Marie Batoux : “Nous demandons un dialogue entre les collectivités et l’État sur le financement de la filière animation”

Publiée le 27 mai 2024 à 9h20 - par

Entretien avec Marie Batoux, adjointe au maire de Marseille et membre du comité de la filière animation pour France urbaine, qui décrypte les déceptions des élus après la dernière réunion du comité de filière, le 30 avril 2024.
Marie Batoux : “Nous demandons un dialogue entre les collectivités et l'État sur le financement de la filière animation”

Devenir du fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FSDAP) pour les villes pratiquant la semaine de quatre jours et demi, mise en place du service national universel (SNU)… L’avenir de la filière animation préoccupe France urbaine. Devant les intentions « floues, voire inquiétantes » de l’État, l’association d’élus, qui participe au comité de filière animation depuis sa création en 2022, attend des réponses concrètes, en particulier sur la pérennité des financements. En effet, les collectivités, employeurs directs ou donneurs d’ordre dans le cadre de convention ou de délégation de service public, sont impactées par l’inflation et la hausse des charges qui les contraignent parfois à diminuer des services publics. Marie Batoux, adjointe au maire de Marseille et membre du comité de la filière animation pour France urbaine, revient sur la dernière réunion du comité de filière du 30 avril 2024 et nous explique les déceptions des élus.

Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le comité de filière animation et qui y participe ?

À la suite d’une crise magistrale de l’animation dans les collectivités, il fallait un endroit pour travailler sur le statut de l’animateur et les grands sujets autour de l’animation, que France urbaine avait elle aussi demandé car les villes sont en charge du périscolaire – une responsabilité lourde et une question centrale de l’animation dans les territoires. Ce comité de filière, aujourd’hui présidé par le maire de Pont-Audemer, Alexis Darmois, a été mis en place en février 2022 par la ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la jeunesse et des familles, Sarah El Haïry, alors secrétaire d’État. Il représente l’ensemble des structures d’éducation populaire, les associations d’élus, les syndicats professionnels…

À quelles difficultés êtes-vous confrontés dans ce comité de filière ?

Depuis son installation, pléthore de groupes de travail ont été mis en place. Mais la seule décision que nous avons identifiée, c’est le doublement de l’aide accordée par la Caisse d’allocations nationale familiales (Cnaf) pour former les animateurs au Bafa, qui a été portée à 200 euros au 1er juillet 2023. On attendait une parole de la ministre qui nous a dit regarder attentivement ce qui avait été produit par le comité de filière, mais elle ne nous a donné ni calendrier ni orientations. Tout le travail des groupes techniques et les avis du comité étaient censés lui être remontés, mais lors de la réunion du 30 avril, il est apparu qu’elle avait peu de temps à y consacrer et qu’elle prenait visiblement connaissance du dossier. Elle ne nous a pas vraiment donné d’indications laissant entrevoir des perspectives pour l’animation dans un délai assez bref. Elle a simplement pris note et tout renvoyé aux décisions budgétaires en cours au niveau du gouvernement. Or, cela fait deux ans que ce comité de filière travaille, tandis que les villes sont contraintes de fermer des services, des centres aérés, et sont aux prises avec les familles qui se retrouvent avec des difficultés de garde et doivent trouver des solutions plus chères.

Quelles revendications porte France urbaine ?

Nous avons un problème important de financement du périscolaire. Il y avait notamment un fonds de soutien aux activités périscolaires, qui a été supprimé. Les collectivités ont des difficultés extrêmement conséquentes dues aux répercussions de l’inflation, des coûts de l’énergie, des salaires… On aura donc du mal à assumer notre part si on n’a pas de dialogue sur ce sujet avec le gouvernement car c’est nous qui devrons appliquer les décisions qu’il prendra. Nous avons besoin de connaître les perspectives budgétaires pour les collectivités, qui sont soit des employeurs soit des financeurs d’associations d’éducation populaire. C’est pourquoi nous sommes en train de finaliser un courrier à l’intention de la ministre et du président du comité de filière, pour demander un dialogue entre les collectivités et l’État, afin de répondre ensemble à la problématique posée. Nous signons ce courrier avec le Réseau français des villes éducatrices (RFVE) et l’Association nationale des directeurs et des cadres de l’éducation des villes et des collectivités territoriales (ANDEV), et nous espérons la signature de l’Association des Maires de France (AMF).

Les communes sont également confrontées au manque d’animateurs ?

Nous voulons aussi des réponses sur la formation des animateurs ou encore sur les colonies de vacances. Le droit aux vacances qui reste prioritaire, est un peu mis en difficulté aujourd’hui. Alors que le pass colo est très positif, le SNU (Service national universel) concurrence le recrutement des animateurs de colos : on leur demande le même type de compétences que pour l’animation, avec des grilles salariales bien plus élevées que celles des associations d’animation populaire. Ce dispositif vient donc vider notre pool d’animateurs. Or, comment assumer les missions si on est en déficit d’animateurs ? À Marseille, par exemple, il nous en manque mille. Au-delà de tout ça, nous voulons rester positifs, pour trouver des solutions, dans le cadre d’un dialogue d’un calendrier et d’orientations de la part du gouvernement, avec la volonté de proposer des services publics réels à la population.

Propos recueilllis par Martine Courgnaud – Del Ry

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