Le juge administratif poursuit sa mue

Publié le 16 janvier 2012 à 0h00 - par

Le décret du 23 décembre 2011 modifie le déroulement des audiences devant les tribunaux administratifs.

Les parties auront le dernier mot à l’audience

Longtemps, le déroulement de l’audience devant le juge administratif illustrait la prédominance des juges. Ainsi, ils avaient la possibilité de soulever un moyen d’office, de nature à donner une solution au litige, sans qu’aucun débat contradictoire n’ait été tenu sur la question. Le décret du 22 janvier 1992 a mis fin à cette anomalie en obligeant la juridiction à permettre aux parties de discuter du moyen que le juge envisage de soulever d’office.

Jusqu’à une date récente, le rapporteur public (l’ancien commissaire du gouvernement) prenait la parole en dernier. Il exposait la solution qui lui semblait à même de régler le litige, et les parties ne pouvaient répondre à son argumentation. Après une phase transitoire, et d’expérimentation, le décret de décembre dernier généralise une règle nouvelle. Désormais, le rapporteur public prononce ses conclusions et les parties peuvent ensuite présenter leurs argumentations, et également, bien sûr, répondre au rapporteur public, qui n’a plus le dernier mot.

Mais le rapporteur public ne conclura plus sur tous les dossiers jugés par une formation collégiale

Dans certaines matières (contentieux du séjour et de l’éloignement des étrangers, permis de conduire, taxes foncière et d’habitation), le président de la formation pourra dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de conclure sur certains dossiers. Cette possibilité n’est soumise à aucune condition par le décret. Mais elle ne pourra concrètement concerner que les dossiers dans laquelle la solution s’impose, tout au moins aux yeux des magistrats. Il s’agit des dossiers dans lesquels les textes ne posent pas de problèmes d’interprétation et où les faits sont d’une parfaite clarté.

Les syndicats de la juridiction administrative s’inquiètent de l’institution d’une justice à deux vitesses, et d’une atteinte à l’égalité de traitement entre les justiciables. Souhaitons que ces craintes ne se concrétisent pas. En la matière, tout dépendra de l’application, qui sera à coup sûr mesurée, qu’en feront les magistrats administratifs.

Laurent Marcovici