Les articles 432-10 et suivants du
Code pénal
répriment les infractions commises par des personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public qui octroient des avantages indus pour satisfaire des intérêts personnels.
La concussion
Il s’agit pour l’élu ou le fonctionnaire de percevoir des droits ou des impositions non dus, ou d’accorder des exonérations injustifiées (art. 432-10 du Code pénal). La peine encourue peut aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende.
À la différence de la corruption – où l’élu ou le fonctionnaire sollicite ou accepte pour lui-même une somme d’argent pour accomplir, retarder ou omettre un acte de sa fonction –, la concussion suppose que l’élu ou le fonctionnaire exige, comme un droit prétendument fondé sur la loi, de l’argent.
En matière d’urbanisme, il peut arriver qu’un maire puisse, par exemple, ne pas prendre en compte l’ensemble des places de stationnement exigibles au titre d’un document d’urbanisme et ainsi sous-évaluer la participation requise en cas de non-réalisation par le constructeur des aires de stationnement dans l’emprise du projet.
Il peut également arriver qu’il soit mis à la charge d’aménageurs des équipements publics qui dépassent très largement les besoins futurs des habitants ou usagers.
Exemple : on notera que la chambre criminelle de la Cour de cassation a, dans un arrêt en date du 16 mai 2001, condamné un maire pour avoir imposé à chaque promoteur ou particulier le paiement d’une somme par logement construit, somme qui n’était prévue par aucun texte ni par une délibération du conseil municipal, et que ces perceptions, qui avaient donné lieu à un registre de la mairie ayant fait office de rôle, étaient versées sur un compte occulte d’un établissement public communal (
Cass. crim., 16 mai 2001, Bull. crim. n° 124
).
La corruption passive et le trafic d’influence
La corruption passive consiste dans le fait, pour un élu ou un fonctionnaire, de solliciter ou d’agréer un avantage appréciable directement ou indirectement en argent pour accomplir ou s’abstenir d’accomplir un acte entrant dans sa fonction ou son mandat, ou facilité par cette fonction ou ce mandat. Le trafic d’influence se distingue de la corruption passive (art. 432-11 du
Code pénal
) en ce que, dans cette hypothèse, l’élu ou le fonctionnaire va, pour obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, emplois, marchés ou toute autre décision favorable, user de son influence réelle ou supposée.
La peine encourue est une amende de 150 000 € et un emprisonnement de 10 ans.
On comprendra aisément pourquoi ces délits peuvent être fréquents dans le domaine de l’urbanisme. Les maires et les fonctionnaires en charge du service urbanisme peuvent être en proie à de nombreuses sollicitations douteuses pour délivrer une autorisation de construire.
Pour un exemple topique, il faut citer l’arrêt Ville de Cannes de la chambre criminelle de la Cour de cassation, rendu le 8 février 2006. Dans cet arrêt, le maire de la ville de Cannes a été condamné pour corruption passive. Ce dernier s’était, en effet, fait remettre une somme d’argent visant à l’obtention d’une autorisation de changement de destination d’un immeuble.
Le délit d’ingérence
Ce délit (art. 432-12 du Code pénal) consiste dans le fait, pour une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou une opération, dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement.
La peine encourue est une amende de 75 000 € et un emprisonnement de 5 ans.
La jurisprudence est assez sévère en la matière. Ainsi, on peut noter que la chambre criminelle de la Cour de cassation a condamné un maire qui avait agrandi sa propriété en soustrayant une partie de la parcelle supposée affectée à des travaux de voirie votés en conseil municipal sous sa présidence de séance (
Cass. crim., 19 mars 2008, Jurisdata n° 2008-043.608
).
Un maire a également été condamné pour prise illégale d’intérêt après la délivrance d’une autorisation de lotir à une SCI détenue par ses beaux-frères (
Cass. crim., 25 janvier 2006, n° 05-83.559
).
Enfin, il peut également arriver que des changements de zonage « opportun » rendent constructibles des terrains appartenant à un maire, par exemple. Ces comportements sont sévèrement réprimés.