Bioéthique : le Comité d’éthique a trois mois pour se faire un avis

Publié le 6 juin 2018 à 8h16 - par

D’inévitables « points de tension » sur la PMA et l’euthanasie, mais aussi des « valeurs » partagées : le Comité d’éthique (CCNE) a désormais trois mois pour rendre son avis sur les thèmes des États généraux de la bioéthique, après la publication mardi 5 juin de son rapport de synthèse.

Bioéthique : le Comité d'éthique a trois mois pour se faire un avis

Ce document ne contient aucune préconisation ni prise de position. Son but est uniquement de synthétiser les débats organisés entre mi-janvier et fin avril. Ils ont eu lieu sur internet, lors de conférences dans tout le pays et durant des auditions de responsables associatifs ou religieux menées par le CCNE.

L’objectif est d’aider le gouvernement à rédiger un projet de loi de bioéthique. « Nous sommes dans la première phase. Le rapport de synthèse est neutre, aussi objectif que possible, pour dire ce que le CCNE a cru entendre pendant les États généraux », a commenté son président, Jean-François Delfraissy, lors d’une conférence de presse à Paris. « Ce rapport n’est pas l’avis du CCNE, qui viendra à la rentrée, probablement courant septembre », a-t-il ajouté.

Le rapport de synthèse a été remis aux ministères de la Santé, de la Justice et de l’Enseignement supérieur, ainsi qu’à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). L’objectif est un dépôt du projet de loi « au Parlement à l’automne et une adoption de la loi au 1er semestre 2019″, a twitté le député et mathématicien Cédric Villani, vice-président de l’OPECST.

En raison de sa neutralité, la lecture de ce rapport ne réserve aucune surprise. Logiquement, il relève l’existence de « points de tension » sur les questions sociétales polémiques au programme des États généraux. La première est l’ouverture de la procréation médicalement assisté (PMA) aux femmes homosexuelles et aux femmes seules. La deuxième est la fin de vie (euthanasie et suicide assisté, qui ne figureront pas dans la loi de bioéthique car ils font l’objet d’un texte à part).

Débats à l’Élysée

« C’est un rapport objectif, avec les arguments pour et les arguments contre, il n’y a rien de nouveau », a jugé Joël Deumier, le président de SOS Homophobie, qui milite pour la PMA pour toutes les femmes. Parmi les limites de ces États généraux, M. Delfraissy a cité « la présence de militants (…) qui ont pu monopoliser la parole sur le site web » dans les débats sur la PMA. Ces derniers mois, les associations pro-PMA ont accusé les « anti » d’avoir confisqué le débat. À l’inverse, ces derniers ont assuré que leur plus forte représentation traduisait une opposition de l’opinion à l’élargissement de la PMA, contrairement à ce que disent les sondages.

C’est un rapport « assez factuel » dans lequel « on ne retrouve pas l’expression d’une très large majorité de personnes favorables au statu quo sur la PMA », a réagi la présidente de La Manif pour tous, Ludovine de la Rochère. « Les États généraux de la bioéthique ne sont pas un sondage d’opinion », s’est défendu M. Delfraissy, selon qui « il s’agit d’écouter les arguments qui conduisent tel ou tel individu ou groupe à prendre telle ou telle position ». Il a par ailleurs confirmé qu’Emmanuel Macron avait organisé des dîners à l’Élysée pour débattre de la PMA et de la fin de vie, comme l’a révélé le journal La Croix : « Il y avait des personnalités aux opinions différentes, elles ont pu s’exprimer et le président de la République a pu les écouter ».

Malgré l’absence de consensus sur la PMA ou la fin de vie, M. Delfraissy a voulu voir le verre à moitié plein en soulignant l’existence de « grandes valeurs partagées » constitutives d’une « éthique à la française ». Parmi elles, « la non-marchandisation des corps ».

Les sept autres thèmes étaient plus strictement scientifiques et ont moins mobilisé : recherche sur l’embryon, médecine génomique, don d’organes, neurosciences, données de santé, intelligence artificielle et rapport santé/environnement.

Enfin, le CCNE avait constitué un « comité citoyen », échantillon de 22 personnes représentatif de la population, qui a produit son propre rapport. Il a jugé la mobilisation citoyenne « insuffisante » lors des États généraux, et s’est prononcé aux deux-tiers pour l’euthanasie.

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