Professionnels de santé : la crise sanitaire a freiné le recensement des violences en milieu de santé

Publié le 28 novembre 2022 à 13h54 - par

Le rapport 2022 de l’Observatoire national des violences en milieu de santé et sa synthèse sont en ligne sur le site du ministère de la Santé et de la Prévention.

Le rapport 2022 de l’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) traite des violences commises en 2020 et 2021 dans les établissements de santé. Les signalements recueillis par l’Observatoire ne sont pris en compte que sur la base du volontariat des établissements et n’ont donc pas vocation à l’exhaustivité, rappellent les auteurs du rapport. Les données collectées au cours des deux années écoulées sont, bien évidemment, marquées par l’impact de la crise sanitaire. De fait, le nombre d’établissements déclarants et le nombre de signalements sont en baisse.

Pour mémoire, l’ONVS recense les atteintes aux personnes et aux biens hors du champ des pratiques médicales. Les incivilités, violences et actes de malveillance signalés le sont :

  • De patients/accompagnants et autres personnes sur personnels de santé,
  • Entre patients/accompagnants et autres personnes,
  • De personnels de santé sur patients/accompagnants,
  • Entre personnels de santé.

En 2020 et 2021, la crise sanitaire a limité l’accès libre dont les usagers (patients/résidents, accompagnants) bénéficiaient auparavant pour se rendre dans les établissements de soins. Il semble que c’est la première fois que l’hôpital a été « fermé », avec un contrôle strict, puis un filtrage permanent. « La mise en œuvre de ces deux mesures, limitant ainsi les flux non contrôlés dans les établissements de soins, est certainement à l’origine d’une baisse des atteintes aux biens et aux personnes déclarées et semble avoir participé également à une baisse de l’insécurité ressentie », commentent les auteurs du rapport. De fait, les restrictions des déplacements sur le territoire à la suite principalement des confinements, des couvre-feux, les limitations d’accès dans les établissements de soins, de même que les déprogrammations d’opérations, les reports, annulations et limitations de consultations, les mesures imposées pour éviter la propagation du virus et la contamination ont limité le nombre d’usagers dans les établissements. À l’inverse, ne pas pouvoir rendre visite à un patient ou un résident, parfois en fin de vie, ne pas venir à plusieurs personnes en chambre et ne pas y rester plus d’un certain temps, ne pas pouvoir se recueillir auprès d’un proche patient ou résident décédé, contester les règles sanitaires imposées, notamment, avec les gestes barrières, ne pas pouvoir entrer dans l’établissement sans présentation d’un passe-sanitaire, d’un test covid négatif…, « toutes ces restrictions ont été aussi l’occasion de faire émerger ou de renforcer divers types de réactions d’atteintes aux personnes et aux biens. »

Voici les principales données chiffrées pour 2020 et 2021.

  • En 2020 : 383 établissements ont déclaré 19 579 signalements. 81 % sont des signalements d’atteintes aux personnes, dont 24 % liées directement à un trouble psychiques ou neuropsychique ; 19 % sont des signalements d’atteintes aux biens.
  • En 2021 : 391 établissements ont déclaré 19 328 signalements. 82 % sont des signalements d’atteintes aux personnes, dont 21 % liées directement à un trouble psychiques ou neuropsychique ; 18 % sont des signalements d’atteintes aux biens.

Par comparaison, en 2019, 451 établissements avaient déclaré 23 780 signalements d’atteintes aux personnes et aux biens.

En 2020 comme en 2021, les violences physiques et menaces avec arme représentent environ la moitié des atteintes aux personnes. Les personnels, principalement les infirmières et les autres personnels soignants, représentent plus de 80 % – 83 % en 2020, 84 % en 2021 – des victimes de ces atteintes.
Au cours de ces deux années, les cinq structures et unités déclarant le plus de violence ont été les mêmes. Par ordre décroissant :

  • La psychiatrie,
  • Les USLD/Ehpad,
  • Les urgences,
  • Les unités de soins,
  • La médecine.

Les trois premières catégories de structures ou services totalisent ensemble plus de 47 % des déclarations en 2020 et 2021.

S’agissant des suites pénales et des décisions de justice :

  • En 2020, les signalements de violence ont donné lieu à 1 574 plaintes et à 149 mains courantes, dont 461 plaintes et 37 mains courantes déposées par les établissements eux-mêmes. 77 % des cas de violences n’ont pas été suivis d’une démarche judiciaire.
  • En 2021, les signalements de violence ont donné lieu à 1 446 plaintes et à 127 mains courantes, dont 386 plaintes et 35 mains courantes déposées par les établissements eux-mêmes. 78 % des cas de violences n’ont pas été suivis d’une démarche judiciaire.

À l’occasion de la publication du rapport 2022 de l’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS), la ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé s’est rendue à Chambéry, le 21 novembre, pour rencontrer des soignants et des acteurs de la sécurité et rappeler les objectifs du ministère en matière de lutte contre les violences faites aux soignants. « Le respect dû aux professionnels est pour moi une valeur cardinale : toutes les violences dont ils sont victimes doivent être dénoncées, combattues et sanctionnées pour que jamais elles ne soient banalisées », a déclaré Agnès Firmin Le Bodo.

La ministre déléguée a ouvert quatre nouveaux axes de travail :

  • La refonte du signalement à l’ONVS, grâce à une nouvelle plateforme en ligne dès janvier 2023. Intégrée au « portail de signalement des événements sanitaires indésirables » du ministère, elle sera plus facilement identifiable et donc plus accessible. Un mode de saisine y sera proposé aux professionnels libéraux, là où seuls les utilisateurs en établissement de santé pouvaient déclarer auparavant.
  • La mobilisation conjointe des établissements, des ordres et des forces de sécurité pour accompagner les soignants face aux violences. Une circulaire ministérielle rappelant les bonnes pratiques en matière de protection fonctionnelle des agents de la fonction publique hospitalière (FPH) sera bientôt signée. Une coopération renouvelée avec les ordres, ainsi qu’avec les représentants de la justice, de la police et de la gendarmerie, sera élaborée pour renforcer l’application des conventions « santé-sécurité-justice » déjà existantes et en les adaptant aux outils numériques déployés par les forces de sécurité intérieure.
  • La diffusion des principes de sécurité bâtimentaire, grâce à la publication prochaine d’un guide. Celui-ci s’adresse à tout type d’établissement de santé et propose un corpus de bonnes pratiques. Les questions de sécurité bâtimentaire concernent également les structures de ville : c’est pourquoi le guide sera décliné dans une nouvelle version dédiée aux structures de ville en 2023.
  • Une concertation des représentants des ARS, des établissements publics et privés, des ordres, des forces de l’ordre, de la justice, des étudiants, des organisations syndicales, des métiers de la sûreté et de la sécurité incendie, ainsi que des membres de la Conférence nationale de santé, va être lancée dans les prochaines semaines. Celle-ci visera à mieux répondre aux enjeux de prévention des violences, de formation des soignants à y faire face et d’accompagnement des témoins et des victimes, par des propositions présentées au printemps 2023.

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