Police municipale : sous l’œil de la Cour des comptes

Publié le 25 juillet 2011 à 0h00 - par

Améliorer la formation des policiers municipaux et mieux encadrer le développement de la vidéosurveillance sont deux des recommandations de la Cour des comptes dans son récent rapport sur la sécurité publique. Des préconisations qui s’adressent aussi aux élus locaux.

La Cour et les chambres régionales des comptes ont consacré une enquête à « L’organisation et la gestion des forces de sécurité publique », leur première dans ce domaine. Présentée le 7 juillet dernier, ce rapport a fait depuis couler beaucoup d’encre et suscité de nombreux débats politiques – pour ne pas dire politiciens – notamment en ce qui concerne l’indépendance des magistrats de cette institution de la République. Cette agitation médiatique ne devrait pourtant pas cacher le travail remarquable de la Cour dont le rapport souligne l’apport croissant des collectivités territoriales dans la préservation de la sécurité des citoyens. Les communes y contribuent, en particulier, avec le développement des polices municipales et des systèmes de vidéosurveillance de la voie publique.

Depuis le vote de la loi du 15 avril 1999 sur les polices municipales, ces dernières sont devenues plus nombreuses et leurs effectifs ont été renforcés. En janvier 2010, leurs effectifs atteignaient 19 370 agents contre 14 300 en janvier 2002, soit une augmentation de 35 %.

Les communes ne recourent pas toutes de la même manière à la large palette de missions qui leur sont attribuées par la loi. Si beaucoup restent cantonnées dans des missions administratives et de préventions, d’autres tendent à devenir des forces de substitution de la police nationale.

« En zone de police, le dispositif de coordination aboutit à ce que les services de l’État se retirent des missions de surveillance générale de la voie publique pour se consacrer davantage aux interventions ciblées de lutte contre la délinquance. L’équilibre ainsi établi prend acte du transfert de la police de proximité sous l’autorité du maire et de la priorité donnée à l’action répressive, depuis la LOPPSI de 2002 (loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure), par les forces de sécurité de l’État. Cette évolution fait ainsi dépendre du choix des élus locaux les conditions de mise en œuvre des politiques de sécurité de l’État », note ainsi la Cour des comptes. Du côté des agents, l’hétérogénéité des doctrines d’emploi des polices municipales ne favorise pas leur professionnalisation. « L’extension et la diversification des missions des policiers municipaux appellent un effort accru de formation initiale et continue », insiste le rapport. Enfin, l’action des polices municipales pâtit « d’un manque d’évaluation et de contrôle ».

Par ailleurs, le recours croissant à la vidéosurveillance de la voie publique, encouragé par l’État, ne peut se substituer à l’action des forces de sécurité étatiques ; « il s’y ajoute », poursuit le rapport. À partir des données des services de police et de gendarmerie, la Cour estime à environ 10 000 le nombre de caméras de surveillance de la voie publique fin 2010. L’État a engagé un programme de triplement en trois ans du nombre de caméras, d’ici 2012.

Pour la Cour, ce programme représente un investissement d’au moins 300 millions d’euros, principalement les communes. Il est vrai que les collectivités peuvent bénéficier de subventions sur le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) pour leur déploiement. En revanche, les dépenses annuelles d’exploitation, aussi estimées à 300 millions d’euros, restent à leur charge. « L’importance des sommes en jeu justifie que l’efficacité des dispositifs de vidéosurveillance de la voie publique soit évaluée », souligne le rapport. Enfin, le déploiement et l’utilisation de ces dispositifs (qui dépendent des préfets) s’opèrent dans des conditions de régularité mal contrôlées et parfois en infraction à la loi.

La Cour pointe notamment le manque de contrôle des commissions départementales de vidéosurveillance sur la conformité des projets présentés aux textes législatifs et réglementaires. Certes, cette pratique favorise une gestion souple des dispositifs par les communes, notamment celles dépourvues de police municipale, qui y affectent des personnels de leur choix. « Elle constitue néanmoins une infraction à l’article 10 de la loi du 21 janvier 1995 et au Code général des collectivités territoriales », rapportent les magistrats. Ceux-ci ont d’ailleurs constaté un manque de professionnalisation chez les agents communaux chargés d’exploiter les systèmes de vidéosurveillance de la voie publique, notamment de visionner les images. L’association nationale des villes vidéosurveillées (AN2V), rebaptisée récemment association nationale de la vidéoprotection, accompagne pourtant certaines collectivités pionnières sur ces questions depuis plusieurs années.

 

Alan Kerhel
 

photo : Wikimedia


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