En Bretagne, la Côte de Granit Rose vise l’Unesco

Publié le 26 mars 2021 à 10h41 - par

D’impressionnants chaos rocheux aux formes bizarres en bord de mer, vieux de plus de 300 millions d’années : des passionnés se sont donné comme objectif de faire inscrire la Côte de Granit Rose, près de Lannion (Côtes-d’Armor), comme site naturel au patrimoine mondial de l’Unesco.

En Bretagne, la Côte de Granit Rose vise l'Unesco

Le phare de Ploumanac’h, de couleur rose comme tous les blocs de pierre sur lesquels il est juché, est l’une des figures emblématiques de cette côte où se succèdent des rochers dotés pour certains de petits noms en raison de leurs formes évocatrices : « chaise du curé », « chapeau de Napoléon » ou encore « bouteille renversée ».

« C’est un site naturel à valeur exceptionnelle et universelle », s’enthousiasme Marielle Kerbaol, présidente de l’association qui porte le projet.

« On est sur des éléments extraordinaires en termes de qualité paysagère et d’originalité. C’est unique au monde », confirme Didier Olivry, directeur pour la Bretagne du Conservatoire du littoral.

Odile Guérin, géologue et membre du comité scientifique constitué pour préparer le dossier, plante le décor : « Il faut savoir qu’ici existaient à l’époque des montagnes qui n’avaient rien à envier à l’Himalaya (…) Quand le magma sort à la surface de la terre, il donne de la lave mais quand il refroidit en profondeur, il va donner du granit. C’est l’érosion qui a rendu ce granit visible depuis quelques dizaines de milliers d’années ».

Soumis à l’érosion naturelle par une mer puissante, des vents souvent forts et les pluies, ce site fragile doit aussi être protégé contre une urbanisation difficile à maîtriser, comme face à un flux touristique concentré sur une brève période de l’année, plaide Marielle Kerbaol. « L’affiliation à un réseau de sites mondiaux oblige autant qu’elle permet », résume-t-elle.

« Obligation à la vigilance »

« Le label est attribué et revu chaque année. Il peut être retiré (…) C’est donc une obligation à la vigilance », rappelle Jean-Pierre Grunfeld, qui a déjà mené des dossiers de ce type.

« On se trouve face à l’apparente pérennité de ces sites sans réaliser que l’excès de fréquentation les met en péril », constate-t-il.

Délimiter le périmètre du projet est aussi un enjeu. La côte de Granit rose compte une dizaine de kilomètres, de Perros-Guirec à Trébeurden, mais le comité scientifique « a considéré qu’on ne pouvait pas se limiter à une zone aussi étroite », relève l’historien Jean-Jacques Monnier.

D’autant que, « dans cette poche magmatique de cette côte du Trégor, une dizaine de granit se sont constitués (…) On a trois grandes pulsations, avec des faciès différents : rose, beige, et même carrément gris, à l’île Grande. On passe de l’un à l’autre sans s’en rendre compte ».

Le périmètre envisagé devrait au minimum être enchâssé entre deux fleuves côtiers, le Léguer à l’ouest et le Trieux à l’est. Il engloberait notamment l’archipel des Sept îles, réserve naturelle nationale où se niche la plus importante colonie d’oiseaux marins de France. Il s’agit aussi d’y intégrer l’arrière-pays et l’histoire des activités humaines, à commencer par « les carrières, comme à l’île Grande où jusqu’à 300 ouvriers travaillaient », se remémore Jean-Jacques Monnier. « C’est un dossier très large, qui va englober des problématiques très diverses ».

Le Conservatoire du littoral voit cette initiative d’un bon œil : « Des projets de ce type permettent de mobiliser les partenaires concernés autour de la réappropriation et de la revalorisation d’un territoire, de sensibiliser davantage la population (…) Car connaître la richesse d’un territoire, c’est déjà la moitié du chemin pour le protéger ».

« L’Unesco, en termes de notoriété, c’est de portée mondiale. Ça nous permettrait de faire venir une population différente et d’allonger les périodes de fréquentation » au-delà de la saison estivale, analyse Erven Léon, maire (DVD) de Perros-Guirec dont la commune a parfois du mal à gérer les fréquentations de pointe : « Certains jours d’été, le sentier des douaniers, c’est un peu la procession… »

L’élu mesure aussi la charge, notamment financière, pour constituer un tel dossier qui nécessitera progressivement l’implication active des collectivités.

Consciente des aléas à venir comme des décisions « géopolitiques » de l’Unesco, Marielle Kerbaol est confiante : « Il faudra trouver le bon moment. Mais pour l’instant, on se met au travail ! »

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