvier 2002 et les RBPP les repères de leurs pratiques pour limiter les risques de maltraitance. Les usagers et les familles sont associés dans une volonté de baisser cette toute puissance institutionnelle. Cependant, tous les ESMS n’ont pas fait le deuil de leur fonctionnement d’antan. Comment peuvent-ils faire participer leurs usagers et les familles ? Comment peuvent-ils envisager la mise en place d’une veille qualité ?
En 2000, le rapport Naves et Cathala, visant l’enfance, a évoqué une possible participation des familles. Ces familles avaient mentionné les difficultés de communication avec les ESMS. Les auteurs avaient conclu à des « incompréhensions de logiques » entre familles et professionnels, des pratiques ne favorisant pas le dialogue et débouchant sur des sentiments « d’impuissance et d’humiliation ». Par ailleurs, le rapport Roméo a, quant à lui, souligné les préjugés qui pouvaient s’abattre sur les parents, d’où l’importance d’attribuer aux familles une place dans l’institution.
Que pourraient attendre les usagers, les familles et les ESMS de cette veille qualité ?
La veille qualité recouvre plusieurs objectifs dans les ESMS. Elle s’intéresse à la qualité dispensée (objectifs atteints) et s’articule au maintien ou au développement des objectifs qualité à atteindre.
Pour réaliser ces objectifs, les ESMS doivent mettre en place un système de veille. La veille sert à :
- donner des informations aux dirigeants ou leurs représentants pour prendre des décisions ;
- connaître tout au long du processus d’accompagnement les informations pour réagir ;
- connaître les points de vue des personnes accueillies et de leurs familles et/ou des représentants légaux ;
- à repérer les avancées ou les points morts.
C’est sur ces informations que la direction doit se concentrer et impliquer les parties prenantes.
Cela demande à la direction de définir un ou des niveaux d’exigence avec une équipe plus élargie (élargie car les personnes accueillies font l’objet d’une attente spécialisée et que les familles attendent quelque chose de différent de la part des ESMS). Voilà deux visions encore trop absentes dans nos ESMS et donc préjudiciables au bon fonctionnement des institutions. Comment se priver d’interrogations issues de regards croisés provenant de l’interne et de l’externe ? Se fonder sur la seule vision des dirigeants renforce l’idée d’un clivage entre les parties prenantes, ce qui sur le plan éthique est contraire à l’esprit de la loi du 2 janvier 2002.
Quelles seraient les attributions affectées aux parties prenantes participant à la veille qualité ?
Indispensable au management de la qualité continue, les attributions assureraient aux participants :
- un pouvoir de décision pour la direction ;
- un pouvoir d’avis pour les professionnels ;
- un pouvoir consultatif (sous la forme d’avis) attribué aux personnes accueillies et aux familles issues des CVS ou d’autres modalités représentatives.