Le tournant de la rigueur passe mal à la mairie écologiste de Grenoble

Publié le 13 juillet 2016 à 9h00 - par

Fermetures de bibliothèques, baisse des effectifs municipaux… Un  vent de fronde souffle sur  Grenoble, deux ans après l’élection d’un maire écologiste qui a présenté un plan d’économies décrit comme une « casse du service public » par ses adversaires.

Le tournant de la rigueur passe mal à la mairie écologiste de Grenoble

Lundi soir, le conseil municipal de la ville gérée par une coalition entre EELV, le Parti de gauche et des collectifs citoyens a dû être annulé pour cause de manifestation. Des dizaines d’employés municipaux, partisans de Nuit Debout, militants socialistes ou simples habitants ont empêché les débats de se tenir en tapant sur les murs, le tout dans un concert de sifflets.

Puis la foule a fini par envahir la salle du conseil. « Piolle, Valls, même combat! », « On n’a pas voté pour ça ! », scandaient une partie des manifestants, tandis que d’autres criaient plus sobrement « On veut nos bibliothèques ».

Dans la centaine de mesures d’économies de l’équipe d’Éric Piolle (EELV), quelques-unes ont cristallisé l’opposition, comme la baisse du nombre d’assistantes sociales, la suppression d’une centaines d’emplois municipaux (sur 4 000) et surtout la fermeture de trois bibliothèques dont deux dans des quartiers populaires, en contradiction avec ses engagements de campagne.

« On enlève à ceux qui ont le moins, qui en ont le plus besoin », regrette Céline Mathieu, membre de l’union du quartier sensible Village Olympique-Vigny Musset (VOVM).

Filer les clés au préfet

Le maire, lui, met en avant la nécessité d’un « effort très important » pour faire face à la baisse des dotations de l’État, d’un montant de 17 millions d’euros entre 2013 et 2017.

« On s’est battu contre la baisse des dotations. On garde le cap mais on prend en compte la réalité », explique-t-il, affirmant que l’alternative était de « filer les clés au préfet » qui aurait mis la ville sous tutelle.

M. Piolle renvoie aussi la responsabilité à son prédécesseur socialiste Michel Destot (1995-2014) et à sa « stratégie de fuite en avant », consistant, selon lui, à laisser filer la masse salariale alors que la ville a déjà des impôts élevés et une dette très lourde comparée aux communes de même taille (1 687 euros/habitant).

« On comprend la contrainte financière. C’est la méthode qui est incompréhensible, hyper brutale pour une ville qui prône la participation », rétorque Aude Bajon du collectif Hauquelin, qui se bat contre la fermeture d’une bibliothèque au centre-ville.

« Une concertation, on nous en a promis une en septembre pour nous expliquer comment vivre sans bibliothèque », ironise Cécile Cenatiempo, présidente de l’union de quartier VOVM.

Chantre de la démocratie participative, Éric Piolle assume l’absence de concertation. Elle s’explique, selon lui, par la nécessité d’éviter « deux écueils » : la concurrence entre quartiers et celle entre politiques publiques (sacrifier la culture au profit du social par exemple).

Et même avec les fermetures annoncées, Grenoble comptera toujours une bibliothèque pour 14 500 habitants contre une pour plus de 30 000 à Lyon, Montpellier ou Nantes, fait valoir la mairie.

Décroissance

L’opposition de droite dénonce une « casse sans précédent du service public » : « Ils mettent en œuvre la décroissance », ironise Matthieu Chamussy (Les Républicains).

« Le plan d’austérité n’a pas été discuté, négocié. C’est malheureux, désespérant pour la démocratie », regrette Paul Bron, qui siège dans l’opposition de gauche.

Dans une lettre ouverte, Jérôme Safar, candidat malheureux du PS en 2014, estime lui que la gestion de la nouvelle équipe est seule responsable de « ce plan de destruction massif » du service public, qui « ne peut en aucun cas être imputé aux baisses de dotations de l’État ».

L’ancien maire (LR) Alain Carignon, condamné pour corruption en 1996, a même proposé de vendre l’Hôtel de ville pour désendetter la municipalité.

« C’est la réaction de ceux qui se vivent comme propriétaires du système », commente M. Piolle. « On est là pour faire émerger quelque chose de nouveau plutôt que de gérer l’effondrement du modèle actuel. Et les périodes de transition sont toujours difficiles. »

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